La salle Alfred-Pellan de la Maison des arts, à Laval, présente une soixantaine d'oeuvres de Lisa Tognon dans une atmosphère calfeutrée où l'éclairage discret rappelle celui des cabinets d'estampes. Ainsi le voulait le commissaire René Viau.

Dans cette exposition intitulée Passages, on ne trouve que des oeuvres abstraites sur papier, qui demandent un peu de temps, ou de recueillement, pour livrer tous leurs secrets. On a d'abord l'impression de se trouver devant des pièces gestuelles, spontanées. On se rend compte qu'elles sont en fait très travaillées. Le geste de l'artiste lavalloise s'inscrit dans un ensemble d'interventions dont certaines évoquent la calligraphie chinoise, ou japonaise, d'autres, les dégoulinures de la peinture des années soixante. Le papier est parfois marouflé, parfois déchiré ou troué, y compris par le feu.

Lisa Tognon, 51 ans, maîtrise sa matière et son matériau. Ses dessins ressemblent à des estampes; ses estampes sont faites à partir de ses dessins imprimés sur des plaques de cuivre, l'inverse de ce qui se fait habituellement.

René Viau a mis en lumière les liens entre le travail de Lisa Tognon et la passion de l'artiste pour la poésie. On trouve donc çà et là des extraits de poèmes. Les titres donnés aux séries qui divisent l'exposition donnent une idée de cette orientation poétique: Atlantide, Dénouement, Materia Prima, Faire surface, Sans mot dire, En certains moments blancs.

On a ajouté aux dessins et gravures les blocs de bois qui ont servi à faire des marques et des reliefs dans le papier; on peut y voir sur vidéo les performances de la danseuse Ginette Boutin inspirées par les oeuvres de Lisa Tognon. Et l'artiste a monté ses plaques de cuivre les unes sur les autres de manière à former une sorte de grand miroir au fond de la salle qui agit comme un autel au fond d'une chapelle.

Voilà donc une exposition très soignée qui convient à la démarche raffinée et un peu zen de Lisa Tognon.

Soulignons aussi les efforts des responsables de la salle Pellan pour amener les oeuvres aux visiteurs. On y a aménagé quatre espaces où l'on peut s'asseoir et entendre, grâce à des écouteurs, une conversation entre l'artiste et le commissaire. On peut aussi déambuler dans la salle en consultant une feuille plastifiée qui explique la démarche de l'artiste et enseigne aux néophytes l'art de regarder. Sans oublier un catalogue illustré et commenté, outil indispensable aux artistes.

En septembre, ce sera au tour de Denis Rousseau d'être présenté à la salle Alfred-Pellan. La démarche de ce sculpteur et monteur de machines qui réagissent, parfois bruyamment, aux mouvements des visiteurs est aux antipodes du travail de Lisa Tognon. On comprend ici que la salle Alfred-Pellan est ouverte à l'art actuel sous toutes ses formes.

Lisa Tognon, Passages, salle Alfred-Pellan, Maison des arts de Laval, 1395, boul. de la Concorde Ouest (station de métro Montmorency), jusqu'au 4 juillet. Ouvert du mardi au dimanche, de 13h à 17h; vendredi, de 9h à midi et de 13h à 20h. Entrée libre.