Quatrième édition des Printemps du Musée d'art contemporain de Montréal assez réussie la nuit dernière: la fondation du musée a amassé quelque 150 000 $ à l'occasion de sa soirée-bénéfice intitulée Avant-Garde, une fête à laquelle quelque 1000 personnes bon chic bon genre ont participé.

C'est François Martin, directeur artistique d'Abra K Dabra Production et collaborateur du Cirque du soleil, qui était chargé du concept de la soirée. François Martin est l'un des génies montréalais de ce genre de soirées. C'est lui qui est derrière le spectacle Transangdanse du gala-bénéfice du Musée des beaux-arts qui aura lieu le 5 juin.

Au MAC, François Martin et son équipe ont créé une atmosphère fantastique très genre «Cirque du soleil» tant dans les costumes que les maquillages. Les artistes de scène ainsi que le personnel de la soirée étaient vêtus pour donner l'impression d'une autre époque: des sortes de barbares, d'elfes ou de lutins des temps modernes.

«On a voulu réinventer une civilisation en tenant compte des oeuvres exposées au MAC, notamment celles d'Étienne Zack et de Luanne Martineau», a dit François Martin à La Presse, quand il a pu s'arrêter un instant dans ce déploiement artistique ininterrompu.

Les participants de cette soirée produite par Prodigium, surtout des jeunes de 25 à 45 ans qui avaient déboursé 125 $ pour entrer et mis leurs plus beaux atours, étaient servis par des personnages mystérieux et selon une mise en scène parfois ubuesque. Une femme portait un parapluie dont on avait ôté le tissu. Aux branches métalliques pendaient des crevettes fraîches tenues par des épingles à linge.

Deux nymphes toutes de noir vêtues ont passé une partie de la soirée à se promener en tenant une longue tige de bois sur laquelle avaient été placées des dizaines de sucettes faites d'une rondelle de chorizo cuit entourée d'une crevette.

Deux infirmiers ont aussi circulé avec une vraie civière d'hôpital dans laquelle on avait placé un «malade». Le torse était fait de polystyrène mais les jambes et les bras étaient «sans peau» et l'on voyait les «muscles» du patient faits de tranches de prosciutto. Derrière sa tête, on avait placé un aquarium dans lequel reposait son cerveau (un chou-fleur). Un peu plus tard, un artiste a même été placé dans la civière et a servi de plateau.

Durant la soirée, les artistes ont réalisé quelques danses et numéros avec l'équipement qui avait été installé sur la scène centrale. Il y avait de la nourriture à profusion: beaucoup de fruits de mer (huîtres Blue point, pétoncles cuits servis au caviar d'Australie, crevettes, palourdes), des mini-burgers, des rouleaux de fromage à la betterave et un chariot de chocolats fins. Le champagne a coulé une grande partie de la soirée avant de s'épuiser, les fêtards se contentant par la suite de verres de vin ou de cocktails à la vodka.

L'avantage de la soirée est qu'on pouvait déposer son verre et aller visiter les expositions du musée afin de s'écarter un peu du bruit de la scène principale transformée en piste de danse animée par DJ Vito V.

Parmi les oeuvres exposées, les feutres multicolores de Luanne Martineau, une artiste originaire de Saskatoon, donnaient une impression d'être à la campagne, avec sa production mêlant artisanat et formes hautement contemporaines, quelques-unes étant d'ailleurs suspendues.

On pouvait admirer les tableaux des six dernières années de production de l'autoréflexiviste Étienne Zack, inspirateur de la soirée (son exposition de peintures-miroir sur le travail du peintre prend fin demain dimanche), et ceux de Paul-Émile Borduas, dont les oeuvres sont placées sur les murs de façon chronologique ce qui permet de constater l'évolution de sa peinture depuis les années 40 jusqu'un peu avant sa mort, en 1960.

Après avoir fait un tour dans les grandes salles du musée, les participants revenaient dans le brouhaha des conversations et de la musique. Les organisateurs avaient demandé à une demi-douzaine de photographes de flasher tout ce qui bougeait, ce qui donnait une ambiance de paparazzi... même s'il n'y avait aucune vedette, mis à part l'équipe d'artistes bien sûr et la complicité d'Ima, Simple Plan et Andy The-Anh.

On pouvait aussi se faire masser sur une chaise et le ventre d'une femme enceinte s'est transformé en toile grâce au talent d'une jeune peintre qui l'a recouvert de fleurs.

Ce type de soirée permet au musée d'amasser des fonds mais aussi de sensibiliser les jeunes à l'art contemporain, notamment ceux qui sont en moyen. François Martin explique que 300 personnes étaient venues il y a deux ans à ce type de soirée mondaine et 700 l'an dernier. L'atteinte du chiffre de 1000 cette année est donc un succès, selon lui.

Il faudra toutefois innover encore et encore l'an prochain car il y a certainement de la place pour des numéros plus spectaculaires et une animation différente du style «Cirque du soleil» qui ne surprend plus les fêtards montréalais. Pour ce genre de soirée, s'entend.