Après Le monde du corps 2 présentée au Centre des sciences en 2007, voici que s'amène l'exposition Bodies au Centre Eaton. Des corps humains disséqués et montrés, dans les deux cas, mais Bodies traîne un air de controverse en raison de la provenance inconnue des cadavres utilisés.

L'exposition Bodies connaît un immense succès depuis le début de l'été à Québec: 200 000 visiteurs à ce jour et une deuxième prolongation, jusqu'en janvier 2010 cette fois. C'est une exposition similaire (bien qu'avec d'autres spécimens de la firme américaine Premier Exhibitions) qui prendra l'affiche vendredi prochain au Centre d'exposition de Montréal. Là où avaient lieu récemment les expositions sur les objets du Titanic et les inventions de Leonard de Vinci.

D'autres spécimens, mais la même controverse. D'où viennent les corps? De Chine. S'agit-il de prisonniers morts? Même les organisateurs disent l'ignorer. Contrairement à l'exposition présentée en 2007 au Centre des sciences, Bodies utiliserait des cadavres provenant de personnes qui n'étaient peut-être consentantes.

La firme américaine qui prépare les spécimens, Premier Exhibitions, n'a pas voulu en discuter avec La Presse. En entrevue au quotidien Le Soleil au cours de l'été, le directeur médical de la société, Roy Glover, a déclaré qu'il ne savait rien des causes de décès des personnes exposées.

«Ça soulève des questions, mais l'information à propos de ces corps est toujours confidentielle, a-t-il expliqué. Je ne peux pas trouver de dissecteurs aussi compétents et qualifiés au Canada ou aux États-Unis pour faire ce travail. La qualité du travail des Chinois est inégalée dans le monde.»

En fait, les nombreuses expositions de corps humains qui ont subi une plastination ont créé une véritable industrie du cadavre à Dalian en Chine. Selon le New York Times, «des centaines de travailleurs chinois y nettoient, coupent, dissèquent, préservent et reconstituent des corps humains, les préparant pour le marché international des expositions muséales».

Succès et controverses

En 2007 à Montréal, l'exposition Le monde du corps 2 avait également fait sourciller, mais les corps, précisait-on, avaient été légués à des fins d'exposition. Les organisateurs avaient paré au pire en mettant sur pied un comité d'éthique qui y était allé de certaines recommandations. Résultat: 250 000 visiteurs.

La controverse semble cependant inévitable chaque fois qu'une nouvelle exposition arrive quelque part. À Paris en avril dernier, la justice française a interdit l'exposition Our Body, prétextant qu'elle était contraire à la décence.

«L'espace assigné par la loi au cadavre est celui du cimetière. La commercialisation des corps par leur exposition porte une atteinte manifeste au respect qui leur est dû», avait décrété le tribunal.

À Québec, la Commission de l'éthique de la science et de la technologie a demandé qu'un panneau explicatif soit installé à l'entrée de l'Espace du 400e où est présentée l'exposition Bodies.

Les avocats de Premier Exhibitions et ceux de la Commission discutaient toujours cette semaine à ce sujet.

Un panneau du genre existe à New York où l'une des six expositions Bodies est installée depuis 2005. Si un accord survient, des avertissements sur l'origine inconnue des cadavres seront donnés aussi aux spectateurs de Québec et de Montréal, a appris La Presse.

L'exposition Bodies sera présentée à partir du 23 octobre au Centre d'exposition de Montréal, situé dans le Centre Eaton.