Le directeur du nouveau musée de l'Acropole a reculé mardi sur l'affaire du retrait d'un extrait d'une petite animation du cinéaste franco-grec Costa-Gavras montrant les premiers chrétiens endommageant des métopes du Parthénon.

Les responsables du musée, inauguré en juin, avaient décidé le mois dernier de retirer une scène de 12 secondes réalisée par Costa-Gavras dans une animation de 13 minutes montée par le musée, à la suite de plaintes de «certaines personnes ennuyées par la scène».La scène incriminée montre des premiers chrétiens en robe de bure montant sur des échelles sur le Parthénon pour détruire des métopes (un intervalle sur une frise dorique dans lequel se trouve en général un panneau sculpté) et arracher des statues.

«Il s'agit d'une censure inacceptable», s'était insurgé le réalisateur, mettant en cause le rôle de la toute-puissante église orthodoxe de Grèce, qui n'est pas séparée de l'État.

Le professeur Dimitris Pantermalis, directeur du musée, s'est entretenu longuement au téléphone lundi avec le cinéaste pour mettre un terme à la polémique suscitée dans le pays.

«M. Gavras a précisé que la scène sensible ne représentait pas et n'évoquait pas les dommages faits par des prélats mais par des hommes de cette époque», a indiqué M. Pantermalis dans un communiqué.

En conséquence, «après cet éclaircissement de M. Gavras, que le musée accepte comme une présentation historique, le documentaire sera projeté dans sa totalité», a-t-il ajouté.

Sans jamais citer d'ecclésiastiques, M. Pantermalis avait expliqué le retrait de la scène car «certains ont vu les personnages animés comme des moines et non comme des personnages d'époque».

«Pour éviter tout malentendu et étant donné qu'il n'y a aucun doute sur la période évoquée des dommages subis par le monument, mais que les circonstances sont inconnues, il a été jugé utile de garder, évidemment, la référence à l'événement et de retirer un plan de 12 secondes qui n'a aucun rapport avec la substance des faits, ce qui bien sûr ne constitue en aucune sorte une censure», avait ajouté le professeur.

Costa-Gavras avait de son côté déclaré : «je trouve triste et inadmissible pour la Grèce, un pays membre de l'Union européenne, que l'État se courbe devant les pressions de responsables de l'Église».

«Les premiers chrétiens ont fait pas mal de dégâts sur les monuments et les sculptures pour différentes raisons, parfois simplement parce que la nudité» des personnages représentés «les scandalisait», avait-il précisé.

Son idée était de montrer les dommages infligés au monument «par la main de l'homme, pour arriver à la plus grande catastrophe», celle qui a résulté des agissements de Lord Elgin.

Diplomate britannique auprès des Ottomans qui dominaient alors la Grèce, Lord Elgin arracha du Parthénon, au début du XIXe siècle, une douzaine de statues, 56 plaques de la frise orientale et 15 métopes.

Le principal parti d'opposition PASOK (socialiste) avait protesté contre «la politique inadmissible qui n'accepte pas la vérité historique et qui offense une oeuvre artistique».

Lundi, la section grecque du Comité Helsinki pour les droits de l'Homme a annoncé avoir entamé des poursuites en justice contre le musée, demandant que la vidéo de Costa-Gavras soit rétablie dans son intégralité.