Rien à voir avec la Constitution canadienne, mais après deux ans de négociations secrètes, le Canada vient de récupérer de Grande-Bretagne 1200 oeuvres d'art, objets et documents, en grande partie liés au Québec et à son histoire.

Bibliothèque et Archives Canada, en collaboration avec le Musée des beaux-arts du Canada et le Musée canadien des civilisations, ont récupéré au pays cet imposant ensemble d'objets qui appartenaient à la succession Peter Winkworth, né à Montréal mais installé à Londres et, surtout, grand collectionneur d'art et d'objets canadiens remontant jusqu'au XVIIIe siècle.

 

La collection rapatriée comprend 265 aquarelles et dessins, 735 estampes, 13 peintures à l'huile, 94 cartes, 49 photographies et de nombreuses publications et objets divers. Elle renferme des aquarelles réalisées par Maria Morris, l'une des premières artistes professionnelles nées au Canada, et des oeuvres inédites d'artistes peintres comme Clarence Gagnon et George Heriot.

Parmi les oeuvres choisies par le Musée des beaux-arts du Canada, on note deux albums des peintres John Elliott Woolford et James Pattison Cockburn, présentées dans l'exposition Lord Dalhousie, Mécène et collectionneur, qui s'arrêtera à Montréal en 2010.

«La qualité est au rendez-vous. Ce sont des albums exceptionnels, en excellent état. On les avait déjà sous forme de prêt pour notre exposition. Ils sont composés de près de 160 oeuvres qui suivent Lord Dalhousie dans ses voyages et qui montrent les chutes au Canada», raconte René Villeneuve, conservateur associé au Musée des beaux-arts du Canada.

Ce dernier a travaillé à la récupération des pièces sous la conduite du conservateur en chef de la collection Peter Winkworth à Bibliothèque et Archives Canada, Jim Burant. Le coût d'acquisition des artefacts ne sera pas dévoilé, toutefois. En 2002, Bibliothèque et Archives Canada avait déjà acheté 4000 artefacts de Peter Winkworth, lui-même, au coût de 6 millions de dollars.

«Quand vous touchez à l'art canadien et à des choses aussi anciennes, croit M. Villeneuve, on crée généralement l'unanimité. Ramener ici de telles richesses, on ne peut pas s'y opposer. Les trois institutions se sont unies pour rendre possible cette acquisition. C'est formidable.»

Parmi les oeuvres acquises, on retrouve également des aquarelles de James Peachey, de George Heriot et de Peter Rindisbacher. Réalisées in situ, depuis les côtes de Terre-Neuve-et-Labrador jusqu'aux Prairies, en passant par plusieurs paysages de la ville de la capitale et d'autres villages de chez nous, ces oeuvres évoquent la vie au Québec au début de son histoire.

De son côté, le Musée canadien des civilisations a acquis des objets reliés à la conquête, dont une montre de poche commémorant la mort du général Wolfe et un cadran solaire de poche en cuivre ayant appartenu à un officier militaire français pendant la guerre de Sept ans. Les artefacts comprennent également une maquette réalisée pour la conception du Monument Wolfe-Montcalm à Québec, commandée par Lord Durham.

Collection Winkworth

Peter Winkworth est mort en 2005 à Londres à l'âge de 76 ans. Sa passion pour les Canadiana (oeuvres d'art canadiennes) a débuté lorsqu'il a acheté une série d'estampes canadiennes de son oncle John Bernard.

Travaillant comme courtier pour une entreprise canadienne à Londres, il aura par ailleurs longuement oeuvré bénévolement à rapatrier au Canada plusieurs oeuvres d'art jusqu'à être nommé conservateur honoraire du Musée McCord. Il a reçu l'Ordre du Canada en 1983.

«C'était un grand passionné, de décrire M. Villeneuve. Une passion comme la sienne, ça commence à la naissance et ça se finit cinq minutes après la mort. M. Winkworth est resté Canadien dans l'âme toute sa vie. Il passait un mois par année à Montréal. Il avait un intérêt viscéral pour la ville.»