Célébré depuis sa participation à la Biennale de Venise 2007, le nouvel enfant chéri/terrible de l'art contemporain montréalais, David Altmejd, fait l'objet de deux imposantes expositions en Angleterre.

À deux pas d'Oxford Street, dans le centre de Londres, la vitrine de la galerie Modern Art détonne avec ses deux loups-garous poilus et ses onze personnages de plâtre engagés dans une saisissante orgie en arrière-plan.

 

En plein coeur du quartier du shopping, les créatures fantasmagoriques du Montréalais David Altmejd ne peuvent qu'attirer les regards des curieux et piquer la curiosité des amateurs d'art. Spectaculaires, ses nouvelles créations retiennent d'autant plus l'attention qu'elles ont été dévoilées à l'occasion de Frieze, l'importante foire d'art contemporain de Londres.

La coïncidence n'est pas fortuite: «Frieze représente un moment incontournable de l'année où Londres reçoit nombre d'amateurs d'art étrangers. Cela donne une visibilité importante à l'artiste que nous exposons», souligne Andrew Cannon, assistant du directeur de la renommée galerie Modern Art.

En plus d'être exposé à Londres, le travail d'Altmejd est également présenté à la Biennale de Liverpool en ce moment. Deux immenses géants y sont fragmentés au point d'en devenir presque abstraits. Cette «jungle purulente», selon les mots du critique du Financial Times, occupe toute une salle de la Tate Liverpool.

Oeuvres inédites

Comme à Liverpool, les oeuvres présentées à Londres sont toutes inédites. «Elles ont été créées spécifiquement pour cette exposition», soutient Andrew Cannon en pénétrant dans la première salle d'exposition.

Première surprise: le sculpteur, qui travaille depuis longtemps avec des cristaux, des miroirs et de la fourrure, s'est visiblement mis les deux mains dans le plâtre cette fois. Si la matière est classique, la manière l'est moins: les 11 «statues» d'hommes grandeur nature de la pièce The Healers sont engagées dans une immense orgie. À genoux, allongés, debout, éviscérés, ils forment une immense chaîne de corps plus ou moins enlacés et démembrés. Dans la salle suivante, un autre duo de plâtre est engagé dans un frénétique 69.

«C'est beaucoup plus figuratif que ses oeuvres précédentes», note Andrew Cannon. Et explicite, non? «Oui, je pense que l'on peut dire ça», note le directeur adjoint. Time Out, la bible culturelle londonienne, a apprécié cette évolution. Rappelant les similitudes avec les mannequins libidineux de l'artiste Charles Ray, le critique de Time Out considère que le «travail d'Altmejd représente sans doute l'équivalent en plus salace pour les années 2000».

Également impressionné, le critique du Guardian, Adrian Searle, est toutefois moins enthousiaste. «(Altmejd) est doué pour le spectaculaire, à la manière des vitrines des boutiques chics. C'est de l'art pour des gens qui ne sont même pas humains. Les collectionneurs d'Altmejd sont probablement des crapauds d'une autre galaxie recouverts de faux diamants qui possèdent des humains comme animaux domestiques», a-t-il écrit après avoir visité la galerie peuplée de statues en miroir et de crânes de cristaux.

Quoi qu'en pense le critique du Guardian, les amateurs de David Altmejd n'ont rien d'amphibiens extraterrestres. Les 10 oeuvres présentées à la galerie Modern Art ont pratiquement toutes été vendues en quelques jours. Leurs prix? La galerie n'a pas voulu dévoiler cette information. Il y a un an, un des loups-garous géants d'Altmejd avait trouvé preneur pour 135 000$. Mais c'était avant la crise financière.

Arrivé à Londres une petite semaine avant le début de l'exposition, le jeune artiste montréalais - qui habite New York - ne s'est pas attardé dans la capitale britannique. Il est reparti pour l'Ontario cette fois. «Il est en train d'adapter le travail qu'il a fait à la Biennale de Venise pour la réouverture de l'Art Gallery of Ontario», précise Andrew Cannon.