Le Musée d'art contemporain de Montréal présente jusqu'au 8 février 2009 une exposition individuelle de l'artiste canadienne Lynne Marsh: trois installations vidéos où le corps anime l'espace, joue à l'architecte.

En préambule, le passage du spectateur active des projecteurs et un extrait de musique de générique de film. Lynne Marsh se fait son cinéma. Tout au long du parcours, elle le revisite à sa façon en pervertissant des techniques appartenant au mode narratif traditionnel pour en extraire une «fiction» expérimentale déroutante, mais d'autant plus intéressante.

 

D'apparence classique, la première projection - Ballroom (2004) montre une femme, Lynne Marsh, suspendue, tête en bas, au plafond d'une salle de bal. En tournant sur elle-même, son habit tout en miroir, jette un éclairage étoilé sur l'espace luxueux.

Cette ballerine dans son écrin à musique intrigue, puis séduit. Elle s'empare de notre regard au point où le spectateur sera tenté de s'approcher de l'écran pour saisir ce qui, inévitablement, continuera de lui échapper.

Dans Camera Opera (2008), c'est la musique qui est classique. Cette fois, la caméra bouge autour d'une animatrice télé pratiquement immobile. En cours de visionnement, toutefois, le spectateur comprend que ce seul et unique centre d'attention est comme un soleil impassible au sort des planètes tournoyant autour de lui.

Cet effet est décuplé par l'utilisation d'un ingénieux dispositif - deux écrans et quatre haut-parleurs - qui étourdi le spectateur en utilisant un montage de plus en plus hachuré et déjanté.

La troisième projection, Stadium (2008) montre un stade vide, celui des Jeux olympiques de 1936 à Berlin. Prenant à rebours la démarche esthétique de la grande mais controversée cinéaste du Reich, Leni Riefenstahl, Lynne Marsh crée un suspense qui n'en n'est pas un. Une femme vêtue de blanc, tel un fantôme du passé, apparaît dans cet espace gigantesque dont elle prend possession peu à peu.

Cette figure réconfortante change la dynamique froide, voire lugubre, du lieu pour accaparer notre regard. Elle exulte finalement en esquissant quelques gestes de danse. Une séance d'exorcisme réparatrice en quelque sorte!