Les sculptures de Valérie Blass, l'une des artistes les plus originales de sa génération, ne sont pas ce que vous croyez voir. Pas plus que la Parisian Laundry n'est une buanderie; elle est, en vérité, l'une des galeries les plus chics et branchées de Montréal.

En entrant dans l'édifice de l'ancienne buanderie industrielle, la Parisian Laundry, dans l'ouest de Montréal, on a l'impression d'avoir affaire à une exposition collective.

 

Les sculptures de Valérie Blass sont en effet tellement différentes les unes des autres qu'elles auraient pu être réalisées par plusieurs artistes. Or, c'est pourtant toujours du même propos qu'il s'agit. Comme si elle nous disait: «Ce que vous voyez n'est pas ce que vous croyez voir.»

La plus pure apparence, c'est le titre de l'exposition, rassemble une douzaine de pièces, souvent composées de plusieurs éléments, faites à partir des matériaux les plus divers: objets trouvés, bois, métal, porcelaine, plâtre, textile, pièces d'ameublement...

On croit voir, ici, un personnage assis, réfléchissant à la misère humaine; c'est en réalité un amas de fils de laine, une sorte de revêtement sous lequel il n'y a rien. Là, deux masses aux couleurs joyeuses et brillantes nous attirent; ce sont encore là des amas de porcelaines chinoises réduites en morceaux et recollées ensemble par du plâtre pour reprendre à peu près leurs formes originales de guerrier.

Valérie Blass faisait partie des artistes choisis par le Musée d'art contemporain pour sa première Triennale d'art québécois présentée cet été. Et l'une des oeuvres qu'elle y exposait, et qui est aussi à la Parisan Laundry, Deux assemblages crédibles à partir de mon environnement, exprime bien les intentions de cette artiste qui s'intéresse à ce que l'on voit ou ne voit pas, ou ne voulons pas voir, et à l'illusion (peut-être) de l'art.

Les assemblages crédibles sont composés de trois éléments: un socle fait de classeurs couchés sur lequel se trouve une masse formée d'objets hétéroclites, notamment de jouets, pris ensemble dans un amas de cuir et de plâtre. Cette masse tente de ressembler à la forme abstraite voisine, une sorte de cube étiré fait de morceaux tout propres de plancher flottant.

Les cubes d'Adrienne Spier

Au sous-sol de l'ancienne buanderie se trouve un espace immense auquel on accède par un couloir au plafond si bas que les gens de plus de 5 pieds et demi doivent courber le dos pour le traverser. C'est là qu'Adrienne Spier présente une série de 17 boîtes constituées d'une infinité de bouts de bois placés les uns sur les autres, ou les uns à côté des autres, de manière à former des cubes impeccables. Les morceaux sont déposés, ils ne sont pas collés. On se demande combien de temps il a fallu pour les reconstituer tous avec une telle perfection.

En lisant au mur l'affichette de cette installation intitulée Three Bedroom Flat, on découvre que ces boîtes sont faites en réalité de morceaux sciés de meubles qui occupaient un appartement de trois chambres où se trouvaient un cabinet, des tables de nuit, une bibliothèque, un banc de piano, un buffet, un bureau, etc. Comme si l'artiste avait mis son propre appartement en boîtes...

Si Valérie Blass et Adrienne Spier valent le déplacement à la Parisian Laundry, un peu éloignée du centre-ville et des autres galeries d'art, la galerie elle-même est un spectacle à voir.

La transformation de cet ancien édifice industriel en galerie d'art privée, à la fois chic et respectueuse des lieux, est une réussite.

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Valérie Blass, La plus pure apparence et Adrienne Spier, Three Bedroom Flat, à la Parisian Laundry, 3550, rue Saint-Antoine Ouest, jusqu'au 22 novembre. Du mardi au samedi, de midi à 17 h. Entrée libre. www.parisianlaundry.com