Le joker est un autre texte admirable de Larry Tremblay, quelque peu malmené par une mise en scène et une scénographie bancales.

Dans sa plus récente pièce, Larry Tremblay nous fait entendre la petite voix à l'intérieur de notre tête, celle qui nous contredit, nous contrarie ou nous questionne, tout simplement.

On peut l'appeler « la conscience », « l'âme » ou « l'intuition » ; le dramaturge préfère « le joker ». Elle est souvent drôle, cette voix ; elle se rit de nous, de nos travers, de nos faiblesses. Elle est en nous et partout à la fois. Peut-être divine, surtout machiavélique.

Sculptée par la main même de l'auteur qui tire les ficelles des quatre personnages loufoques sous l'emprise du joker : une suicidée pas morte, son mari-comptable-policier, leur fils poète raté et sa copine, maîtresse enceinte du fils et du père... ou du Saint-Esprit. Amen !

Mais la seule religion ici est celle de la télévision, des médias, des arts dits populaires et des zombies. Ces mutants robotiques sont, en fait, les autres. Réfugiés, immigrants, voisins... qui sait ?

Avec son humour particulier, Larry Tremblay nous parle de notre monde superficiel, obsédé par l'argent, les apparences et les différences. Un monde où la peur triomphe toujours des esprits faibles... au lendemain de l'élection américaine !

Éric Jean s'évertue cependant à en mettre plein la vue et les oreilles dans sa dernière mise en scène au Quat'Sous. De même, le scénographe Pierre-Etienne Locas, qui avait conçu un petit bijou de simplicité pour La délivrance de Jennifer Tremblay, subdivise inutilement l'espace scénique.

Comme si les deux hommes avaient voulu trouver à tout prix des échos visuels et sonores à un texte déjà baroque, surréel, qui n'avait pas besoin qu'on en rajoute.

Cette stratégie étourdit et dilue l'impact ainsi que les qualités métaphoriques et poétiques du texte. Très réussis, certains tableaux provoquent l'hilarité, tandis que d'autres tombent à plat. Trop, c'est comme...

Pascale Montpetit, en joker, est merveilleuse. Les deux autres comédiennes - Louise Cardinal et Marilyn Castonguay - jouent aussi dans le ton, mais le registre comique des Normand Daneau et André Robillard n'atteint pas le degré de folie exigé pour obtenir un jeu d'ensemble cohérent.

Enfin, si vous allez voir la pièce, asseyez-vous au balcon ou au fond de la salle. Sinon, le risque de torticolis s'allonge avec la durée du spectacle !

Texte de Larry Tremblay 

Mise en scène d'Éric Jean 

Au Quat'Sous jusqu'au 2 décembre

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