David Altmejd, artiste visuel de génie, et le chanteur Pierre Lapointe ont présenté, avec leur équipe multidisciplinaire, la première de leur Conte crépusculaire, mercredi soir, à la Galerie de l'UQAM: un spectacle diffus mais rempli de lumières.

Autant dire tout de suite que si la musique, le chant et les voix occupent une grande place dans cette performance de 40 minutes qui tient à la fois du théâtre et de l'opéra contemporain, l'installation du sculpteur montréalais David Altmejd en occupe le rôle principal.

C'est d'abord ce que les 125 spectateurs constatent en entrant dans la salle principale de la galerie de l'université. Altmejd a créé, sur un podium central, des îlots architecturaux reliés les uns aux autres, un lien qu'on ne saisit qu'au fur et à mesure que le conte se déploie.

Ces îlots sont constitués de structures en plexiglas où l'on distingue notamment des libellules aux ailes diaphanes reposant sur des sortes de pylones et des cristaux de type quartzique décorant l'ensemble du podium.

L'histoire, qui se déroule «dans un futur lointain», est celle d'un roi (Pierre Lapointe) qui va mourir et céder sa place au jeune prince (Sacha Jean-Claude) soutenu par la Reine mère (Émilie Laforest).

Conte crépusculaire débute par un solo aérien de Philippe Brault, le bassiste de Lapointe, mais pas à la basse: au tuyau de plexiglas frôlant un fil attaché au plafond et qui vibre grâce à une plaque tournante.

On est dans un monde contemporain voire futuriste et on va y rester avec le Quatuor Molinari qui interprète avec brio la musique de Yannick Plamondon et Pierre Lapointe.

La musique a même parfois des accents baroques lorsque s'y greffent les voix pures et de tessiture de soprano d'Émilie Laforest et du jeune Petit chanteur du Mont-Royal, l'excellent Sacha Jean-Claude.

Le prince intervient ensuite dans la structure créée par David Altmejd pour en extraire un elixir. On commence à comprendre alors à quelle fin l'artiste visuel a créé ces architectures transparentes et tous ces déversoirs, démontrant la qualité de sa maîtrise de l'espace et le génie de ses constructions.

Accroupi dans un coin, Pierre Lapointe se lève et se met à chanter la véracité de la prophétie: le roi se meurt.

La mise en scène plutôt statique est équilibrée par les mouvements des structures qu'actionne David Altmejd. La scène finale de la cérémonie du passage et de l'envol du roi vers d'autres cieux était la mieux rendue.

Le torse couvert de tatouages, Pierre Lapointe est enfermé dans une sorte de sarcophage qui se transforme sous nos yeux, devenant une sorte de cocon ailé grâce au déploiement de fils multicolores.

Pour bien apercevoir chaque intervention des acteurs de ce tableau en mouvement, le spectateur (qui est debout) a avantage à bouger dans la salle pour pouvoir changer d'angle de vision, profitant également des miroirs muraux qui offrent d'autres perspectives.

Si le spectacle n'est pas long, il met du temps à prendre une certaine intensité et la fin arrive trop vite. Chaque soirée étant unique, gageons que les prochaines représentations de Conte crépusculaire (à guichets fermés jusqu'à samedi) y gagneront en clarté et en densité.