Le monde des arts a récemment été secoué lorsque Industrie Canada a annoncé le non-renouvellement de subventions versées à certains événements culturels. Bonne occasion pour discuter du financement des arts. Ce que La Presse a fait cette semaine avec le président de l'Union des artistes, Raymond Legault.

Foi de Raymond Legault, la relativité d'Einstein n'est pas qu'une théorie de physique s'appliquant au mouvement des astres. Elle concerne aussi le financement des arts.

 

Dans ce domaine, des éléments tels la taille d'un événement, ses retombées et le marché visé devraient entrer en ligne de compte, dit-il. En conséquence, le président de l'Union des artistes (UDA) est encore éberlué par la décision d'Industrie Canada de limiter ses subventions à deux événements culturels par ville. Une décision qui s'est traduite par une coupe de 1,7 million dans le budget des FrancoFolies.

«Il est difficile de comprendre cette décision de ramener de tels critères, dit le président de l'UDA. Est-ce qu'on va comparer une plus petite ville à Montréal, à Québec ou à Sherbrooke en termes de nombre d'habitants et d'argent que cela génère?»

Ce critère «qui est arrivé comme un cheveu sur la soupe», poursuit M. Legault, remet en question toutes les structures financières instaurées au fil des ans pour les grands événements culturels. À ses yeux, la formule employée s'apparente à celle qui a conduit à la suppression de 45 millions de dollars dans les programmes fédéraux de soutien aux tournées à l'étranger.

«Ça ressemble à une logique comptable, dit-il. C'est comme si c'était mathématique. On voit que c'est un gouvernement (fédéral) qui sait additionner, soustraire et diviser. Mais il y a dans la vision qu'on développe des arts et de la culture plus qu'un calcul mathématique. Il y a aussi ce que j'appelle (l'effet) Einstein, c'est-à-dire la relativité des investissements et leur importance. (...) On ne peut pas gérer une vision en arts et en culture comme on gère un compte courant.»

M. Legault estime que la culture est de plus en plus synonyme de «business de l'entertainment» dans le ROC. «Du côté du Québec, il y a vraiment la vision de développer les arts et la culture où la valeur identitaire est extrêmement importante», constate-t-il.

Sceptique

Programmes fédéraux, programmes municipaux, bourses, financement des municipalités. Les dédales sont nombreux dans le monde du financement public des arts. Ne serait-il pas plus simple d'avoir un guichet public? Raymond Legault est très sceptique.

«Avant, il y avait une certaine cohérence entre ce qui se faisait au fédéral et au provincial, dit-il. Mais là, on se rend compte qu'il y a de plus en plus un fossé. (...) Le fédéral dépense son argent autour des grands événements qui vont générer du tourisme, qui ressemble vaguement à avoir du pain et des jeux. Alors qu'à Québec, il y a un souci de préparer la relève, de préserver et promouvoir une langue.»

Dans ce contexte, qui gérerait un guichet unique? Québec ou Ottawa? Pourrait-on vivre avec une seule façon de voir les choses? «Il faudrait qu'il y ait une cohésion entre la vision de Patrimoine Canada et celle du Québec, enchaîne M. Legault. Je ne pense pas que c'est parti pour s'arranger.»

Il donne l'exemple du premier film de Xavier Dolan, J'ai tué ma mère. Si le guichet unique avait été à Ottawa, il n'aurait pas eu un sou alors qu'il aurait peut-être bénéficié de plus d'argent qu'il n'en a reçu si ce guichet avait été à Québec.