L'adjoint à la culture du maire de Paris, Christophe Girard, participera lundi au colloque «Cultiver la ville» organisé par Culture Montréal à la Grande bibliothèque du Québec. Travaillant à mi-temps pour un empire français du luxe et de la mode, le créateur de Nuit blanche diffuse depuis 10 ans la culture sous toutes ses formes dans les quartiers de Paris. Mais la crise économique fait mal. Rien ne vaut une petite visite chez les cousins pour voir comment ils s'en sortent...

Semeur de la participation culturelle. Le sous-thème du colloque lui va comme un gant. Pour avoir semé, Christophe Girard a semé. Tellement, que ses idées dépassent les frontières. Notamment sa Nuit Blanche qu'il a lancée en 2002 à Paris et que Bruxelles, Rome et Montréal ont copiée.

Mais si Christophe Girard sait créer, il sait aussi écouter. Humble, il dit venir à Montréal aussi pour voir «comment on y vit la crise et comment les politiques publiques sont menées. Ça m'aide à réfléchir, à mieux faire et surtout ne pensons jamais qu'on est le centre du monde. C'est le pire des défauts», dit-il

Christophe Girard est proche du Québec et ouvert aux propositions. Il aura bientôt des conversations «un peu plus ouvertes que dans le passé avec le Cirque du soleil». Il a déjà eu l'idée d'un carnaval à Paris. Pourquoi pas avec le Cirque du soleil?

«Si, un jour, le Cirque du soleil vient à Paris en aidant et en respectant tous les cirques de création, les petits et les grands, qui sont à Paris et qui doivent rester à Paris, peut-être qu'avec le Cirque du soleil, on trouvera une idée ensemble parce qu'ils ont des moyens qui peuvent m'intéresser», explique-t-il.

Christophe Girard n'a pas toujours été en politique. Spécialiste des langues orientales, il était à l'université de Tokyo quand il a rencontré Yves Saint Laurent. Intégré dans la société de haute couture, il y est resté 22 ans. En 1999, il quitte YSL et se joint au groupe LVMH où il est aujourd'hui directeur de la stratégie mode à mi-temps.

Élu conseiller municipal de Paris en 2001, il se voit confier la culture par le maire Bertrand Delanoë. Depuis près de 10 ans, il cherche à la démocratiser. C'est avec ce souci qu'inspiré des Nuits blanches de Dostoïevski, il a créé Nuit blanche en 2002.

«Nuit Blanche permet de redécouvrir le détail de sa ville et de ce qu'elle a de plus insolite, et en même temps d'y voir la création contemporaine», dit-il.

Parmi les projets culturels qu'il a pilotés, il y a la restauration au coût de 29 millions d'euros de l'ex-cinéma Louxor, un bâtiment néo-égyptien qui deviendra le Centre d'art et d'essai Youssef Chahine.

Autre lieu prestigieux de la culture parisienne, le théâtre de la Gaieté lyrique, où Jacques Offenbach mit en scène La Belle Hélène et La Vie parisienne, deviendra à la fin de l'année un espace dédié aux cultures numériques et aux musiques actuelles.

Projets ardus

Mais tous les projets ne marchent pas en criant ciseaux: lancé en 2008, le CentQuatre, ancien bâtiment de pompes funèbres de 39 000 m2, était destiné à devenir un lieu incontournable de la culture. Mais l'aspect muséal n'a pas pris forme aussi vite que prévu. Les deux directeurs ont quitté le bateau, laissant un gros déficit.

Christophe Girard dit que le projet en est à ses balbutiements et que le lieu devra être plus multidisciplinaire.

Car Paris se serre la ceinture, comme partout. Les subventions à la culture sont passées de 97 millions d'euros en 2009 à 68 millions en 2010 et le budget global de la culture a baissé de 2 % (il représente 11 % du budget de Paris au lieu de 10,1 % à Montréal).

La ville doit donc faire des choix. «Il y a des conservatoires à créer, mais on étalera les dépenses. Et on demande à nos théâtres de faire un effort de 1,5 %.»

Christophe Girard veut enfin diffuser les premières des spectacles des quatre théâtres municipaux de Paris sur internet. Il voulait lancer ce projet inédit d'une «salle de théâtre immatérielle» en septembre. Mais ça prendra plus de temps que prévu. «D'ici la fin de mon mandat en 2014, j'espère, dit-il. On ne sortira pas de la crise en faisant moins, mais en étant créatif.»