Ils seront 13 dans un parking de la rue Ontario, pour livrer en une heure et des poussières un Coriolan version «compacte» de Shakespeare. Rebaptisée Caïus, cette aventure inusitée de théâtre de rue porte la signature du metteur en scène Fred Teyssier, qui dirigera Didier Lucien et sa bande dans une suite de combats chorégraphiés par Réal Bossé. Libéré des contraintes d'une salle, Shakespeare promet de nous en faire voir de toutes les couleurs.

«On joue pour le peuple, le monde de la rue. Les gens vont pouvoir nous crier n'importe quoi pendant le show. On ne sait pas ce qui peut arriver», concédait Didier Lucien, 48 heures avant la première de Caïus.

Le défi est évidemment titanesque : galvaniser l'attention des festivaliers de Juste pour rire, avec la poésie et les combats tragiques livrés par un guerrier romain plébiscité par son peuple puis sacrifié sur la place publique. «Pas besoin d'être dans l'intelligentsia théâtrale pour aimer Shakespeare. On a tous regardé Gladiator, tout le monde a vu des péplums», soutient le comédien.

À la poésie shakespearienne qui a été scindée et épurée de ses redites, la bande de Caïus a ajouté des projections sur grand écran, des canons qui crachent des tonneaux, des caméras ainsi que l'intervention d'un animateur de foule. Les acteurs vont quant à eux varier les niveaux de jeu dans leur interprétation des flamboyants personnages de Coriolan.

«Le personnage de Caïus est une girouette : tantôt il est libéral, tantôt il est pour le PQ. Il change d'allégeance constamment et sans problème, un peu comme les politiciens d'aujourd'hui», poursuit Lucien, qui pense que les comédiens festivaliers se reconnaîtront davantage moins dans les mots que dans les intentions des protagonistes. Pour accommoder les passants qui attraperont le spectacle à mi-chemin, les concepteurs de Caïus ont prévu un programme de la soirée qui fera la chronologie des scènes jouées.

«Il se peut qu'au milieu du show, des gens partent et d'autres arrivent, ce qui est inhabituel au théâtre», prévoit Didier Lucien, qui reconnaît que cette expérience diffère des habituels spectacles de rue. «Les pièces sont généralement plus courtes et conçues pour un petit public. Je pense que notre site peut accueillir jusqu'à 2000 personnes.»

Toujours est-il que Shakespeare à la tombée de la nuit, entre les immeubles du centre-ville, fera vivre aux festivaliers rieurs une soirée inusitée. «On voit les buildings et le ciel est là pour vrai. Comme on joue avec des micros, il est intéressant de chuchoter, d'essayer des affaires. Le show va évoluer au fur et à mesure. Il faudra être à l'écoute des spectateurs.»

Après Shakespeare au parc, Shakespeare goûte au bitume...

Caïus, mise en scène de Fred Teyssier, tous les soirs, 21h30, jusqu'au 20 juillet au parking Ontario-Est.