Pour Roche papier ciseaux, son premier long métrage, Yan Lanouette Turgeon n'a pas choisi la facilité. Six ans de travail, trois histoires de gars, deux lieux (Montréal et la Baie-James), une avalanche de personnages dont certains d'outre-Atlantique et un horaire serré de 26 jours de plateau.

Décourageant? Pas du tout! Lundi soir, au cours d'une rencontre médiatique très courue, une bonne partie des artisans, dont les comédiens Roy Dupuis, Samian, Fanny Mallette et Frédéric Chau, affichaient bonne mine et ont évoqué avec une affection évidente les personnages qu'ils défendent.

Yan Lanouette Turgeon, qui compte plusieurs courts métrages à son actif, tourne avec un mélange de sérénité et de bonheur. «On a connu une longue période d'attente entre le moment où le projet a été lancé et le tournage. Donc, lorsque nous avons obtenu notre financement en mai 2011, ç'a été pour moi une grande libération, assure le réalisateur. En tournage, c'est du pur plaisir tous les jours. Tourner, c'est comme un voyage, comme un cirque qui débarque en ville, créant une ambiance particulière.»

Scénarisé par André Gulluni et Yan Lanouette Turgeon, Roche papier ciseaux se penche sur le destin de trois hommes qui ont chacun leur histoire, mais sont tous liés à un chef mafieux (Chau). Il y a Vincent (Roy Dupuis), médecin radié, Lorenzo (Remo Girone), vieil Italien cherchant à exaucer le dernier voeu de sa femme mourante, et Boucane (Samian), jeune autochtone qui a quitté sa réserve. Au fil du récit, chacun essaie de s'en sortir.

«Vincent est un médecin qui a commis plusieurs gaffes. Il est pris à la gorge et se retrouve à faire des choses discutables, explique Roy Dupuis. Vincent n'est pas un mauvais gars, mais pour survivre, il va faire des gestes avec lesquels il ne sera pas bien. Or, ce médecin bien ordinaire a la chance d'être amoureux. Que sa femme soit enceinte le pousse à essayer de s'en sortir.»

Sa femme, c'est Clara (Fanny Mallette), qui fait ressortir le bon côté de Vincent. «Clara est serveuse dans un diner. Elle est enceinte de son premier enfant, ce qui place le couple sur un fil de fer, expose Fanny Mallette. Elle est lumineuse, amoureuse. Et aussi inquiète. Car lorsque l'on tombe enceinte, le conjoint prend une tout autre dimension. L'insouciance disparaît», affirme avec conviction cette mère de trois enfants.

Le film comporte quelques baptêmes. Ainsi, Samian, rappeur autochtone qui a participé au projet Wapikoni Mobile il y a quelques années, interprète son tout premier rôle. Sur le plateau, il est émerveillé comme un enfant.

«Mon personnage de Boucane est un autochtone qui part du Nord pour aller refaire sa vie à Montréal. En chemin, il rencontre Norm (Roger Léger) et se rend compte que ce gars-là n'est pas si net qu'il en a l'air, dit le jeune chanteur de 29 ans qui, pour son rôle, a perdu 30 livres. Au fond, Boucane me ressemble et ressemble à plusieurs autochtones qui veulent repartir leur vie à Montréal. Ce n'est pas toujours facile. Tout est neuf. Tout est à refaire. Ils éprouvent des difficultés et ont besoin d'encadrement.»

En dépit d'une longue carrière, Marie-Hélène Thibault participe également à son premier long métrage. Son personnage de Beverley est une serveuse sexy dans un relais routier sur la route du Nord. «Je me suis sentie assez libre dans la composition du personnage, entre autres avec la complicité des gens de la coiffure, des costumes et du maquillage, dit-elle. J'ai eu trois jours de tournage et ce fut très le fun. Il y a de bonnes lignes d'écriture. C'est savoureux.»