Très satisfait de l'expérience de son premier long métrage, Jaloux, réalisé avec un budget minimaliste, Patrick Demers se lance dans un second projet de film. Après la jalousie, il explorera l'hypocrisie.

«La réponse est allée au-delà de mes attentes, dit Patrick Demers à propos de son premier film sorti plus tôt cette année. Au départ, je l'ai fait pour moi, parce que ça faisait tellement d'années que je voulais faire un long métrage. Je suis parti de rien et j'ai coché toutes les cases. Que demander de plus?»

Réalisé avec un budget de 85 000$, Jaloux a été sélectionné l'an dernier en compétition officielle au festival de Karlovy Vary, en République tchèque, ce qui a permis à l'équipe de faire gonfler la copie originale en 35 mm grâce à une subvention de la SODEC. Le film a par la suite été sélectionné au prestigieux Festival international du film de Toronto (TIFF) avant de prendre l'affiche au début de l'année au Québec.

En comptant le gonflement de la copie et un minimum de promotion, le budget total est de 400 000$. «Pour tourner le film, il n'y avait pas d'argent public, rappelle Demers. Ça me donnait une entière liberté de création. Mais ni moi, ni le producteur, nous sommes versé un salaire. Les comédiens et les techniciens ont accepté de travailler à 50% du cachet de base. Tout le monde y croyait.»

En quatre semaines au box-office québécois, Jaloux a récolté près de 75 000$, un score plus qu'honorable compte tenu des sommes investis, de la quasi-absence de publicité et du petit nombre de salles où il fut distribué. «Nous aurions encore fait mieux si le temps n'avait pas été si beau durant le second week-end. Et nous aurions fait mieux si nous étions passés à Tout le monde en parle», dit le réalisateur.

Depuis, le film a été acheté par Radio-Canada, Super Écran et la télé israélienne. Il sera présenté en août au Sydney Canadian Film Festival en Australie. Le DVD sera en magasin à l'automne.

Mettant en vedette Benoit Gouin, Maxime Denommée et Sophie Cadieux, Jaloux explorait ce sentiment humain à travers un intrigant triangle amoureux formé d'un couple ayant loué un chalet pour un week-end de la dernière chance et un voisin au passé trouble et à la présence envahissante. La réaction médiatique a été très bonne et le bouche à oreille a visiblement fonctionné au sein du public.

Explorer le couple

Candidat à la Course Destination-monde, édition 1992-1993, Patrick Demers a maintenant deux courts métrages et un long métrage dans sa besace. Une constante chez lui: il explore le couple. «Ce sera aussi le cas avec mon prochain film, mais j'espère qu'après cela, je passerai à autre chose, dit-il.»

Cette fois, il veut fouiller la thématique de l'hypocrisie. «Je crois que nous sommes tous un peu hypocrites alors qu'on fait semblant de ne pas l'être, dit le réalisateur. Mon film mettra en scène deux couples: l'un d'eux existe depuis quelque temps, l'autre est nouveau. Dans les deux cas, leurs relations seront mises à l'épreuve.»

Pour ce nouveau projet, il travaille de concert avec Benoit Gouin et Marie-France Lambert, qui étaient de la distribution de Jaloux ainsi que Maxim Gaudette (Polytechnique, Incendies) et Évelyne Brochu (Frissons des Collines, Café de Flore). Une demande de subvention à l'écriture (scénarisation) a été déposée à la SODEC.

Au cinéma, Demers est d'abord attiré par les thématiques, davantage que par l'histoire ou les personnages. «La caisse de résonance d'un film, c'est la thématique, dit-il en nommant les Kubrick, Lynch, Polanski ou Kieslowski parmi les cinéastes qu'il affectionne. Dans cette optique, j'aime explorer les tabous, une chose plus facile à aborder au cinéma.»

Comme dans son premier film, Patrick Demers souhaite que les comédiens fassent partie intégrante du projet et soient engagés dans l'écriture. Mais cet effort doit être posé davantage en amont du tournage. «En filmant Jaloux, nous sommes trop restés dans le narratif, dit-il. Cela nous a empêchés de pousser la psychologie des personnages. Le spectateur devait faire ce travail. La prochaine fois, j'aimerais, au moment de commencer la production, que les comédiens puissent se concentrer sur leur personnage. Moi, je me concentrerai sur l'histoire.»