Depuis quatre ans, CargoM récolte des données sur le transport par camion à Montréal pour améliorer la fluidité des déplacements. Et ça marche. Après avoir réduit les temps d'arrêt près du port de Montréal, la grappe métropolitaine de transport et logistique veut maintenant s'attaquer notamment à l'est et à l'ouest de la ville.

LE PROBLÈME

La fluidité du transport par camion est d'une importance cruciale pour la performance et la compétitivité de la plaque tournante logistique du Grand Montréal.

Avant 2013, le secteur du transport routier de marchandises souffrait toutefois d'un manque de données pour trouver le moyen d'améliorer ses façons de faire et de mieux planifier les déplacements. Il était même en retard sur le secteur du transport collectif, qui a accès aux données de nombreuses enquêtes origine-destination, qui visent à connaître les habitudes et les choix de déplacement des citoyens.

La solution était de passer à la vitesse supérieure et de mettre sur pied un projet pour rattraper le retard.

LE PROJET

En 2013, Transports Canada a prêté 100 enregistreurs de données Ottoview à CargoM pour analyser des problèmes de transport. Ce sont des boîtiers électroniques qui s'installent sur des véhicules lourds et qui recueillent en continu des informations sur le positionnement GPS de ceux-ci et sur l'unité de commande moteur.

Le but du projet ? Étudier la question des entrées et sorties de camions au port de Montréal via la rue Notre-Dame.

« Il y a 2500 camions qui entrent et qui sortent du port tous les jours. Il faut donc s'assurer que la circulation soit fluide », dit Mathieu Charbonneau, directeur général de CargoM.

LA SOLUTION

Les feux de circulation rue Notre-Dame, la seule qui permet d'accéder au port, sont synchronisés de sorte à maximiser la fluidité de la circulation en voiture. Depuis plusieurs années, toutefois, l'industrie du transport demandait à la Ville de modifier les cycles des feux lors des périodes hors pointe pour que les camions puissent facilement entrer au port et en sortir.

« Bien sûr, sans données neutres, la Ville était réticente », remarque Mathieu Charbonneau.

Grâce aux données récoltées, CargoM a réussi à convaincre les décideurs du bien-fondé d'allonger les cycles des feux de quelques secondes.

LES RÉSULTATS

L'allongement des cycles des feux de circulation sur Notre-Dame a permis d'améliorer la fluidité de la circulation dans le secteur du port. Un cycle qui voyait auparavant un seul camion entrer au port ou en sortir permet aujourd'hui plutôt à trois ou même quatre camions d'y accéder ou d'en sortir.

Le changement a également entraîné une diminution des émissions de gaz à effet de serre (GES) en réduisant les temps de marche au ralenti des camions.

En 2014, CargoM a finalement acheté ses propres boîtiers Ottoview pour pousser plus loin ses analyses.

EN COLLABORATION

Pour réaliser ses études, CargoM a décidé de collaborer avec le Centre interuniversitaire de recherche sur les réseaux d'entreprise, la logistique et le transport (CIRRELT), un des plus grands centres de recherche en logistique au monde. Ce partenariat a permis de résoudre le problème de confidentialité.

« Le boîtier enregistre tout ce que fait un camion, alors c'était difficile de trouver des entreprises de camionnage qui accepteraient d'installer nos boîtiers sur leurs véhicules. En passant par le CIRRELT, qui est le seul à voir la donnée brute, on allège les craintes », dit Mathieu Charbonneau.

L'AVENIR

Actuellement, CargoM analyse le transport à l'est de l'autoroute 25. La grappe réfléchit entre autres au fait de proposer de laisser certains camionneurs, par exemple ceux qui pratiquent l'écoconduite, utiliser des corridors pour autobus hors des heures de pointe, ce qui se fait déjà aux États-Unis.

Par la suite, la grappe aimerait étudier la circulation dans l'ouest de Montréal, près de l'aéroport. « Sans données, on se fie aux mythes, dit Mathieu Charbonneau. Chaque relevé de données prend de deux à trois semaines, et on en fait deux ou trois durant l'année. Le premier a été réalisé à l'hiver 2016, le second est en cours, et le troisième se fera à la fin de l'été. »

Photo André Pichette, La Presse

Les boîtiers Ottoview de CargoM sont installés sur plusieurs camions de différentes sociétés de transport routier, notamment ceux du Groupe Lafrance, et permettent de récolter des données pour étudier des problèmes liées au transport routier.