Marc-Antoine Lasnier, cidriculteur et maître de chais, se considère chanceux. Sans pour autant lui offrir sur un plateau d'argent l'entreprise qu'ils ont fondée, ses parents lui ont facilité la vie. Avec leur comptable, les Lasnier ont choisi un gel des actions afin que leur fils participe à la plus-value de la PME. Aujourd'hui, l'avenir de Les Vergers de la Colline, PME située à Sainte-Cécile-de-Milton, près de Granby, est assuré.

Le gel successoral est une méthode de planification fiscale assez commune dans les cas de transferts familiaux. Il permet, à un moment donné, de fixer la valeur des actions d'une entreprise incorporée en transférant la plus-value future des actions aux successeurs choisis.

Bref, il permet de transférer aux personnes choisies (enfants, petits-enfants, employés-clés) la plus-value future des actions de l'entreprise et ainsi reporter l'impôt correspondant. Le gel successoral peut être total ou partiel. Il repose essentiellement sur un jeu de rachat d'actions.

L'enfant qui n'a pas nécessairement beaucoup d'argent devant lui a besoin, dans ce cas-ci, d'une plus petite mise de fonds pour racheter les actions du cédant. Et la personne qui vend ses actions est imposée dans une moindre mesure. Elle n'aura toutefois pas droit à l'exonération en gain de capital de 750 000$.

Chez les Lasnier, on en est au deuxième gel des actions. Le premier a eu lieu il y a trois ans lorsqu'il a été décidé que Marc-Antoine serait le successeur de son père Michel et de sa mère Josée. Du coup, le jeune homme a acheté 25% des actions de l'entreprise. Le second gel a eu lieu l'automne dernier, au moment où Josée a décidé qu'elle se départirait de ses actions. Cette opération s'est effectuée ces jours-ci, faisant grimper la participation de Marc-Antoine à 33%.

Pour chacun des gels, la famille de pomiculteurs a défrayé des honoraires de comptable d'environ 3000$. Le prochain gel aura vraisemblablement lieu lorsque Michel se départira de ses actions (partiellement ou en totalité).

Superficie quintuplée

Marc-Antoine Lasnier, 33 ans, a obtenu ses actions à un prix relativement modeste. Et il en remercie ses parents. Plus il participera à la croissance de l'entreprise, plus ses actions prendront de la valeur. Ce qui est d'ores et déjà le cas, car Les Vergers de la Colline a plus que quintuplé la superficie de ses installations (nouveau bistro, plus grande capacité de production de cidre, etc.). Un investissement de deux millions complété en 2011.

Mais, proportionnellement, si les actions du repreneur prennent de la valeur, l'entreprise aussi. Bref, le jeune cidriculteur aura un plus gros montant à débourser au moment de racheter les actions de son père. «Je n'aurai probablement pas les 20% nécessaires pour la mise de fonds. Et dans un cas comme celui-là, à peu près personne ne voudra me prêter de l'argent», dit Marc-Antoine Lasnier.

Heureusement pour lui, son paternel devrait agir à titre de «vendeur-prêteur». Bref, le cédant devient en quelque sorte le bailleur de fonds du repreneur. Et le risque encouru par Michel Lasnier (pas lui personnellement, mais l'entreprise dont il est majoritaire) est relativement inexistant: la Financière agricole garantira son argent par le biais d'un programme, pour lequel la PME devra se qualifier. M. Lasnier laissera son argent dans l'entreprise, mais celui-ci sera protégé par la Financière.

Les Vergers de la Colline est un immense domaine de 125 acres (parmi les 10 grands du Québec) en bordure de la route 137 entre Granby et Saint-Hyacinthe. L'endroit est réputé pour son autocueillette, mais également pour sa boutique. Mais c'est surtout grâce à sa douzaine de produits liquides (alcoolisés ou non) que la PME est dorénavant connue un peu partout au Québec.