Les aventures financières de trois superhéros. Un ton léger mais un fond sérieux, avec de véritables planificateurs... Cette semaine : l'Homme-arachnide.

Tisser patiemment son épargne

QUELQUE PART À MONTRÉAL... 

Au petit matin, l'Homme-arachnide revient à la maison, à la fin d'une dure nuit de travail.

Il a fait des heures supplémentaires : quatre malfrats, un maire, trois crapules, plus deux bambins sauvés des flammes.

Je suis complètement brûlé. Je ne tiendrai pas ce rythme jusqu'à 65 ans. »

Le superhéros vit en appartement avec sa vieille tante. Veuve, noir vêtue, elle a perdu son mari il y a trois ans.

FICHE SIGNALÉTIQUE

Nom : Pierre Parcoeur

Âge : 25 ans

Identité secrète : l'Homme-arachnide

Caractère : esprit cartésien, réfléchi, patient. Prend des risques calculés.

Emploi : pupitreur web au journal The Galette

Régime de retraite : aucun

Habite en appartement

Fréquente (assidûment) son amie d'enfance, Ariane Mygale

Projets : enfants, maison, mariage (pas nécessairement dans cet ordre)

Il se sert son petit-déjeuner habituel : une rôtie tartinée de beurre d'arachnide.

Zap !

« Fichtre ! Chaque matin, c'est la même chose ! »

En heurtant le rebord de la table, son poignet a déclenché son lance-toile, qui a fixé sa tasse de café sur le meuble.

Pierre Parcoeur - car c'est bien lui - retire l'espèce de pyjama à pattes qui lui sert de costume, puis enfile ses vêtements civils.

Il doit se rendre au travail, au quotidien The Galette. Pupitreur, il est chargé de déposer les articles sur la Toile.

Mais est-ce la fatigue de ses activités nocturnes ? La récurrente privation de café matinal ? Pour la première fois, le jeune homme prend pleinement conscience que The Galette, qui s'amincit de jour en jour avec la crise des médias, n'offre aucun régime de retraite.

IL APPELLE UN PLANIFICATEUR FINANCIER QUE LUI A RECOMMANDÉ UN MEMBRE DE SON CLUB D'ENTOLOMOGISTES AMATEURS.

« Je ne sais pas où je m'en vais, avec mes finances, lance l'Homme-arachnide. J'ai besoin d'un fil conducteur.

 -  Envoyez-moi vos données financières :  revenu, budget, épargnes... »

PIERRE PARCOEUR, REVENUS ET DÉPENSES

Salaire : 52 000 $

Revenu net : 35 780 $

Coût de vie : 32 460 $

Épargne : 2500 $ en CELI

Principales dépenses

Loyer : 850 $/mois

Prêt auto : 350 $/mois

Essence et entretien auto : 2900 $/année

Télécommunications : 150 $/mois

Alimentation : 7800 $/année

La poursuite (des objectifs)

TROIS JOURS PLUS TARD

De bon matin, l'Homme-arachnide s'est présenté au bureau du planificateur financier Jean-Nagual Taillefer pour une consultation.

« Excusez-moi, j'arrive directement du travail et je n'ai pas eu le temps de me changer. »

« Tissez-vous des projets d'avenir ? »

Dans deux ans, tout au plus, Pierre Parcoeur prévoit s'acheter un petit nid avec sa fiancée Ariane Mygale, originaire de Thard-en-Tulle, en Bourgogne. Ariane et l'Homme-arachnide ont noué une relation et veulent se marier. Les enfants suivront, prévoient-ils.

Pour préparer leur cocon, l'Homme-arachnide devra accélérer l'épargne.

« Avec votre revenu net de 35 800 $ et votre coût de vie d'environ 32 300 $, il y a un écart d'environ 3300 $ par année, que vous pouvez épargner, constate Jean-Nagual Taillefer.

 - Rappelez-vous la cigale et la fourmi...

 - Miam ! »

Le célibataire

Mais le jeune homme se préoccupe aussi de sa retraite. Que faut-il prioriser ? REER ou CELI ?

« Si le taux d'imposition est moindre au moment du retrait, vous avez avantage à verser au REER, observe le planificateur.

« Ceci dit, vous avez 25 ans, vous êtes jeune. À votre âge, les projets sont changeants, et les priorités évoluent. Moi, j'accorderais un avantage au CELI, parce qu'il a plus de flexibilité au niveau du retrait des sommes. »

La cotisation au CELI ne procure pas de déductions fiscales, mais les retraits ne sont pas imposables. « Et si vous faites des retraits, vous pouvez récupérer ces droits de cotisation là. Alors que dans un REER, il n'y a pas de récupération des droits de cotisation pour les sommes retirées. »

 - Pas trop vite, j'ai perdu le fil.

 - Pour l'achat d'une maison, pour un mariage, pour l'achat d'une voiture ou tout autre projet, le CELI sera beaucoup plus accessible pour vous.

 - J'ai compris ! », s'enthousiasme le superhéros, en tapant du poing sur le bureau du planificateur.

Zap !

« Oups, pardonnez-moi ! »

Il vient de couvrir de toile la lampe de bureau.

Jean-Nagual Taillefer, du Groupe financier Praxis.

LE PRÊT FANTÔME

L'achat de la maison s'effectuera en commun avec son amie Ariane.

Mais à raison de 3300 $ d'épargne par année, sa part de la mise de fonds sera longue à réunir.

« Vous pouvez toujours prendre l'argent dans le CELI, le retirer et cotiser au REER, avance le planificateur. Vous pouvez ensuite profiter du programme du Régime d'accession à la propriété (RAP) pour obtenir ce qu'on appelle la déduction subventionnée.

 - Bien pensé, excellente déduction, Monsieur Taillefer !

La somme doit séjourner dans le REER au moins 90 jours avant le retrait RAP.

Avec le RAP, Pierre Parcoeur pourrait retirer jusqu'à 25 000 $ de son REER pour l'achat d'une première propriété, sans que cette somme soit ajoutée à ses revenus de l'année.

« Deux ans après le retrait, vous devez commencer à rembourser au REER le montant qui en a été retiré, sur une période de 15 ans », dit Jean-Nagual Taillefer.

Si le REER ne contient pas 25 000 $, il est possible d'emprunter la somme manquante pour la verser en cotisation au REER.

Le prêt sera remboursé aussitôt que les 25 000 $ sont retirés du REER avec un RAP.

« Parce que le prêt disparaît aussitôt, on l'appelle le prêt REER fantôme.

- Non, moi, je ne suis pas le Fantôme, je suis l'Homme-arachnide.

- Vous obtenez à ce moment-là une pleine déduction pour ces 25 000 $, et pour faire le remboursement, vous n'aurez qu'à cotiser à votre REER pendant 15 ans, poursuit le planificateur, sans se décontenancer. C'est comme si le gouvernement vous avait prêté la déduction fiscale immédiatement, que vous aurez à rembourser sans intérêt au fil des 17 années suivantes. »

Le cellulaire de l'Homme-arachnide résonne. Un vol de banque à Laval. Faute de gratte-ciel pour s'accrocher, il devra s'y rendre en métro.

« Il faut que je file, dit l'araignée.

 - Donnez-moi un coup de fil. »

Fil d'arrivée

LE FILET DE SÉCURITÉ

Exceptionnellement, le planificateur accepte de rencontrer le superhéros sur son lieu de travail, sur la paroi d'un édifice vitré.

« Votre filet de sécurité me semble largement insuffisant.

 - Pourtant, mes toiles résistent à une charge de 2 tonnes.

 - Je parle de votre filet de sécurité budgétaire. Habituellement, on recommande une réserve d'environ trois mois de coût de vie. »

Pour Pierre Parcoeur, trois mois de dépenses représentent environ 8100 $. Il ne détient que 2500 $ en CELI. « Il y a un écart important que vous pourriez combler temporairement avec une marge de crédit, évoque Jean-Nagual Taillefer. Mais ultimement, on recommande d'y aller avec l'épargne.

« On ne prend pas un filet de sécurité - un fonds d'urgence, comme on l'appelle - via un REER, poursuit-il. Dans cette optique, je recommande le CELI. »

Retour au bureau

Ils ont convenu d'un deuxième rendez-vous au bureau de Jean-Nagual Taillefer.

« Il faudra établir votre profil d'investisseur, explique-t-il à l'homme-arachnide, suspendu à ses lèvres.

« Vous êtes jeune, vous avez un emploi stable, souligne le planificateur. Si on cotisait dans votre REER dans une optique de retraite, vous pourriez choisir un profil dynamique ou audacieux.

« Sur un horizon à long terme, vous pouvez tolérer un risque élevé, parce que ce n'est pas le rendement dans deux ou trois ans qui nous importe, mais le résultat dans une trentaine d'années. Les variations entre les deux, on s'en balance un peu.

 - J'ai l'habitude de me balancer.

- À court terme, par contre, en fonction de votre objectif d'achat de maison, il va falloir que vous soyez plus conservateur », poursuit Taillefer, imperturbable.

Pour l'instant, la Bourse va bien, mais ça pourrait changer. Est-ce que vous pourriez vous permettre de subir une perte de 25 ou 30 % sur votre capital au moment où vous en aurez besoin ?

« Ce serait une erreur capitale.

- Dans la situation actuelle, j'irais peut-être avec un compte à intérêt élevé ou l'équivalent, liquidable à n'importe quel moment, très facilement accessible. Si on a un horizon de plus d'un an, on peut prendre un peu de risques, par exemple un portefeuille conservateur avec 15 à 25 % d'actions.

 - Un super-héros est un homme d'action, approuve l'Homme-arachnide. »

LES OEUFS

« Où devrais-je déposer mes oeufs ?, demande l'Homme-arachnide.

- Tout ce qui est disponible est à votre portée, répond Jean-Nagual Taillefer. Ultimement, on pourrait composer un portefeuille de fonds négociés en Bourse. L'avantage, c'est que les frais sont inférieurs sur le long terme. Par contre, ça peut occasionner des frais importants sur de petits portefeuilles : ça se transige comme des actions, et on paie à l'achat et à la vente. Il y a des frais de transaction. »

Pour l'instant, l'Homme-arachnide épargne à petits coups, et prévoit faire des retraits à court et à moyen terme.

« Une solution probablement plus intéressante et accessible pour vous dans l'immédiat serait les fonds communs, où il n'y a généralement pas de frais transactionnels. »

Une vigoureuse poignée de main scelle l'entretien.

Zap !

 - Ah zut, excusez-moi !

FIN

Merci au planificateur Jean-Nagual Taillefer, du Groupe financier Praxis, de s'être prêté au jeu.