Il y a trois mois, Mehdi Bousaidan a rencontré un conseiller financier pour la première fois.

« Il y avait urgence. Ma gérante m'a dit : "Regarde, voici le montant que tu vas gagner cette année, voici le montant que tu vas payer en impôt." »

- Ah non, pas deux fois ! s'est dit l'humoriste de 24 ans.

Car lors de la précédente saison des impôts, après que sa carrière eut commencé à porter ses fruits, la récolte a été largement partagée avec le fisc.

« J'ai été surpris. Jusqu'à tout récemment, je recevais de l'argent de l'impôt. Un petit 200 $ ou 300 $. Alors je me disais : ça doit être à peu près les mêmes montants à l'inverse. »

Hé non.

« Combien ? Il faut que je fasse un chèque de 30 000 $ ? Vous êtes malade ? »

Pour ne pas s'y faire prendre une deuxième fois, il lui fallait rencontrer un conseiller dans son antre.

L'horreur.

« Ça fait peur, le mot conseiller financier. Le mot REER me faisait peur. Pour moi, c'était associé à Liberté 55, et à "aucun représentant ne viendra chez vous". » - Mehdi Bousaidan

Il en est sorti vivant.

« Je l'ai trouvé très le fun. J'étais content de rencontrer quelqu'un qui était aussi passionné par son travail que moi. »

Il lui a parlé de CELI et courbe d'investissement, de REER, de risque et de rendement. Presque de la poésie.

« Ce qu'il m'a fait comprendre, c'est que ce qui fait de l'argent, c'est le temps. Il m'a dit : tu as du temps ! Tu as la possibilité d'investir à long terme. »

DETTE DE RECONNAISSANCE

L'homme lui a demandé combien il gagnait par année et combien il avait de dettes.

- Aucune.

- O.K., alors tu fais de l'argent, tu es correct.

Même durant ses années de vaches maigres, il n'a jamais été endetté au-delà de la limite de 500 $ sur sa carte de crédit. « Au début, ç'a été vraiment dur. Il y a toujours l'option de manger du beurre de pinottes, mais moi, je ne l'avais pas, le beurre de pinottes. C'était juste du pain. »

Si Mehdi Bousaidan n'a pas accumulé de dettes d'études, il sait devoir en remercier ses parents.

Il est né en Algérie en 1991. À leur arrivée au Canada, ses parents ont trimé pour rebâtir leur vie. « Ils ont investi dans leurs [trois] enfants. Ils m'ont offert une éducation. »

Non seulement l'ont-ils appuyé dans ses études à l'École nationale de l'humour, mais ils ont aussi payé ses frais de scolarité.

« On parle de 14 000 $ pour deux ans. Ils ont fait énormément de sacrifices et c'est la culture financière dans laquelle j'ai été élevé. Faire des sacrifices et utiliser l'argent pour ses enfants. »  - Mehdi Bousaidan

C'est sa seule véritable créance : la dette de sa reconnaissance, plutôt qu'une reconnaissance de dette. « Jamais ils n'ont demandé quelque chose en retour. »

UNE VOITURE, MAIS PAS DE PERMIS

Mehdi Bousaidan ne veut pas acheter de propriété, car il préfère « investir dans des projets plus personnels ». Il habite un logement à prix aussi raisonnable que lui, dans Hochelaga-Maisonneuve, avec sa copine. Elle est comptable - ça ne s'invente pas. « Ça n'a pas été le premier critère pour lequel j'ai commencé à sortir avec elle, mais c'est devenu le critère principal pour lequel je suis resté avec elle », ironise-t-il.

Sa vision du transport est tout aussi indépendante. Il possède une voiture pour ses déplacements en région, mais n'a pas de permis de conduire. Pour une rémunération de principe, des amis font le voyage avec lui.

Il y a une logique. « Je ne veux pas prendre mon permis, parce que je sais que je vais me ruiner dans ça. Je me connais bien. Je vais accumuler les contraventions par impatience. »

CES ENFANTS QUI N'EXISTENT PAS ENCORE

Sa rencontre avec son conseiller financier lui a fait mesurer ses valeurs, celles qu'il tient de ses parents.

« C'est ça, la prise de conscience que j'ai eue en lui parlant : et mes enfants ? Ils n'existent pas encore. Mais quand ils existeront, je veux qu'ils aient accès à tout. Je veux leur donner les moyens de réussir. Et pour ça, il faut mettre de l'argent de côté. »

Mehdi Bousaidan en bref

• 24 ans

• Diplômé de l'École nationale de l'humour en 2013

• Improvisateur émérite et scénariste

• Premier spectacle d'une heure en 2014, dans le cadre du Zoofest

• Depuis janvier 2015, personnage principal de la série Med sur VRAK