L'entreprise a les moyens de soutenir sa croissance en prenant soin de son recrutement, de sa formation et de sa rémunération indirecte aux employés. Nous vous présentons trois moyens pour y arriver.

Un conseiller, oui, mais à partir de quand? Passée de 24 à 32 employés en un an, GG Telecom n'a pas encore embauché de spécialiste en ressources humaines, mais ses dirigeants y songent. Cette entreprise de Victoriaville exporte des détecteurs de mouvement dans plus de trente pays.

Les deux frères fondateurs, Sébastien et Yan Gagnon, ont délégué le recrutement à leur bras droit, chargé également de l'inventaire et de l'approvisionnement.

«Je n'étais plus capable de travailler 20 heures sur 24!», s'exclame Sébastien Gagnon, le vice-président.

La croissance de l'entreprise pourrait conduire au recrutement d'un gestionnaire à temps plein. «Si jamais le nombre d'employés continue de croître ainsi, nous n'aurons probablement d'autre choix que d'engager une personne strictement pour les ressources humaines», prévoit Sébastien Gagnon.

L'Ordre des conseillers en ressources humaines agréés (ORHRI) reçoit régulièrement des appels d'entrepreneurs qui ne veulent plus passer leur temps à chercher de nouveaux employés.

«La PME, c'est souvent un entrepreneur qui a une idée et qui commence avec une personne pour l'aider, puis une deuxième, une troisième, et on grandit comme ça», explique Florent Francoeur, le pdg de l'ORHRI.

«L'entreprise recrute quelqu'un en ressources humaines quand le gestionnaire principal réalise qu'il ne passe plus son temps à faire grandir son entreprise, mais à gérer les ressources humaines», observe-t-il. Ce seuil critique est atteint quand l'entreprise compte 75 à 80 employés dans le secteur manufacturier, estime M. Francoeur. Mais il s'abaisse à 50 salariés lorsque les compétences sont spécialisées.

Garder ses employés grâce à la rémunération indirecte

Un système flexible d'avantages sociaux permet de retenir davantage les salariés plutôt qu'une augmentation de salaire ponctuelle. «Un employé ne partira pas pour gagner 5% de plus», affirme Denis Chênevert, professeur à HEC Montréal, spécialiste de la gestion de la rémunération.

«Surtout s'il voit qu'il profite de choses qu'il n'aurait pas ailleurs», ajoute-t-il.

C'est pour cela que les régimes cafétéria deviennent populaires. Ces programmes flexibles de rémunération permettent à l'employé de sélectionner des prestations parmi tout un éventail.

L'entreprise peut offrir une variété de services tels que des jours de congé, une assurance salaire, des assurances liées à la santé, des soins dentaires ou paramédicaux.

«Tous les deux ou trois ans, l'employé est appelé à choisir ses avantages dans un budget donné», explique M. Chênevert.

En effectuant un choix, l'employé se rend compte qu'il ne peut pas tout avoir. «Il voit ainsi le lien entre le coût et l'avantage. Cela le sensibilise à l'effort que fait l'entreprise», souligne M. Chênevert.

Cette reconnaissance est renforcée par une communication régulière sur les avantages proposés. «Une entreprise qui sensibilise ses employés sur une longue période semble augmenter leur satisfaction, plutôt que les effets des avantages eux-mêmes», constate Denis Chênevert.

Cette partie flexible de la rémunération est particulièrement appréciée dans les industries à fort capital intellectuel comme l'informatique ou la pharmaceutique.

«Ce sont des secteurs où l'embauche a un coût important. Il y a donc un intérêt élevé à trouver un système de rétention de la main d'oeuvre», observe M. Chênevert.

Le bon sens avant la dépense

La formation peut devenir un casse-tête pour l'entreprise devant la difficulté à définir les besoins et le budget adéquat.

Pourtant, l'entreprise doit outiller ses employés pour qu'ils soient en mesure d'accompagner le développement des affaires, souligne Florent Francoeur, le P.-D.G. de l'ORHRI.

Quant aux employés, l'absence de formation les incite à rechercher de nouveaux défis, et donc à quitter l'entreprise.

Il serait trompeur de se baser uniquement sur l'aspect budgétaire. «Les entreprises performantes investissent 4 à 5% de leur masse salariale en formation», constate M. Francoeur. Mais la dépense ne garantit pas l'efficacité de la formation. «C'est facile de dépenser en envoyant quelques employés dans un colloque», précise-t-il.

L'entreprise devrait commencer par recenser les besoins en s'adressant directement aux employés.

«Demandez-leur de quoi ils ont besoin, conseille M. Francoeur. Ensuite, l'entreprise peut regrouper les différents besoins afin d'offrir une formation commune, qui lui reviendra moins cher.»

Elle peut aussi envoyer un ou deux employés en formation. À leur retour, ils pourront partager leurs connaissances avec leurs collègues.

Un directeur des ressources humaines? Pas trop vite, tant que vous êtes capable, comme dirigeant, d'être en contact direct avec votre monde. Si vous vivez dans votre bunker, c'est difficile. Il faut que vous sortiez. Je crois que les ressources humaines sont le dernier département qui doit être confié à des professionnels, tant que le fondateur peut encore parler directement à son monde. Chez nous, en dépit de la croissance, nos employés ne sont pas moins proches des hauts dirigeants. Selon notre modèle d'affaires, nous subdivisons une division dès qu'elle est trop grosse. Au final, tout revient à l'empowerment. On fait confiance ou non.

L'opinion d'Alain Bouchard, président d'Alimentation Couche-Tard

Un directeur des ressources humaines? Pas trop vite, tant que vous êtes capable, comme dirigeant, d'être en contact direct avec votre monde. Si vous vivez dans votre bunker, c'est difficile. Il faut que vous sortiez. Je crois que les ressources humaines sont le dernier département qui doit être confié à des professionnels, tant que le fondateur peut encore parler directement à son monde. Chez nous, en dépit de la croissance, nos employés ne sont pas moins proches des hauts dirigeants. Selon notre modèle d'affaires, nous subdivisons une division dès qu'elle est trop grosse. Au final, tout revient à l'empowerment. On fait confiance ou non.

Photo Olivier Pontbriand, collaboration spéciale

Alain Bouchard