On voit de plus en plus de moyennes entreprises avec un chef de l'innovation. Chez Moment Factory, à qui on doit entre autres l'illumination du pont Jacques-Cartier et le visuel des spectacles des plus grandes vedettes internationales, comme Madonna, le rôle est particulièrement crucial et il est sous la responsabilité de l'un des cofondateurs, Dominic Audet. Il a accepté de nous parler de ses défis.

Quel est le coeur de votre travail comme chef de l'innovation ?

Je m'assure que la vision en recherche et développement soit alignée avec la vision d'affaires de l'entreprise, qui est de développer des produits, de la propriété intellectuelle. Par exemple, le mini parc thématique en forêt Lumina en est un. On en a fait cinq jusqu'à maintenant et une douzaine apparaîtront à l'international, notamment au Japon et à Singapour. Je dois m'assurer que nos innovations permettront de mieux développer de nouveaux produits.

Comment trouvez-vous votre inspiration ?

Je regarde ce qui se passe dans d'autres domaines, comme l'aviation, l'ingénierie, la science et, plus récemment, les jeux vidéo, puis je me demande comment appliquer ces innovations dans le divertissement. Je fais donc de la vigie sur l'internet, je suis abonné à des groupes de discussion et j'assiste à des conférences. J'aime aussi visiter des magasins de jouets pour regarder comment on pourrait prendre des idées et les reproduire à grande échelle.

Comment déterminez-vous si une piste vaut la peine d'être explorée ?

C'est lié à mon expertise du domaine, à mon imagination et à ma vision du futur. Puis, une innovation parcourt un long chemin chez Moment Factory. Il y a le projet dans un axe de R et D. On teste aussi les idées dans notre studio où il y a un contexte favorable à l'expérimentation, avec équipements, ressources et budgets. Ensuite, nous organisons des ateliers avec les employés, les familles et les amis. Dans ces événements, on teste toutes les innovations sur lesquelles on a travaillé pendant les six derniers mois pour voir la réaction des gens. Environ la moitié des innovations fonctionnent et on les met ensuite dans des projets clients, puis on pourra en faire un produit. Les innovations qui ne fonctionnent pas sont aussi très importantes. On continue alors à travailler dessus et plusieurs sont devenues les plus grandes innovations de Moment Factory. Si tout fonctionne lors d'un atelier, c'est parce qu'on n'a pas assez poussé.

Comment la R et D est-elle structurée chez Moment Factory ?

Avant, nous avions une grosse équipe qui faisait uniquement de la R et D, mais je trouvais qu'elle manquait de productivité et qu'elle était déconnectée des projets clients. J'ai donc cassé l'équipe, qui est retournée travailler sur des projets clients. Maintenant, lorsqu'on ouvre un projet R et D, on définit les compétences dont on a besoin et on va chercher les ressources nécessaires. Ça nous donne des innovations très appliquées qui vont rapidement dans les projets clients. Le défi toutefois, c'est de continuer à faire suffisamment d'innovation alors que les projets clients ont toujours la priorité sur ceux en R et D.

Quel est le plus grand ennemi de l'innovation que vous devez combattre ?

L'organisation. Plus on est structuré, plus il y a de la gestion de risques, plus on planifie des résultats et tout ça combat l'innovation. Heureusement, comme j'ai assez de pouvoir dans l'organisation, je peux permettre des projets un peu délinquants pour lesquels on ne connaît pas vraiment le livrable, qu'on n'a pas une certitude du retour sur l'investissement et pour lesquels on accepte de faire des erreurs qui nous permettront d'apprendre énormément.

Que faut-il pour être un bon chef de l'innovation ?

Une vision claire d'où on s'en va. Et mettre les gens en confiance. L'équipe doit sentir qu'elle est dans un bon contexte pour créer et ne pas avoir peur de faire des erreurs. Si on réprimande les gens à la suite d'erreurs, ils oseront moins par la suite. Par contre, il ne faut pas avoir peur non plus d'arrêter d'investir dans un projet si on sent qu'il ne va nulle part. Aussi, j'essaie d'être un bon exemple : je n'ai aucun problème à dire que je me suis trompé.

MOMENT FACTORY EN BREF

ANNÉE DE FONDATION : 2001

EMPLOYÉS : ENVIRON 250

SIÈGE SOCIAL : MONTRÉAL

BUREAUX À L'INTERNATIONAL : 5