Alain Bouchard a ouvert son premier dépanneur en 1980. En 2001, il achetait sa première chaîne aux États-Unis. En avril 2012, il a acquis la chaîne norvégienne Statoil Fuel&Retail, qui compte environ 2300 points de vente.

Pendant sept mois, Alain Bouchard a très mal dormi. Le président de Couche-Tard avait acquis en 2012 la chaîne européenne Statoil Fuel&Retail, qui s'étendait dans trois pays scandinaves, les pays baltes, la Pologne, la Russie. Huit nouveaux pays, autant de langues.

«J'étais frustré tous les jours, raconte l'homme d'affaires: le sens de l'urgence n'existe pas dans ces pays-là?»

L'approche nord-américaine du commerce de détail est très axée sur les opérations et les activités quotidiennes, explique-t-il, alors que l'Europe se préoccupe davantage de procédures et de stratégie. «Ils réfléchissent longtemps, il y a beaucoup de réunions, beaucoup de remises en question.»

«C'était beaucoup de frustrations, poursuit-il. Mais on avait fait un gros chèque, alors à un moment donné, il faut respirer par le nez. On se dit que cette affaire est rentable, et qu'il est préférable de la comprendre que de vivre ces frustrations.»

Mais comprendre une culture, y adhérer peut-être, ne se fait pas sur l'internet.

«Notre façon à nous, c'est de voyager», énonce Alain Bouchard.

Il insiste: «Voyager! Je n'aurais jamais pensé il y a 15 ans que j'aurais voyagé autant. Mon auto va avoir quatre ans et elle a 50 000 km. Je ne fais que me rendre de la maison à l'aéroport!»

Pendant un an et demi, il a passé tous les mois une semaine en Europe, pour visiter les marchés, expliquer la culture de Couche-Tard, s'intéresser à la leur. «C'est l'exemple qui fait que les gens adhèrent», dit-il.

«C'est très simple... mais tellement compliqué!»

Compliqué parce que la recette n'est jamais inaltérable ni immuable. Une culture n'est jamais arrêtée ni idéale.

«Nous avons toujours appris des acquisitions que nous avons faites, lance-t-il avec conviction. Quand tu achètes quelque chose, c'est parce qu'elle a une valeur. Curieusement, j'ai vu de grands échecs d'acquisitions parce que les gens achètent quelque chose puis essaient de la transformer complètement en ce qu'ils sont. La culture à laquelle je réfère est une culture en évolution. Avec l'Europe, la culture de Couche-Tard a tellement changé, après seulement trois ans!»

Les résultats ont été à la hauteur des efforts. Lors de la dernière réunion annuelle tenue à La Nouvelle-Orléans, Alain Bouchard a synthétisé en un mot son avancée européenne: maturité. «Les résistances qu'on sentait lors de la première année ont commencé à tomber l'année dernière et cette année, les gens veulent s'entraider, relate-t-il. Le vice-président de la Floride échange avec le directeur de la Suède, lui dit qu'il aime ce qu'il fait...»

Le défi européen en fut un de compréhension et d'apprentissage, conclut-il.

Il trouve un exemple devant lui, sur son bureau. «J'ai mon téléphone intelligent à droite, j'ai mon iPad ouvert devant moi, et mon ordinateur est ouvert sur un projet de nouveau magasin. J'ai 65 ans et il n'y a pas si longtemps, jamais je n'aurais pensé être branché comme ça. Je connais des dirigeants qui ne touchent à rien de tout ça. Je trouve que c'est un symptôme de blocage au changement. C'est l'ouverture au changement et à la différence qui fait que nous avons bien réussi.»

Le réseau d'alimentation Couche-Tard en bref

Plus de 13 000 magasins dans le monde

> Plus de 60 000 employés au Canada et aux États-Unis

> Europe: 8 pays au nord et à l'est

> Asie: plus de 4000 magasins (contrats de licences)