Le 28 avril dernier, le premier ministre Philippe Couillard s'est dit favorable à la création d'un ordre professionnel des préposés aux bénéficiaires et d'un autre pour les ambulanciers. Mais la question divise les principaux intéressés, et la marche vers cette étape importante semble encore bien longue.

Préposés aux bénéficiaires

Depuis quelques années, des préposés aux bénéficiaires sont parfois au coeur d'allégations de soins de piètre qualité, de sévices subis par certains patients et parfois même de maltraitance.

Selon la Fédération professionnelle des préposés aux bénéficiaires (FPBQ), les plaintes pour vol et fraude commis par des préposés aux bénéficiaires contre des personnes âgées sont en hausse.

«On constate une dégradation marquée de la profession dans le réseau privé et public, surtout depuis l'adoption de la loi 90 [Loi modifiant le Code des professions et d'autres dispositions législatives dans le domaine de la santé]. Cette loi nous considère comme des non-professionnels», déplore son président, Michel Lemelin.

Reconnaissance et encadrement

Pour mieux encadrer le métier, la FPBQ travaille d'arrache-pied à la reconnaissance de la profession. L'association est «tout à fait d'accord» avec l'idée de Philippe Couillard de créer un ordre professionnel. «Il faut rendre obligatoire la formation et implanter un code de déontologie, de l'inspection de même que de la formation continue», croit Michel Lemelin.

Le dossier n'est pas nouveau. «En 2009, relate M. Lemelin, nous avons rencontré l'Office des professions du Québec (OPQ), en présence de l'avocat Jean-Pierre Ménard et de la représentante du ministre de la Santé et des Services sociaux. À cette occasion, on a déposé un document de 100 pages. On avait fait nos devoirs.»

Le hic, c'est que pour créer un ordre professionnel au Québec, il faut respecter certains critères, dont une formation uniforme. Une condition que ne remplit pas pour l'instant le métier de préposé. «Je pense que l'OPQ serait ouvert à créer un ordre si on réglait ce point. Le 28 avril, nous avons rencontré le ministre de la Santé et il était aussi très attentif à notre proposition», soutient d'ailleurs Michel Lemelin.

L'OPQ se fait avare de commentaires sur ce dossier. «Pour l'instant, il n'y a pas de nouvelle demande pour créer un ordre des préposés aux bénéficiaires», s'est contenté de dire Stéphan Boivin, responsable des communications de l'organisme.

Une nouvelle entité demandée

Une réaction qui fait dire à Michel Lemelin que la création d'un ordre n'est pas essentielle. «On pourrait créer une nouvelle entité qui aurait le mandat de protéger le public et de revaloriser la profession», explique-t-il.

L'adhésion à cette entité serait obligatoire. Chaque préposé devrait suivre une formation reconnue et obtenir un permis. Un processus d'inspection professionnelle serait aussi instauré.

«On doit surtout sortir du groupe des non-professionnels, revoir le cadre de travail et les tâches des préposés aux bénéficiaires», estime Michel Lemelin.

Pour l'instant, l'adhésion à la FPBQ est volontaire. La Fédération compte environ 600 membres, alors qu'il y a environ 75 000 préposés aux bénéficiaires au Québec.

Les ambulanciers partagés

La situation est tout autre en ce qui a trait aux ambulanciers. Il faut dire que le métier est davantage encadré: les ambulanciers détiennent déjà une formation uniforme et le Registre national de la main-d'oeuvre des techniciens ambulanciers du Québec veille au grain, comme le souligne Dany Lacasse, vice-président responsable des secteurs privés à la Fédération de la santé et des services sociaux de la CSN (FSSS-CSN), qui représente 3500 des 5500 techniciens ambulanciers paramédicaux de la province.

Le Registre permet en effet depuis 2011 d'attester la compétence d'une personne à exercer à titre de technicien ambulancier paramédical dans l'ensemble du Québec. Il permet aussi de faire un suivi du maintien de cette compétence (formation continue et évaluation).

Dany Lacasse ne croit pas qu'un ordre professionnel est nécessaire. «L'opinion est très partagée actuellement, mais nos membres ne nous demandent pas d'en faire une priorité. De toute façon, il y a déjà beaucoup de surveillance, et tous les appels sont enregistrés. Je ne vois pas ce qu'on pourrait faire de plus pour encadrer la profession.» Il précise en outre que les ambulanciers peuvent maintenant prodiguer des soins préhospitaliers avancés. Ne reste qu'à déployer la pratique dans l'ensemble de la province.

L'Association professionnelle des paramédics du Québec milite néanmoins depuis plusieurs années pour créer un ordre professionnel des ambulanciers. La dernière demande de reconnaissance du statut des techniciens ambulanciers paramédicaux remonte à 2005, et elle a été refusée par l'OPQ.

PHOTO OLIVIER PONTBRIAND, ARCHIVES LA PRESSE

L'Association professionnelle des paramédics du Québec milite depuis plusieurs années pour créer un ordre professionnel des ambulanciers.