Le marché du prêt hypothécaire est extrêmement concurrentiel et les institutions financières rivalisent d'imagination pour convaincre les propriétaires de maisons de contracter leur prêt auprès d'elles. Il s'avère qu'il est payant de magasiner son hypothèque, selon un document de travail publié en février dernier par la Banque du Canada.

L'étude du professeur Robert Clark, de HEC Montréal, a l'intérêt d'identifier quel profil de clientèle décroche les meilleurs rabais sur les hypothèques.

Dans les faits, ce sont les nouveaux clients d'un prêteur, les premiers acheteurs, les jeunes et ceux qui ont recours aux courtiers hypothécaires qui décrochent les rabais de taux les plus substantiels.

L'enjeu en vaut la peine, car les emprunteurs qui n'ont pas de bons rabais paient pour ceux qui réussissent à les négocier, nous apprend l'étude. «Avant, il y avait beaucoup moins de dispersion dans les taux consentis aux clients, dit Robert Clark, professeur à l'Institut d'économie appliquée de HEC Montréal, dans un entretien. Tout le monde était assez proche du taux affiché. À compter du milieu des années 1990, les banques ont augmenté leurs taux affichés et offrent maintenant des rabais. Mais ce n'est pas tout le monde qui a des rabais.»

L'étude montre en effet que l'écart entre le taux affiché 5 ans des banques et le taux des obligations du Canada de même échéance s'est accru d'environ 100 points de base entre 1992 et 2004. Cet écart est équivalent entre le taux négocié et le taux affiché pendant la période étudiée.

Il y a donc des gagnants et des perdants avec les rabais de taux.

M. Clark et les coauteurs, Jean-François Houde et Jason Allen se sont concentrés sur les prêts assurés, c'est-à-dire les prêts dont le rapport prêt-valeur est élevé (plus de 75% de la maison pendant la période 1999-2004, étudiée par les chercheurs).

Les coauteurs ont ainsi été en mesure d'identifier les facteurs pouvant influencer les rabais de taux autre que le profil de risque du client aux yeux de l'institution. Dans le cas d'un prêt assuré, le risque en cas de défaut de paiement de l'emprunteur est assumé non par le prêteur, mais par l'assureur prêt, soit la Société canadienne d'hypothèques et de logement, soit l'assureur privé Genworth Canada.

Ça vaut la peine de magasiner

Premier constat de l'étude, il est payant de magasiner et de mettre du temps dans la recherche de la meilleure hypothèque possible.

Les clients aisés finissent par payer plus cher que les clients au budget serré parce qu'ils passent moins de temps à négocier. Ce constat vaut pour une maison et un prêt aux caractéristiques semblables.

Deuxième constat, la taille de l'hypothèque joue un rôle. Plus la maison coûte cher et l'hypothèque imposante, meilleur sera le rabais.

Troisièmement, les auteurs constatent que les emprunteurs qui sont susceptibles de devenir de bons clients pour la banque sont favorisés. «Au Canada, l'hypothèque se trouve souvent dans la même institution où on fait toutes ses affaires bancaires», fait remarquer Rob Clark.

Dans cette perspective, le prêteur accordera un meilleur rabais aux clients versant un acompte élevé à l'achat d'une maison et ayant une cote de crédit élevée. Ce sont des signaux qui lui laissent croire qu'elle pourra vendre à son client d'autres produits (comme une carte de crédit, des REER, marge de crédit hypothécaire ou conventionnel) et que ce dernier sera vraisemblablement solvable.

C'est aussi le cas des jeunes adultes qui habitent chez leurs parents et qui achètent leur première maison. «La banque veut attirer un client jeune qui va être avec elle pendant longtemps», ajoute le professeur Clark.

Quatrième constat, les nouveaux clients obtiennent en moyenne un rabais de 10 points de base supérieur au rabais obtenu par les clients existants de l'institution. Ceux-ci supportent un coût à changer d'institution. Le prêteur le sait. Leur pouvoir de négociation s'en trouve diminué.

Dernier constat, l'utilisation d'un courtier hypothécaire a une incidence positive sur l'ampleur du rabais de taux consenti à l'emprunteur.

Les auteurs de l'étude évaluent le rabais additionnel à 17,5 points de base. «Ça représente une économie de 1670$ en intérêt sur un prêt de 5 ans de 200 000$», souligne Rob McLister, dans son blogue Canadian Mortgage Trends ayant comme sujet le document de travail.