Les grandes entreprises pharmaceutiques ont diminué considérablement leur effort de recherche au Canada depuis 10 ans. Et malgré une éventuelle amélioration de la protection de leurs brevets au pays, nous n'avons aucun indice permettant de croire à un rétablissement de cet effort. Et du côté des laboratoires de recherche de biotechnologie québécois, prendra-t-on la relève des entreprises?

Mettre la table pour les entreprises pharmaceutiques

Depuis cinq ans, les associations d'entreprises de biotechnologies telles BioQuébec et Montréal InVivo, la grappe des sciences de la vie du Montréal métropolitain, mettent en place divers plans pour s'adapter aux nouvelles exigences de la recherche et du développement pharmaceutiques.

Le plus récent en date, annoncé le mois dernier, vise à offrir un cadre unique aux entreprises pharmaceutiques qui veulent mettre au point de nouveaux produits à moindre coût. C'est l'initiative en recherche clinique précoce, lancée par le Centre hospitalier de l'Université de Montréal (CHUM), le Centre universitaire de santé de McGill (CUSM) et le Centre hospitalier universitaire Saint-Justine.

En mettant les ressources hospitalières et universitaires en commun, Montréal veut fournir un milieu de développement de nouveaux produits pharmaceutiques si attrayant qu'on croit créer 500 emplois et doubler le nombre des patients accédant tôt à de nouveaux produits.

Les entreprises pharmaceutiques se voient offrir des moyens scientifiques de savoir très tôt dans le développement de leurs produits s'ils sont efficaces ou non. «Nous avons fait le pari que la métropole se positionnera de manière très efficace afin de recevoir les investissements mondiaux en R&D», affirme Rémi Quirion, scientifique en chef du Québec.

Alliances entreprises pharmaceutiqes-universités

De son côté, Martin Godbout, président du conseil d'administration de BioQuébec, l'association des biotechs québécoises, estime que «le climat québécois dans les labos universitaires est en nette embellie. Nous avons cessé de créer une nouvelle biotech chaque fois qu'un de nos chercheurs trouve une nouvelle molécule. Du coup, nous avons cessé d'éparpiller, de saupoudrer les dollars du capital-risque. On joue maintenant le tir groupé.»

M. Godbout voit des signes très tangibles de cette migration des dollars sortant des biotechs naissantes pour aller vers les projets prometteurs en recherche.

«La firme québécoise de capital-risque AmorChem aurait dans le passé investi dans des compagnies en démarrage. Là, elle a 22 projets de recherche de profs québécois dans son portefeuille d'investissements! lance-t-il. L'argent va au labo, au projet, à la molécule, pas à une compagnie. Quand le travail de recherche aura livré des résultats très tangibles, on pensera à une compagnie.» M. Godbout aime bien rappeler que l'un des actionnaires d'AmorChem est la très grande entreprise pharmaceutique Merck. «Et il n'y a pas qu'AmorChem, ajoute-t-il. Les grandes pharmaceutiques ont aussi investi dans les projets de Génome Québec, dans les laboratoires de nos plus éminents scientifiques, comme Jean-Claude Tardif et Guy Rouleau. Du jamais-vu avant.»

Génome Québec est un organisme qui finance des projets de recherche québécois sur le génome des vivants.

Formule 1 en panne d'essence

«Nous avons des alliances entre centres universitaires pour accueillir la recherche du secteur privé, nous avons les dollars du capital-risque qui affluent comme jamais dans nos universités, nous avons le personnel de chercheurs le plus qualifié, énumère M. Godbout. La Ferrari, nous l'avons! Il nous a fallu quelques années d'ajustements, mais là, nous sommes prêts!»

Sauf que le bolide risque de rester immobilisé dans les puits de ravitaillement. «La stupide panne d'essence nous guette, ajoute M. Godbout. L'argent du système de santé n'est pas là. Le ministère de la Santé et des Services sociaux investit moins de 1% de ses milliards en recherche. Notre Ferrari risque de rater la course, faute de carburant.»

Bas de vignette: Martin Godbout, président du conseil d'administration de BioQuébec, l'association des biotechs québécoises, estime que le climat québécois dans les laboratoires universitaires est en nette embellie.