La disponibilité des bureaux au centre-ville de Montréal n'a pas été aussi grande depuis la récession immobilière du début des années 90.

Le taux de disponibilité s'élève à 16% | dans les immeubles de bureaux de catégorie A au coeur du centre-ville, selon le dernier décompte du Groupe Altus. C'est plus du double de la moyenne observée depuis le début des années 2000, qui tourne autour de 7%, indique Martine Sirois, directrice de la firme de services-conseils Altus, spécialisée dans le produit de bureau.

Les immeubles A figurent parmi les plus beaux de l'inventaire. Ils sont plus modernes et offrent des caractéristiques supérieures à celles proposées dans les bâtiments âgés de la catégorie B.

À la différence du taux d'inoccupation, le taux de disponibilité englobe non seulement les locaux vacants, mais aussi les locaux occupés pour lesquels le locataire actuel a confirmé son départ sans que son remplaçant n'ait été encore trouvé par le proprio.

Jeu de chaise musicale

Les propriétaires du centre-ville subissent les contrecoups du récent boom dans la construction de tours de bureaux.

Au moins cinq projets d'envergure ont été réalisés ou sont sur le point de l'être, ce qui ajoute plus de 1 million de pieds carrés à l'inventaire, dans un marché où la croissance de la demande est anémique.

À titre comparatif, 1 million de pieds carrés correspondent à la superficie d'un gratte-ciel comme le 1000, de La Gauchetière, qui compte plus de 50 étages.

Parmi les constructions nouvelles, on trouve la tour Aimia, dans le secteur du square Victoria, et la tour Deloitte, rue Saint-Antoine. La Caisse de dépôt a aussi annoncé récemment le début de la construction du 900, De Maisonneuve Ouest, qui sera occupé en partie par l'assureur Manuvie. L'Avenue, face au Centre Bell, et la transformation de la gare Viger, à l'extrémité sud-est du centre-ville, ajouteront aussi des espaces à l'inventaire.

Un bureau sur cinq reste vide au 1, Place Ville Marie

Dans un marché stagnant comme le centre-ville de Montréal, les locataires qui signent un bail à une nouvelle adresse laissent bien souvent leur ancien propriétaire avec des locaux vides sur les bras.

Une analyse d'Altus parue à l'hiver dans le magazine spécialisé Canadian Real Estate Forum montrait que la moitié des locaux disponibles dans les immeubles de catégorie A au centre-ville se concentraient dans huit immeubles. Ces immeubles affichent en moyenne un taux de disponibilité de 33%, ce qui est considérable.

L'article ne nommait pas les immeubles en question, mais dans l'industrie, on reconnaît sans peine les perdants à ce jeu de chaise musicale.

«Sur l'avenue McGill College, de Place Ville Marie en montant jusqu'à la rue Sherbrooke, il doit bien y avoir près de 1 million de pieds carrés disponibles, dit Andrew Maravita, directeur général de la région de Montréal chez Colliers. Les propriétaires sont excessivement nerveux.»

Redbourne, qui gère le 1800, McGill College, et Industrielle Alliance, qui détient à la fois le 1981 et le 2000, McGill College, ont tous deux des blocs de bureaux sur le marché.

Au 1, Place Ville Marie, le taux d'inoccupation frise les 20%. Ce taux ne tient même pas compte du départ prochain des comptables de Deloitte, qui s'en vont chez Cadillac Fairview, rue Saint-Antoine, à compter de l'été prochain.

Chez Ivanhoé Cambridge, personne n'était disponible pour répondre à nos questions. Néanmoins, on sait que cette filiale de la Caisse de dépôt planche sur un programme d'investissement de près de 1 milliard pour redynamiser son portefeuille au centre-ville. Il est notamment question d'aménager un observatoire dernier cri aux quatre derniers étages de Place Ville Marie en lieu et place du restaurant Club Lounge Altitude 737. Des détails sont attendus au printemps.

D'autres propriétaires n'hésitent pas à faire des concessions dans l'espoir de remplir leurs étages. «D'après les conversations récentes avec des gens dans le marché, ceux-ci constatent que l'allocation [consentie par le propriétaire au locataire pour l'aménagement des bureaux] est plus élevée qu'elle ne l'était dans le passé dans le but de continuer à louer sans avoir à baisser le loyer de base», dit Martine Sirois, directrice chez Altus.

Les ingénieurs font des compressions

L'agence Jones Lang LaSalle (JLL) prévoit dans sa plus récente analyse de marché que le centre-ville restera largement favorable aux locataires au moins jusqu'au début de 2016.

Indice révélateur de l'état du marché, on trouve près de 1 million de pieds carrés offerts en sous-location.

Les ingénieurs, en particulier, se délestent de leurs bureaux. Hatch, Bechtel, Aecom et SNC-Lavalin ont tous mis des bureaux en sous-location en 2014. «Le secteur continue de souffrir en 2015», assure François Létourneau, responsable de la recherche au bureau de Montréal de JLL. SNC-Lavalin vient tout juste de mettre deux étages, soit 20 000 pi2, en sous-location au 360, rue Saint-Jacques, dans le Vieux-Montréal. Le mandat a été donné à CBRE.

Minières et firmes de génie-conseil sont responsables de 20% | des locaux en sous-location, alors qu'ils occupent environ 7,5% | des bureaux du centre-ville.

Qui loue quoi au centre-ville?

> Services financiers: 24,9%

> Technologies de l'information (et jeux vidéo): 21,3%

> Services professionnels (comptables) et biens de consommation: 17,3%

> Ordres professionnels et institutions: 14,8%

> Génie et ressources naturelles: 7,5%

> Logistique, transport et aérospatiale: 6,2%

> Services juridiques: 4,5%

> Sciences de la vie: 3,5%

Source : Jones Lang LaSalle