Une galerie marchande souterraine offre-t-elle automatiquement une plus-value à un immeuble? Bien que le taux d'occupation des portions commerciales du Montréal souterrain frise les 100%, les spécialistes s'entendent pour dire que plusieurs éléments peuvent garantir un succès ou un échec.

«Il faut se poser la question en fonction de chaque terrain et de chaque coin de rue, indique Jacqueline Saucier, directrice développement pour le Québec chez Ivanhoé Cambridge, qui possède de nombreux édifices avec une portion commerciale souterraine (Place Ville Marie, Place Montréal Trust, Centre Eaton, Complexe Les Ailes, hôtel Fairmont Le Reine Elizabeth, Atrium Le 1000 De La Gauchetière). Les locataires apprécient le confort offert par une tour rattachée au réseau sous-terrain et la galerie marchande profite de l'affluence importante des travailleurs qui se déplacent en métro.»

Il faut toutefois s'assurer que la galerie devienne une réelle destination commerciale pour les consommateurs en général. «Les galeries qui sont excentrées du centre-ville et qui sont surtout fréquentées par les travailleurs de leur édifice génèrent un commerce essentiellement local, comme c'est le cas du 700, De La Gauchetière, qui abritait Bell Canada par le passé et qui est connecté à la Tour Banque Nationale», explique Paul Lewis, doyen de la faculté de l'aménagement de l'Université de Montréal. À l'inverse, les gens se déplacent pour aller au Centre Eaton.»

Montréal vs Toronto

La synergie avec les alentours est tout aussi primordiale pour espérer goûter au succès. «Contrairement à ce que certains ont cru par le passé, les galeries marchandes du centre-ville n'ont jamais vidé les commerces de la rue Sainte-Catherine, affirme Mme Saucier. Les deux se portent bien et se servent mutuellement.»

Une force qui avantage Montréal, lorsqu'il est comparé à d'autres grandes villes, comme Toronto. «Les réseaux souterrains sont assez similaires dans les deux villes, mais Toronto n'a pas l'équivalent de la rue Sainte-Catherine, analyse Paul Lewis. La rue Yonge a une image plutôt bas de gamme en matière de commerces, contrairement à la Sainte-Catherine Ouest, dans la portion où se trouvent des galeries souterraines. À Toronto, plusieurs consommateurs vont dans l'énorme Centre Eaton sans aller dans la rue, alors que la majorité des Montréalais vont aux deux, puisque certains commerces se trouvent uniquement dans la rue, comme Birks, Ogilvy ou Holt Renfrew.»

Les rêves de la STM

Les stations de métro suffisamment spacieuses pour accueillir des locataires commerciaux tentent elles aussi de bonifier leur offre. «En s'installant à McGill en 2009, la Banque Scotia a été la première institution financière avec des bureaux dans une station de métro», souligne Michel Lafrance, directeur général de Trangesco, la filière commerciale de la STM.

Deux ans plus tard, la Banque Laurentienne a ouvert sa Station Carrière à Berri-UQAM. Récemment, Aldo a installé une borne virtuelle à Lionel-Groulx pour acheter des souliers en ligne.

«Dans le futur, j'aimerais qu'une station ait une SAQ et des commerces où les consommateurs peuvent ramasser une baguette et du fromage avant de rentrer à la maison, ajoute M. Lafrance. Pour l'instant, il n'y a aucun projet d'agrandissement dans l'air et on se concentre pour améliorer l'offre existante. Mais un jour, si les locaux le permettent, je rêve aussi d'implanter une clinique santé où les gens pourraient faire des tests le matin et recevoir les résultats en rentrant le soir, comme on en retrouve à Paris.»