Votre retraite approche, et votre grande préoccupation est de protéger votre capital accumulé. On vous comprend. Sauf que, aussi paradoxal que cela puisse paraître, le plus gros risque serait de ne pas prendre de risque.

C'est ce qu'explique Nicolas Richard, chef des stratégies de placement du groupe Gestion de patrimoine chez Desjardins. Et cela, à cause des rendements anémiques des obligations et des autres titres à court terme.

Théoriquement, la meilleure façon de protéger son capital est de le conserver dans des titres à très court terme. Mais les taux à court terme sont si bas qu'ils entraîneront une perte de pouvoir d'achat. Aussi bien dire que vous vous appauvrissez.

Il faut donc vous convaincre de tolérer un peu de risques, d'investir une partie de vos avoirs à plus long terme et ainsi générer un rendement positif après inflation.

Accepter une part de risques se justifie par le fait que l'espérance de vie s'allonge continuellement. Elle est maintenant de 81 ans chez les hommes et de 86 ans chez les femmes. Ainsi, l'arrivée de la retraite ne signifie pas la fin de votre vie d'investisseur actif. Au contraire, vous devez continuer de faire fructifier votre portefeuille, étant donné que votre retraite pourrait s'étendre sur 20 ou 30 ans.

Pour tolérer le risque, même dans le marché des actions, il faut comprendre que le plus grand risque, ce n'est pas la volatilité à court terme, explique Michel Lessard, vice-président, Gestion des gestionnaires, également chez Desjardins. «Il ne faut pas regarder les pertes à court terme, mais plutôt les résultats dans l'horizon de temps que l'on se sera donné», dit-il.

Il est aussi important de bien comprendre où se situe le risque, et de s'assurer de diversifier sa provenance. Ainsi, concentrer entièrement son portefeuille dans des actions à dividendes peut sembler sécuritaire, mais dans les faits, tout le risque provient d'une même catégorie d'actifs, ce qui est contraire à la règle de la diversification des sources de risque.

L'importance d'avoir un bon plan

En investissement, la notion de plan est critique, explique Nicolas Richard. Il faut se doter d'un bon plan et y faire confiance. «Ne pas le faire serait s'exposer à changer de cap au pire moment», dit-il. Et pour un retraité, cela peut avoir de fâcheuses conséquences.

Un bon plan permet d'éviter les plus grosses erreurs. «D'instinct, les investisseurs ont tendance à favoriser les placements qui ont bien fait», dit M. Richard. La conséquence est qu'ils payent cher pour leurs titres, ce qui ajoute au risque.

L'élaboration de son plan exige évidemment de bien se connaître, ajoute Gordon Gibson, vice-président, Gestion de patrimoine, à la Financière Banque Nationale. «Il importe surtout de comprendre son horizon de placement, sa tolérance au risque et, par là, établir le rendement que l'on va tenter de réaliser», dit-il. Cela conduira à la composition du portefeuille.

«Le levier qui conditionnera tout ça, c'est la répartition d'actifs», explique M. Gibson. Pendant 30 ans, les obligations ont généré des rendements aussi intéressants que les actions. Mais cette période est maintenant révolue, car les taux d'intérêt ne peuvent plus aller plus bas. Il faut donc se tourner un peu plus vers les actions de bonne qualité ainsi que vers les obligations à plus long terme, à condition de pouvoir les conserver jusqu'à l'échéance, selon M. Gibson. «C'est la modération qui compte», dit-il. «Il faut avoir la bonne pondération et faire les ajustements tactiques le moment venu», conclut-il.

Prévoir longtemps d'avance

Ainsi, gérer ses avoirs n'est pas une mince tâche à l'aube de la retraite: raison de plus de bien vous préparer. «Vous devez faire un plan financier au moins cinq ans avant d'arriver là», conseille Martin Lafontaine, planificateur financier de la BMO à Laval.

Il faut d'abord quantifier les revenus qui seront nécessaires et en planifier la disponibilité plusieurs années à l'avance. Par exemple, si l'on croit avoir besoin de 20 000$ par année provenant de ses épargnes, il faut en sécuriser 100 000$, soit les besoins des cinq premières années, explique M. Lafontaine. La façon de le faire est de constituer un portefeuille de titres à revenu fixe dont les échéances sont étalées sur cinq ans, de manière à dégager 20 000$ chaque année. Après deux ans, on rééquilibre en y ajoutant des fonds correspondant à deux autres années de revenus, pour toujours maintenir devant soi une sécurité de cinq ans.

Et le processus de planification financière ne s'arrête pas parce qu'on prend sa retraite. «On doit revoir son plan souvent, même chaque année», affirment tous les experts.