En matière d'énergies renouvelables, le Québec a de quoi se réjouir. Ses ressources naturelles sont abondantes, et le secteur des énergies vertes est dynamique et innovant. Cela dit, quelques défis importants demeurent.

Diminuer les importations

«Il y a une certaine confusion au sein de la population. L'industrie aurait intérêt à ouvrir un dialogue avec les citoyens», estime Jean-François Samray, président-directeur général de l'Association québécoise de la production d'énergie renouvelable (AQPER).

«Oui, le Québec a des surplus hydroélectriques. Il n'en demeure pas moins que 56% de l'énergie de la province est importée.»

L'AQPER propose de diminuer graduellement ce chiffre à 48%, de sorte que notre énergie provienne majoritairement d'ici. «Ce n'est pas un changement énorme, mais ça permettrait de réduire nos émissions de gaz à effet de serre [GES], puisque nous importons des énergies fossiles», souligne son PDG.

Le Québec est pourtant doté d'un grand potentiel énergétique et possède également une expertise reconnue, notamment pour les minicentrales hydrauliques. Et les institutions, comme la Caisse de dépôt et placement du Québec, soutiennent financièrement les énergies renouvelables.

Utiliser aussi l'éolien

L'éolien est aujourd'hui une technologie mature. «Son coût a nettement baissé dans les dernières années. À 6,3 cents le kilowattheure, il est comparable à l'hydraulique», indique Jean-François Samray.

Les firmes d'ici sont très dynamiques. C'est notamment le cas de Boralex, qui est le troisième producteur d'énergie éolienne en France.

Les recherches québécoises, entre autres sur le givrage des pales en climat nordique, ont permis d'installer une éolienne à la mine Raglan, au Nunavik. Depuis qu'elle a été mise en service en 2014, la consommation de diesel à la mine a baissé de 1 million de litres.

Dominique Dodier déplore néanmoins le syndrome du «pas dans ma cour». «Tout le monde est pour le développement des énergies renouvelables jusqu'à ce qu'une éolienne s'installe près de sa maison», illustre-t-elle.

Celle qui dirige EnviroCompétences, le comité sectoriel de main-d'oeuvre en environnement, croit que l'acceptabilité sociale est un élément fondamental à la réussite des projets verts.

Ne pas sous-estimer le solaire

Le Québec est une région nordique relativement bien ensoleillée.

L'énergie solaire pourrait-elle se tailler une place ici? Oui, répond Jean-François Samray. «Le potentiel de la filière est grand. L'ensoleillement annuel reçu par le Québec dépasse celui qui rayonne sur l'Allemagne, l'un des chefs de file mondiaux du solaire.»

Même si le coût de cette énergie a baissé de 60% dans les dernières années, il est encore trop élevé pour concurrencer l'hydroélectricité. «Pour l'instant, certaines pourvoiries et camps de prospection minière l'utilisent. Les batteries sont aussi plus accessibles qu'auparavant», note M. Samray.

Les travaux de recherche et développement en cours dans ce domaine pourraient toutefois permettre de réduire les coûts et d'intégrer plus facilement les capteurs photovoltaïques à l'infrastructure d'un bâtiment.

Miser sur les matières résiduelles

Selon Jean-François Samray, la biomasse forestière, constituée de résidus de coupe, mais aussi d'arbres de faible qualité, est promise à un bel avenir au Québec. «Nos forêts immenses peuvent être transformées en énergie», dit-il. Ces usines de transformation produisent en outre de la chaleur, qui peut être utilisée pour chauffer des serres ou même des bâtiments.

Il cite en exemple la ville de La Tuque, qui pourrait bien devenir le berceau de la transformation de la biomasse forestière en biodiesel au Canada. «Pour l'Abitibi, mais aussi pour la Côte-Nord et le Saguenay, la biomasse forestière pourrait permettre de créer 10 000 emplois», assure le président de l'AQPER. Ce secteur pourrait ainsi redynamiser l'économie régionale.

Quelques autres initiatives de biogaz, qui a le potentiel de réduire les émissions de GES dans le transport, ont également été mises en place.

L'usine de biométhanisation de Rivière-du-Loup en est un bon exemple.

Dénicher les employés de demain et se mobiliser

En ce qui a trait aux énergies renouvelables, de nombreux programmes de formation ont vu le jour au Québec, de la technique de biométhanisation et de compostage à la maintenance d'éoliennes. Les experts et les techniciens spécialisés sont demandés dans la province, au point qu'on risque d'être confrontés à un manque de main-d'oeuvre.

«L'industrie va frapper un mur, constate Dominique Dodier. Le problème vient d'abord du vieillissement de la population. Les finissants peinent à répondre à la demande des entreprises. Si le secteur continue à grandir, les diplômés ne seront plus suffisants.»

Le principal défi de l'industrie est néanmoins de mobiliser le gouvernement, qui doit se doter d'une politique énergétique claire et alléger la réglementation, selon les experts.

«Les hausses de tarifs hydroélectriques nous poussent à nous tourner vers d'autres énergies. Le temps aidera donc les choses, croit Dominique Dodier. Les élus municipaux et provinciaux doivent aussi prendre le risque. Il faut sauter dans le vide, comme en bungee.»