Favoriser l'entrepreneuriat, investir dans l'éducation postsecondaire, renforcer le système de santé et créer un sentiment d'appartenance. Voilà autant de défis auxquels l'Outaouais est confronté. Portrait d'une région méconnue qui, pourtant, se classe parmi les plus importantes du Québec en matière de population, d'immigration et de tourisme. En outre, les commentaires de deux entrepreneurs de l'Outaouais : Marie-Andrée Pelletier et Frédéric Boulanger.

Diversification

Marie-Andrée Pelletier

35 ans

Présidente de JPL après-sinistre et principale actionnaire de Groupe JPL

Dans la région depuis: sa naissance

L'Outaouais est en bonne santé financière. Mais elle doit impérativement diversifier son économie, soutient Marie-Andrée Pelletier. «L'administration publique est un très gros employeur, ce qui attire les gens des autres régions à la recherche d'un emploi stable et bien rémunéré, dit-elle. Mais cela ne favorise pas du tout l'entrepreneuriat. Aussi, cela affecte l'entreprise privée qui doit rivaliser d'ingéniosité pour garder sa main-d'oeuvre. C'est sans parler de l'Ontario qui, elle, aussi lorgne les travailleurs québécois.»

Selon la femme d'affaires, diplômée en génie et désormais actionnaire de l'entreprise de construction JPL, fondée par son grand-père il y a 50 ans, la région de Gatineau doit trouver une façon de créer un sentiment d'appartenance parmi sa population. «Les gens viennent de partout s'établir ici, explique-t-elle. Très peu de gens s'identifient à la région. Surtout que Gatineau ne possède pas de centre-ville digne de ce nom, ce que l'administration s'affaire à corriger en ce moment.»

Richesse

Frédéric Boulanger

43 ans

Président, chef de la direction et cofondateur de Macadamian Technologies

Dans la région depuis: 1992

Citoyen du monde, Frédéric Boulanger refuse de mettre une frontière entre l'Outaouais et l'Ontario. «Tout comme à Ottawa, il y a à Gatineau une ouverture sur le monde. Les ambassades étrangères y sont pour beaucoup, dit-il. Les gens sont naturellement bilingues dans les deux régions. Et il y a une bonne compréhension mutuelle.» L'entrepreneur croit tellement au potentiel de «l'Outaouais québécois» qu'il y a déménagé son entreprise il y a quelques années.

«Oui, le gouvernement fédéral prend beaucoup de place, ce qui ne favorise pas la création d'entreprises, expose-t-il. Mais il y a ici un potentiel incroyable, une profondeur, surtout dans le secteur des technologies de l'information et des communications, dont le génie électrique, les semi-conducteurs, la connaissance du big data. Nous possédons une grande richesse autour de laquelle nous devrions créer de nouvelles entreprises. C'est sans parler de la grande qualité de vie. Tout cela est très motivant.

PHOTO FOURNIE PAR MACADAMIAN TECHNOLOGIES

Frédéric Boulanger, président, chef de la direction et cofondateur Macadamian Technologies.

Forces

L'Outaouais tire profit de sa croissance démographique, explique Ghislain Yoka, économiste à la direction régionale d'Emploi-Québec Outaouais. «Cela stimule l'économie, dit-il. Au dernier recensement, cette croissance a été de 8,2 % pour la période 2006-2011. L'Outaouais est au quatrième rang pour ce qui est de la croissance démographique au Québec. On le constate, cette croissance réduit les contrecoups économiques. Les gens viennent ici car il y a une stabilité. Gatineau a l'avantage d'être très près d'Ottawa. Cela a également un certain attrait pour les populations immigrantes.»

Seul bémol, croit-il: un emploi sur cinq dépend de l'administration publique. «En période de ralentissement, l'effet se fait ressentir. Pour le moment, ça va. Il faut donc diversifier l'économie et même ajouter de la plus-value à des secteurs bien établis comme la forêt.»

Défis

Outre l'entrepreneuriat et la diversification de l'économie, le maire de Gatineau, Maxime Pednaud-Jobin, croit que l'Outaouais doit miser sur l'éducation postsecondaire.

«Depuis que la région existe, dit-il, nous faisons face à des institutions très fortes en Ontario, dit-il. Les décideurs n'ont donc jamais pensé à développer nos propres ressources. Les jeunes vont étudier de l'autre côté de la rivière et ne reviennent plus en Outaouais. C'est une perte nette de cerveaux. Pourtant, dès qu'on crée un nouveau programme de formation ici, il se remplit. Le gouvernement reconnaît le problème; il est maintenant temps qu'il nous aide. Même chose dans le secteur de la santé: 40% des femmes en Outaouais vont accoucher en Ontario. On paie 110 millions de frais médicaux en Ontario. Il faut absolument augmenter nos effectifs médicaux.»

L'Outaouais en chiffres

Outaouais

Population active: 208 700 personnes

Taux de chômage: 7,5 %

Revenu disponible par habitant: 26 915 $

Québec

Population active: 4,3 millions de personnes

Taux de chômage: 7,7 %

Revenu disponible par habitant: 26 774 $

Sources: Institut de la statistique du Québec et ministère de l'Emploi et de la Solidarité sociale (2013-2014)

Cinq plus grands employeurs*

Industries Lauzon (forêt et bois): 750 employés

Bellai Frères (construction): 500 employés

Costco Wholesale Canada (commerce de détail): 450 employés

Glatefelter (produits absorbants): 320 employés

Fairmont Le Château Montebello (hôtellerie): entre 300 et 350, selon la saison

* Il s'agit ici principalement d'employeurs du secteur privé. En Outaouais, les plus grands employeurs sont surtout issus du secteur public, notamment le gouvernement fédéral.

Source: MESS (2014)

Nombre de parcs industriels: 21, dont 14 dans la grande région de Gatineau

Trois plus grands secteurs d'activité

Administration publique: 42 400 employés

Santé et services sociaux: 25 000 employés

Commerce: 22 000 employés

Source: MESS (2014)

Trois importants sièges sociaux

Industries Lauzon: Papineauville

Brookfield: Gatineau

Macadamian: Gatineau

Les trois villes les plus populeuses

Gatineau: 273 915 personnes

Val-des-Monts: 11 025 personnes

Cantley: 10 412 personnes

Source: ministère des Affaires municipales