Industries Harnois a fait ses premiers pas au Mexique il y a plus de 20 ans. Mais le fabricant de serres pour la culture horticole mise sur une nouvelle stratégie de ventes et des produits de plus haute technologie pour accentuer sa présence dans ce pays où la serriculture maraîchère est en plein essor.

Quoi de neuf?

En février dernier, Industries Harnois profitait de la tenue de l'exposition ExPo Agro Sinaloa à Culiacan, au Mexique, pour y dévoiler sa toute nouvelle serre de 16,20 mètres de largeur, la plus grande structure du genre offerte sur le marché de la production commerciale de légumes. Ce modèle vise à «répondre aux besoins des producteurs de légumes en serres qui cherchent toujours des moyens de produire plus efficacement et d'augmenter leurs rendements au mètre carré», souligne Patrice Harnois, président-directeur général de cette PME familiale de Saint-Thomas, près de Joliette, qui emploie quelque 130 personnes. Industries Harnois a fait ses premiers pas au Mexique il y a plus de 20 ans. Mais le fabricant de serres pour la culture horticole mise sur une nouvelle stratégie de ventes et des produits de plus haute technologie pour accentuer sa présence dans ce pays où la serriculture maraîchère est en plein essor.

L'élément déclencheur

La petite municipalité de Saint-Thomas a longtemps été reconnue pour ses vastes champs sablonneux réservés à la culture du tabac. Roland Harnois, un résidant, a alors vu l'occasion de lancer une entreprise de vente de systèmes d'irrigation et d'équipements agricoles spécialisés. Puis, à la demande des producteurs qui souhaitaient cultiver des semis, l'entreprise Irrigation Saint-Thomas s'est lancée dans la production de serres, d'abord en structures de bois puis métalliques.

Cinquante ans après sa création, l'entreprise transforme aujourd'hui plus de 10 millions de livres d'acier annuellement pour la fabrication de serres horticoles qui sont aménagées aux quatre coins de l'Amérique du Nord. L'entreprise, renommée Industries Harnois en 1981,«a participé aux principaux développements de serres pour la production maraîchère au Québec», note Patrice Harnois, qui a pris le relais de son père en 2005.

Même si l'industrie québécoise de la serriculture a pris son envol au cours des 30 dernières années, cette croissance est toutefois limitée et moins prononcée qu'en Ontario ou ailleurs en sol nord-américain. Voilà pourquoi Industries Harnois a fait une percée aux États-Unis au milieu des années 80. L'entreprise s'est ensuite intéressée au marché mexicain, beaucoup plus prometteur. «Notre force, c'est la conception de serres pour la culture maraîchère. Or, aux États-Unis, 90% des serres servent à la production de plantes ornementales, contre seulement 10% pour les légumes. Au Mexique, c'est complètement l'inverse», précise M. Harnois.

Le Mexique exploiterait plus de 15 000 hectares en production maraîchère en serre, comparativement à quelque 700 ha aux États-Unis et 1400 ha au Canada, dont une centaine au Québec. En 2012, le Mexique représentait 48% des serres de tomates en Amérique du Nord, comparativement à 21% en 2002. Au Mexique, «il y a encore d'immenses surfaces de tomates de champ, mais de plus en plus de producteurs se tournent vers la culture en serre», constate M. Harnois. Environ 150 hectares de serres de haute technologie s'y construisent chaque année, dont près de la moitié (40%) portent le nom Harnois.

L'entreprise y a fait ses premières ventes en 1993. Jusqu'à tout récemment, elle avait recours à des distributeurs mexicains de même qu'à un employé permanent de l'entreprise qui faisait des allers-retours occasionnels. «Les résultats étaient en dents de scie. On avait de bonnes ventes certaines années, puis rien d'autres années.» Il y a quatre ans, à l'instar de son concurrent français Richel, qui comptait depuis longtemps un bureau de vente au Mexique, l'entreprise a décidé d'avoir aussi une présence régulière dans ce pays qui génère le tiers de ses revenus. Yves Dubé, vice-président de la filiale Harnois Invernaderos et employé depuis 30 ans, assure ce lien. «Le fait d'avoir quelqu'un sur place pour rencontrer des clients existants ou potentiels, observer les tendances du marché et qui, en plus, est directement rattaché au siège social et a un pouvoir décisionnel, ça donne plus de flexibilité et de crédibilité», fait valoir M. Harnois, en précisant que les résultats ont été instantanés.

L'entreprise mise aussi sur d'autres atouts. Outre la plus grande largeur de la nouvelle serre de sa gamme Luminosa, qui génère une plus grande luminosité, Industries Harnois fabrique des serres qui comprennent aussi des systèmes de filtration, des stations de pompage et d'injection, des brumisateurs, ou encore des systèmes électriques et de contrôle du climat. «On a un grand souci d'innovation et chaque année, nous apportons des changements qui améliorent la qualité des structures ou les technologies offertes.»

La stratégie

Le producteur de serres québécois n'est pas seul à s'intéresser au potentiel de croissance du marché mexicain. «La concurrence est vive et il faut continuellement offrir des gammes de produits innovants», souligne Patrice Harnois. L'entreprise livre entre autres bataille au groupe français Richel et aurait accru ses parts de marché au cours des dernières années pour se retrouver nez à nez avec son principal concurrent. «C'est comme deux bonnes équipes de hockey qui s'affrontent. On gagne des contrats, mais on en perd aussi.» Mais un nouvel acteur est désormais de la partie. Flairant la bonne affaire, des producteurs de serres mexicains tentent aussi de percer le marché. «Les producteurs mexicains, qui fabriquaient surtout des serres à plus faible valeur technologique, se spécialisent davantage. Compte tenu de leur plus faible coût de production, il faut s'assurer de rester une coche au-dessus en matière d'innovation.»

Anecdote

En 2007, Harnois présente une soumission à son plus important client mexicain. Il juge le prix trop élevé de 10 % et affirme avoir déjà passé sa commande chez un compétiteur. Harnois a deux choix : diminuer son prix de 10%, ce qui amènerait le client à conclure qu'il avait payé toutes ses autres serres 10% trop cher, ou lui proposer une nouvelle serre, optimisée, qui serait un meilleur investissement. De retour au Québec, une réunion d'urgence est convoquée afin de concevoir un nouveau design de serre, plus large, plus haute, plus lumineuse. Trois semaines plus tard, la serre Luminosa était lancée. Le client, impressionné, a annulé sa commande chez le compétiteur pour conclure l'achat de 5 hectares de cette nouvelle gamme.

En bref

5,2 milliards : valeur des exportations (1,0 milliard) et importations (4,2 milliards) entre le Québec et le Mexique en 2013, en hausse de 7,7% par rapport à l'année précédente.

Principales exportations du Québec (2013): l'aluminium sous forme brute (22,3% du total), alkylbenzènes et alkylnaphtalènes (9,0%), parties de véhicules aériens (8,8%).

Principales importations au Québec (2013): huiles brutes de pétrole ou de minéraux bitumineux (21,6% du total), voitures de tourisme et autres véhicules automobiles (21,3%), véhicules pour le transport de marchandises (15,0%).

En 2013, le commerce de marchandises entre le Québec et le Mexique représentait 3,4% du commerce international québécois.

Sources : Statistique Canada et Institut de la statistique du Québec

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

Patrice Harnois est président-directeur général d'Industries Harnois, une PME familiale de Saint-Thomas, près de Joliette.