Les avionneurs russes préparent déjà les modèles qui s'ajouteront aux Superjet 100 et MS-21 dans leur carnet d'avions civils. Pour ceux-là, ils entendent toutefois augmenter la part de composantes russes dans les appareils. Un objectif qui se réalisera en partie grâce à une entreprise de la région de Montréal, Marinvent.

La PME basée à Saint-Bruno se spécialise dans la certification des composantes électroniques et informatiques d'un avion, un sous-ensemble appelé "avionique" qui regroupe notamment les commandes de vol électriques et électroniques, les systèmes de navigation et de communication, les radars et le pilotage automatique.

En juillet dernier, elle paraphait un contrat avec l'Institut gouvernemental de recherche sur les systèmes aéronautiques (GosNIIAS), la société d'État russe qui chapeaute la recherche et développement en aéronautique. L'objectif de cette entente: faire certifier les systèmes d'avionique fabriqués en Russie.

C'est que le pays entend développer une expertise dans ce sous-secteur de la fabrication des aéronefs, explique Phil Cole, vice-président au développement des affaires chez Marinvent.

«Présentement, les modèles russes qui sont commercialisés par des entreprises comme Sukhoi et Irkut misent sur des sous-ensembles d'avionique fournis par des firmes étrangères, comme la française Thales, dit-il. Le gouvernement russe veut maintenant permettre à sa propre industrie de fabriquer l'avionique qui entre dans la composition de ses avions.»

Pour y arriver, il lui faut toutefois obtenir le "OK" des agences réglementaires de l'aviation civile. Voilà où Marinvent intervient. Une fois les composantes de l'avionique russe testées, puis retestées, la PME aura le mandat de traduire, formater, puis déposer l'ensemble des résultats obtenus auprès de Transports Canada aux fins de certification.

Advenant une réponse positive, c'est tout le ciel occidental qui s'ouvrirait aux avions équipés d'une avionique issue de Russie, les agences réglementaires du Canada, des États-Unis et de l'Europe respectant habituellement les décisions de leurs vis-à-vis, explique Phil Cole.

Retombées canadiennes

À court terme, le projet permettra à Marinvent d'ajouter cinq employés à sa petite équipe de Saint-Bruno. Un chiffre qui pourrait augmenter rapidement, selon Phil Cole.

«Nous savons qu'il y a d'autres projets en préparation, dit-il. Si on implante une méthodologie qui fonctionne, ces autres projets pourraient s'ouvrir à nous.»

Ainsi, le contrat actuel, chiffré «dans les 10 millions de dollars» par Phil Cole, pourrait se transformer en une entente à long terme rapportant plus de 100 millions à Marinvent, selon lui. "Ça vient vraiment changer la donne pour nous.»

De leur côté, d'autres entreprises canadiennes de l'aéronautique pourraient aussi bénéficier de ce pont créé entre l'autorité canadienne de réglementation des transports et la Russie, croit Phil Cole.

«Ça pourrait vraiment ouvrir une porte qui est présentement fermée, dit-il. Nous forgeons un lien entre les deux pays.»

Pour l'instant, le vice-président de Marinvent garde toutefois les pieds sur terre et sait quels défis l'attendent. «La certification est un véritable pari. On investit beaucoup de temps et d'efforts, et ce n'est qu'à la toute fin qu'on sait si on a atteint notre objectif.»

À cela s'ajoutent les barrières linguistique, mais surtout culturelle, qui séparent les mondes de l'aéronautique occidental et russe. Marinvent a toutefois une certaine expérience en la matière.

Jusqu'à l'an dernier, l'entreprise avait un bureau à Moscou. Elle pourrait d'ailleurs retourner installer une équipe là-bas, advenant une commande plus grande de GosNIIAS.

Marinvent

> Année de fondation: 1983

> Président et fondateur : John Maris

> Nombre d'employés : 12

> Marché: certification de l'avionique, formation et consultation

> Institut gouvernemental de recherche sur les systèmes aéronautiques

GosNIIAS

> Année de fondation: 1946

> Nombre d'employés : plus de 6000

> Fonction: Recherche et développement en aéronautique (civil et militaire)