Création et innovation: deux concepts particulièrement présents dans le monde des technos. Aperçu d'un écosystème bourré d'idées qui met nos PME sur la carte.

Il y a 10 ans, si on avait dit à Christine Renaud qu'elle allait se retrouver un jour à la tête d'une start-up techno, elle ne l'aurait sans doute pas cru. La jeune femme étudiait en enseignement, après tout. Mais une idée allait transformer ses plans et l'engager dans cette voie.

Cette idée, c'est celle d'amener des inconnus à se rencontrer pour mettre en commun leur savoir. Une motivation née de son intérêt pour l'enseignement, mais aussi de la découverte du pouvoir des Facebook, Twitter, LinkedIn et autres plateformes de communication pour échanger des connaissances.

«Je me servais des médias sociaux pour faire des appels à tous, se souvient Christine Renaud. J'ai donc pensé créer un réseau social consacré à l'apprentissage par les pairs, et c'est là qu'E-180 est née.»

E-180, c'est le nom de l'entreprise techno qu'elle a cofondée en 2010 avec Alexandre Spaeth, ingénieur informatique. Le duo a lancé sa plateforme web de jumelage l'année suivante. Un site qui permet aux gens à la recherche d'un savoir particulier de trouver une personne capable de leur transmettre cette information.

«C'est comme un site de rencontre, explique celle qui est derrière le concept, sauf que l'idée n'est pas de trouver l'homme ou la femme de ta vie, mais d'apprendre de ses pairs dans un contexte informel, autour d'un café, par exemple.»

Depuis, E-180 construit son réseau, qui compte aujourd'hui 5000 membres, principalement regroupés dans les régions de Montréal et de Québec, mais aussi à Boston, San Francisco et Paris.

Innovations

D'autres innovations sont en cours. D'ici quelques jours, le site changera de forme avec le lancement d'une nouvelle version. Mais les changements et ajouts principaux arriveront plus tard. Dès l'automne, la plateforme misera sur une fonction de «groupes fermés», où les participants pourront découvrir, par exemple, quelles sont les connaissances qu'ont à partager leurs proches ou leurs collègues de travail.

Éventuellement, E-180 misera aussi sur une application mobile capable de mettre en lien des gens qui se retrouvent physiquement dans un même lieu. Une occasion d'apprendre de nouvelles connaissances alors qu'on attend un avion, par exemple, dit Christine Renaud.

Montréal en ébullition

E-180 est loin d'être un cas unique à Montréal. Les entreprises technologiques dans le genre sont même légion ici, souligne Chris Arsenault, cofondateur et associé directeur chez iNovia Capital, firme de capital-risque spécialisée dans les entreprises technos.

Désormais, elles viennent même d'ailleurs pour s'implanter ici, ajoute-t-il.

C'est le cas de l'ontarienne Shopify, mais aussi d'AppDirect, entreprise lancée dans la Silicon Valley par deux Canadiens en 2009, et qui a posé un premier pied à Montréal l'année dernière.

AppDirect offre aux PME une solution de boutique en ligne pour l'acquisition de logiciels. Elle vient de conclure une nouvelle ronde de financement de 35 millions à laquelle ont participé le fonds d'investissement Mithril Capital et iNovia Capital.

«Si AppDirect a ouvert un bureau ici, c'est parce qu'il y a à Montréal une masse critique de compétences comparable à celles que l'on trouve à San Francisco, explique Chris Arsenault, qui souligne aussi la force de Montréal en matière de créativité et de design.

«La ville a aussi réussi à créer au cours des dernières années un écosystème de start-up qui permet aux entrepreneurs de se soutenir entre eux», ajoute-t-il.

Lancer des entreprises

L'investisseur aimerait toutefois que la ville gagne encore plus en importance aux yeux des entrepreneurs étrangers. «Je veux que Montréal devienne un endroit où les gens s'installent pour lancer leur entreprise et pas seulement y ouvrir un bureau satellite», dit-il.

Pour montrer qu'il est possible de connaître du succès à Montréal, il s'appuie sur les exemples de deux sociétés dans lesquelles iNovia a investi, LightSpeed et Beyond the Rack, qui ont obtenu du nouveau financement au cours des deux dernières années, à une hauteur de 30 et 25 millions de dollars, respectivement.

Reste que pour devenir ce pôle d'attraction hors du commun, il faudra encore du travail, soutient Chris Arsenault, notamment en matière de développement des affaires. «Nos entrepreneurs doivent être plus dynamiques pour développer leur relation avec leurs clients et partenaires», explique-t-il.

Selon lui, Montréal a gagné en importance dans la planète techno au cours des 10 dernières années, et défini progressivement sa niche. «Nous ne serons jamais la Silicon Valley et on ne devrait pas avoir l'ambition de le devenir aussi, dit-il. Il faut miser sur nos forces qui sont le côté culturel, le talent et la créativité, et jeter des ponts avec l'extérieur pour améliorer la partie commerciale.»