La tendance est claire: depuis le début du millénaire, les entreprises québécoises délaissent progressivement les États-Unis pour se tourner vers d'autres marchés internationaux. Cette semaine, nous faisons le point sur la transformation secondaire et tertiaire des métaux.

Contrôler l'extraction d'une ressource, ce n'est pas nécessairement maîtriser sa transformation. On ne peut que le constater lorsqu'on s'attarde au chemin que prennent les minéraux ferreux extraits des mines du Québec une fois concentrés.

Ainsi, à eux seuls, les volumes de fer, d'ilménite et de niobium extraits des mines du Québec représentent 99% de toute la production de la province. Pourtant, seulement 11% de ces minéraux seraient transformés ici, selon ce qu'a compilé récemment la firme KPMG-SECOR dans une étude publiée en juillet 2012.

Pourquoi la transformation ne suit-elle pas l'extraction? «Essentiellement à cause du transport», répond Renault-François Lortie, associé, services-conseils chez KPMG-SECOR.

Selon ce spécialiste, l'industrie favorise la transformation des minerais à proximité des marchés de consommation. Une situation qui désavantage le Québec et qui explique pourquoi la majorité de la production de fer de la province se retrouve en Asie pour être transformée.

«Les marchés de l'Amérique du Nord et de l'Europe occidentale offrent peu de croissance depuis quelques années et les perspectives pour l'avenir sont moyennes, dit-il. Les pays d'Asie offrent par contre des perspectives de croissance beaucoup plus intéressantes.»

Ce qui est vrai pour le fer ne l'est toutefois pas pour tous les métaux. Selon des données compilées par la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, le Québec transforme ainsi 2,5 fois plus de zinc qu'il n'en produit. Un ratio qui s'élève même à sept fois dans le cas du cuivre.

Il n'est aussi pas exclu que la province réussisse à s'établir comme transformateur pour d'autres métaux, explique Renault-François Lortie, notamment pour les métaux "émergents" que sont le lithium ou les terres rares. «Comme les chaînes de valeur entre le minerai et la dernière étape de transformation ne sont pas encore installées, du moins hors de la Chine, c'est là une opportunité bien intéressante pour le Québec.»

La route de l'aluminium

Grâce à ses tarifs d'électricité avantageux, le Québec se positionne au troisième rang des producteurs, derrière la Chine et la Russie. Dans ce cas précis, et pour une rare fois, la province agit en véritable transformateur, important la matière première (alumine et bauxite), puis exportant son produit fini.

Source: Industries Canada

Importations

1- BRÉSIL: alumine (739,2), bauxite (54,1)

2- ÉTATS-UNIS: alumine (234,2), bauxite (0,2)

3- SURINAME: alumine (75,1)

4- GUINÉE: bauxite (71,9)

5- JAMAÏQUE: alumine (63,7)

6- GUYANA: bauxite (2,8)

Exportations

1- ÉTATS-UNIS: 4843,2

2- PAYS-BAS: 358,2

3- MEXIQUE: 244,4

4- NORVÈGE: 135,1

5- CHINE: 79,9

L'aluminium, l'exception

Si le Québec ne transforme qu'une fraction des métaux extraits de son sol, il est toutefois un joueur majeur dans la transformation d'aluminium, et ce, même si son sol ne contient pas de bauxite, le minerai nécessaire à sa production.

C'est grâce à son électricité produite à bas coûts que la province a pu se hisser au troisième rang mondial des producteurs du métal blanc. Aujourd'hui, une constellation d'entreprises de transformation tertiaire de l'aluminium gravite autour des alumineries québécoises. Elles seraient 1234, selon les chiffres les plus récents de Sous-traitance industrielle Québec (STIQ), et emploieraient 66 691 travailleurs.

Bien que des entreprises de transformation secondaire comme Metra, Extrudex et Sapa aient fait leur place, l'aluminium ne voyage pas nécessairement en vase clos au Québec jusqu'à son incorporation dans des produits finis, selon Normand Voyer, vice-président exécutif de STIQ. «Ce n'est pas parce qu'Aluminerie Alouette vend ses lingots à un "alumineur" local que celui-là va revendre son produit transformé ici», explique-t-il.

Selon le spécialiste des chaînes d'approvisionnement, les entreprises québécoises de transformation tertiaire vont ainsi devoir se tourner vers des transformateurs secondaires américains pour répondre aux demandes de leurs propres clients. "Ça se promène beaucoup», ajoute M. Voyer.

Production québécoise

L'ilménite extraite au Québec, un minerai à base de fer et de titane, compterait pour 12% de toute la production mondiale de la planète. En 2011, pas moins de 3 millions de tonnes de concentré ont été extraites.

Pour le niobium, un métal utilisé pour la production d'acier de qualité supérieure, c'est 7% de la production mondiale (pour 4500 tonnes).

Bien que le fer soit de loin le principal métal extrait au Québec (17 millions de tonnes), cette production représente moins de 1% de la production mondiale.

Parmi les autres principaux métaux, on retrouve le zinc (190 000 tonnes de concentré), le nickel (27 000 tonnes) et le cuivre (22 000 tonnes).

Sources: Chambre de commerce de Montréal et analyse KPMG-Secor