Au moment où le développement du nord du Québec reprendra sa pleine vitesse de croisière, les minières trouveront-elles en régions les sous-traitants dont elles auront besoin?

La réponse de Sous-Traitance Industrielle Québec (STIQ) est alarmante: «Il est clair que l'offre régionale est insuffisante ou inexistante dans bien des cas.»

STIQ est une association de manufacturiers sous-traitants québécois. Elle dévoilait, en octobre 2012, une étude sur les défis technologiques des grands donneurs d'ordre dans les secteurs minier et de l'aluminerie. L'étude conclut à des carences importantes chez les sous-traitants du Nord dans une série de domaines clés: l'exploitation et le traitement des ressources minières; le développement durable, principalement le traitement de l'eau, de l'air et des déchets; la maintenance et la surveillance à distance des usines; les technologies de l'information..

Les régions s'organisent

Les municipalités du Nord réagissent à l'étude STIQ. Développement Chibougamau a déjà organisé trois missions commerciales au Sud.

«Nous avons comme vis-à-vis au Sud les Jeunes chambres de commerce du Québec, précise Céline Collin, directrice générale de Développement Chibougamau. Nous visons à faire des partenariats assortis de transferts de connaissances. Des discussions sérieuses ont eu lieu sur des produits d'éclairage, de ventilation, de transport, entre autres.»

À Sept-Îles, sans rejeter l'idée de partenariats Nord-Sud, on songe surtout à renforcir la productivité des entreprises régionales. «Nous avons déjà un bon bassin de grands sous-traitants régionaux, rappelle Sylvain Larivière, directeur adjoint de Développement économique Sept-Îles. Nous voulons lancer en 2013 un programme du type «economic gardening», un genre de jardinage industriel qui ferait pousser nos entreprises plus rapidement.»

À l'aide du programme ACCORD du gouvernement du Québec, Développement économique Sept-Îles veut renforcer le domaine de l'ingénierie des procédés industriels, miniers et métallurgiques. «Nous ajoutons donc à la main tendue au Sud le développement d'une grappe régionale solide, conclut M. Larivière.»

Cap au sud

Angus Michaud, ingénieur et président de Soudure GAM de Chibougamau, a résolument mis le cap au Sud. «Avec quatre projets miniers sur la table, dont le démarrage est prévu pour 2014 ou 2015, je dois me préparer à faire face.»

Selon son président, Soudure GAM éprouve actuellement deux limites qui lui nuiraient pour l'obtention de contrats de fabrication de pièces d'acier ou d'aluminium: les volumes limités qu'elle peut fournir; les dimensions réduites des pièces qu'elle fabrique.

La solution: le maillage avec d'autres compagnies du Lac-Saint-Jean, de Québec ou de la Côte-Nord. «Je discute très sérieusement avec quatre entreprises dans le monde de l'ingénierie, de l'hydraulique et du pneumatique», confirme M. Michaud.

La mine Arnaud, elle, prévoit le début de son exploitation en 2016. Cette mine d'apatite est une vaste fosse à ciel ouvert à tout juste 9 km du centre-ville de Sept-Îles. Le 20 février dernier, son directeur, François Biron, est allé faire du magasinage à Boucherville auprès des membres du Réseau de la transformation métallurgique du Québec (RTMQ).

«Il nous a dit qu'il lui fallait des structures d'acier, des convoyeurs, des systèmes d'électrification, des broyeurs et des ponts roulants», énumère Frédéric Chevalier, directeur général du Réseau. Et les bricoleurs sont priés de s'abstenir. M. Biron veut des pièces garanties pour au moins 20 ans.

Capital et formation pour les Cris

Raphael Picard tend aussi la main aux voisins du Sud. Cet ex-chef de bande des Cris de Pessamit est maintenant consultant économique.

Il a également demandé sa collaboration au RTMQ. «Les entreprises amérindiennes qualifiées obtiendront des contrats de sous-traitance, nous a fait valoir M. Picard, se rappelle Frédéric Chevalier. Donc l'association d'une compagnie de Sud avec une entreprise crie est une excellente façon de faire des affaires au Nord.

«Ce dont les Cris ont le plus besoin c'est de capital et de formation. Des stages de travailleurs autochtones dans des entreprises du Sud seraient une bonne manière d'ajouter à leurs compétences», estime M. Chevalier.