Le prolongement du gazoduc de Gaz Métro vers la Côte-Nord est une condition essentielle pour attirer des entreprises de transformation du minerai de fer dans la région, ont indiqué à La Presse des maires de la région.

En effet, deux consortiums étrangers, spécialisés dans la transformation secondaire des boulettes en billettes de fer pur à 99%, étudient la possibilité de s'établir à Sept-Îles.

«L'un est une association de producteurs russes et sud-africains. L'autre est un consortium autrichien, a précisé Serge Lévesque, maire de Sept-Îles. Vous devinerez qu'une des conditions de leur arrivée est le gaz naturel.»

«Pour les entreprises existantes chez nous, comme Alouette, Wabush ou Arcelor Mittal, passer du mazout lourd au gaz représente des économies importantes. C'est une garantie de la pérennité de la présence de ces centres de transformation métallurgique», ajoute M. Lévesque.

Selon le maire, les projets d'expansion de l'unité de boulettage de fer d'Arcelor à Sept-Îles dépendent notamment d'un approvisionnement en gaz naturel à court terme.

Mais ce n'est pas tout. «Il y a quatre autres entreprises disposées à faire du boulettage ici: Alderon, Adriana Resources [un projet de 13,5 milliards, extraction et transformation comprises], New Millenium et Champion Minerals, dit-il. Le gaz naturel est une condition essentielle à la rentabilité de leurs éventuelles unités de boulettage.»

À Baie-Comeau, la mairesse Christine Brisson abonde dans le même sens. «D'abord, garder Alcoa et, qui sait, avec une expansion éventuelle en plus. Ensuite, attirer d'autres transformateurs de fer.»

Engagements suffisants

Selon les deux élus, Gaz Métro avait déjà, à la fin du mois d'août, des engagements suffisants de l'industrie lourde pour combler 80% de ses exigences de rentabilité. Le projet de gazoduc coûtera au total 750 millions, selon Pierre-Yves Boivin, directeur des relations avec les communautés et les Premières Nations chez Gaz Métro, et véritable commis voyageur du projet «Prolongement Côte-Nord».

«Je l'ai rencontré le 4 septembre, confirme Mme Brisson. Il s'agissait de s'assurer que la Ville et le CLD appuieraient Gaz Métro devant la Régie de l'énergie. Nous estimons avantageux pour nos PME et nos institutions, hôpital et cégep, de passer au gaz naturel. Il y a de belles économies à faire et l'empreinte environnementale est meilleure qu'avec le mazout lourd. Pour Gaz Métro, c'est une façon de combler le 20% manquant au seuil de rentabilité.»

M. Boivin a rencontré au cours de la même semaine les élus de Sept-Îles et de Port-Cartier.

À Sept-Îles, le maire Lévesque confirme que M. Boivin a déjà rencontré les autorités du port, la Chambre de commerce, etc. «Il a même accepté une invitation de la Conférence régionale des élus (CRÉ) à Natashquan!», dit-il.

Le gaz détient actuellement quelques avantages par rapport au mazout lourd. Selon les données d'août 2012, dans les contextes industriel, commercial et institutionnel, le gaz est 104% moins cher que le mazout par unité d'énergie produite. Un litre de mazout coûte 94 cents le litre, alors qu'un mètre cube de gaz revient à 45 cents.

Objectif 2016

Pierre-Yves Boivin le confirme: les conditions gagnantes semblent réunies. «Depuis 1999, nous avons le droit exclusif sur le transport et la distribution du gaz sur la Côte-Nord. Mais ce n'est que récemment que les trois conditions décisives sont apparues: le Plan Nord nous fournit le volume nécessaire à la rentabilité du projet; les prix très compétitifs du gaz augmentent la demande; les préoccupations environnementales font que le mazout lourd n'a pas trop la cote.»

Le calendrier pour arriver à bon port est clair, et les études de faisabilité avancent à bonne vitesse. «Nous serons vraisemblablement prêts à déposer l'incontournable demande d'investissement à la Régie de l'énergie du Québec au tout début de 2013. Nous espérons une réponse dans la première moitié de 2013, sans présumer de rien. Si c'est oui, nous procurerons les premiers mètres cubes dès 2016.»

Le gazoduc partirait de Jonquière pour parcourir, entièrement enfoui, les 450 km vers Sept-Îles. Mais avant, le projet devra franchir deux étapes cruciales: convaincre la Régie de l'énergie de sa rentabilité et rassurer les populations lors des audiences du Bureau d'audiences publiques en environnement (BAPE).

On n'oubliera pas que le gazoduc traversera de nombreux cours d'eau, dont le Saguenay. Le mot «Rabaska» revient en mémoire.