Les PME québécoises n'ont d'autre choix que de s'internationaliser si elles veulent grandir, voire survivre. Il paraît évident que c'est par l'innovation qu'elles réussiront. Pas nécessairement en créant de nouveaux produits, comme plusieurs le croient, mais plutôt en adaptant leurs stratégies à l'évolution des marchés. Bref, l'innovation doit être intégrée dans le modèle d'affaires des entreprises, croit Christian Roy, associé-conseil chez Secor et auteur du livre Innovation / Exportation: pour des PME de classe mondiale.

Selon M. Roy, spécialiste en stratégie d'innovations, les PME québécoises exportent de moins en moins. Seulement 9% d'entre elles le font actuellement. Elles étaient deux fois plus nombreuses en 2006. Or, comme les possibilités de croissance demeurent relativement faibles en Amérique du Nord, les PME d'ici doivent impérativement se tourner vers les marchés d'exportation, ce qui n'est pas une sinécure dans une économie mondiale ouverte et de plus en plus concurrentielle.

Comment s'y prendre? En innovant, tout simplement! «Il y a encore trop de gens qui pensent qu'innover, c'est créer un produit qui n'existe pas. Innover, ça veut dire mieux faire, à meilleurs coûts, bref, c'est réorganiser son entreprise pour qu'elle soit plus performante. Il faut se concentrer sur son core business et chercher les occasions qui s'offrent à nous», explique Christian Roy.

En général, les petites entreprises de 5 à 10 employés ont la capacité d'innover si, bien sûr, elles sont à la fois efficaces, souples et «bien réseautées», soutient-il. Idem pour les PME de 200 employés et plus qui, dans bien des cas, disposent des ressources nécessaires pour mener à bien leurs projets. Mais pour les entreprises comptant de 50 à 200 travailleurs, l'innovation est beaucoup plus laborieuse, pour ne pas dire quasi inaccessible.

L'exemple de l'Allemagne

«Pour ce type d'entreprise, le défi de croissance est structurel. La plupart du temps, le dirigeant n'a pas l'équipe ni les fonds nécessaires pour l'encadrer dans sa gestion des changements. Et c'est dommage, car tous les entrepreneurs québécois, et j'en suis toujours agréablement surpris, sont à l'écoute quand on leur parle d'innovation. Ils sont prêts à aller de l'avant. Il faut maintenant les aider», explique celui qui a notamment travaillé avec IBM Bromont, l'Institut de recherche d'Hydro-Québec (IREQ) et la Ville de Montréal.

Christian Roy cite en exemple l'Allemagne, l'un des pays qui exportent le plus dans le monde. Selon lui, le pays d'Angela Merkel compte un nombre élevé de moyennes entreprises qui ont une dominance mondiale dans une foule de secteurs nichés. Le Québec devrait s'en inspirer, dit-il.

L'innovation ouverte, les universités, les grappes industrielles et même le gouvernement fédéral sont à la base, affirme Christian Roy, du coup de pouce dont les PME d'ici ont besoin pour croître à l'international. Le spécialiste en innovation cite en exemple les «Regional Clusters of Innovation» aux États-Unis. Cette initiative mise de l'avant par le gouvernement américain finance les projets novateurs dans des secteurs ciblés.

Le gouvernement canadien semble vouloir aller dans ce sens, comme il l'a annoncé dans son dernier budget. Au lieu d'allouer des crédits d'impôt en R-D aux entreprises qui se qualifient, le fédéral va plutôt cibler son aide. «Il faut encourager l'innovation quand elle n'est pas encore payante, quand l'entreprise est le plus à risque», dit M. Roy.

Des pratiques gagnantes

Pour la rédaction de son livre (une plaquette de 88 pages publiée à la fin de 2011) sur les façons de construire des PME de classe mondiale, l'associé-conseil chez Secor a eu l'idée de solliciter plus de 1500 PME québécoises. Du lot, 550 dirigeants ont répondu à l'appel en remplissant un questionnaire permettant de mesurer les enjeux et les stratégies de croissance des PME issues du secteur des biens (de 20 à 499 employés) et du secteur des services à valeur ajoutée (de 5 à 499 employés).

En se basant sur les meilleures pratiques (le benchmarking, dans le jargon) des PME québécoises, Christian Roy a pu ainsi dresser une liste de neuf pratiques gagnantes en gestion de l'innovation. Les voici: création d'un site internet (idéalement bilingue); analyse périodique des données de vente; formation continue de la main-d'oeuvre; mesures et contrôle de la production; analyse de la concurrence; participation à des salons et des foires commerciales; mesure de satisfaction de la clientèle; utilisation des services gouvernementaux; réalisation d'un plan de marketing.

TROIS CONSEILS AUX ENTREPRENEURS

1- S'assurer de bien connaître le marché dans lequel on évolue pour arriver à se différencier.

2- Définir un avantage concurrentiel durable et non pas seulement à court terme.

3- Savoir bien gérer ses projets, surtout la notion du risque, qui est le principal frein à l'innovation.