Dans le monde entier, les moyens de transport sont plus verts. Ils s'informatisent. Ils vont plus vite. Les innovations se succèdent dans tous les secteurs: aéronautique, ferroviaire, terrestre et collectif. Dans cette effervescence, que fait le Québec? Bien sûr, il y a eu la souffleuse d'Arthur Sicard et la motoneige de Joseph-Armand Bombardier, véritables révolutions. Mais depuis?

«Des concepts de chez nous aident les gens à se déplacer partout sur la planète», dit le directeur du Centre interuniversitaire de recherche sur les réseaux d'entreprise, la logistique et le transport (CIRRELT), Bernard Gendron. Les expertises sont variées, les découvertes aussi. De tous les secteurs, c'est celui du transport actif et collectif qui fait le plus de vagues.

Il n'y a qu'à penser au vélo en libre-service BIXI, implanté à Montréal en 2009 et qui roule maintenant dans neuf villes sur trois continents. Ou le service Communauto, premier système d'auto partage an Amérique du Nord, en 1994, et qui est aujourd'hui l'un des plus importants sur le continent.

Des programmes informatiques made in Québec, moins connus du grand public, sont en train de révolutionner la gestion du transport dans des grandes villes partout sur la planète. L'entreprise montréalaise GIRO, par exemple, a développé un système révolutionnaire qui organise les transports en commun à Los Angeles, New York, Barcelone et Singapour. Entre autres.

«Les gens d'ici ont une grande sensibilité à l'environnement», dit l'ingénieure civile et professeur à Polytechnique Catherine Morency pour expliquer la force de la province en transport collectif.

Cette vision écolo fait son chemin jusque dans le ciel, observe le président de l'Association québécoise du transport aérien (AQTA), Éric Lippé. «L'aviation est de plus en plus verte. Le carburant est cher et les transporteurs veulent économiser. Les fabricants doivent s'adapter.»

Sur la terre comme dans les airs, le transport est un domaine qui évolue vite. Le Québec n'est pas à la remorque. Voici six exemples d'innovations parmi les plus marquantes des dernières années.

1769: Bateau à vapeur, James Watt

1804: Locomotive à vapeur, Richard Trevithick

1820: Utilisation de l'asphalte comme revêtement, Europe

1821:Moteur électrique, Michael Faraday

1832: Premier tramway, New York-Harlem

1863: Premier métro, Londres

1885: Automobile, Karl Benz

1903: Aéroplane, Frères Wright

1921: Turboréacteur, Maxime Guillaume

1969: Concorde

1978: GPS, Département de la Défense américaine

1981: TGV. Ligne Paris-Lyon

1997: Voiture hybride, Toyota Prius

2060: 2,5 milliards de voitures?

Vélo en libre-service BIXI

Il fait partie du paysage montréalais depuis plus de deux ans. Le Bixi roule maintenant à Londres, Melbourne, Washington, Minneapolis, Boston, Toronto, Ottawa et Gatineau.

Le vélo en libre-service, fabriqué par Cycles Devinci à Saguenay, doit sa popularité à sa technologie révolutionnaire. Son cadre en aluminium et son guidon ne font qu'une pièce. Les câbles y sont dissimulés pour les protéger du vandalisme et des intempéries. Les pneus sont gonflés à l'azote pour limiter les crevaisons. Le centre de gravité de l'appareil est particulièrement bas et offre une meilleure stabilité.

Cette robustesse, mais aussi les stations portatives auxquelles sont accrochés les vélos entre leurs courses, fait de BIXI un système «vraiment en avance sur les autres vélos en libre-service», dit l'ingénieure Catherine Morency de Polytechnique.

Les stations, qui sont alimentées à l'énergie solaire et n'ont besoin d'aucun câblage, sont faciles et peu coûteuses à bouger. «On peut les déplacer pour s'adapter à la demande», explique Mme Morency.

Logiciel de transport public et postal

Si les métros de New York et Santiago et les bus de Montréal et Sydney arrivent et repartent à temps du terminus, c'est en grande partie grâce à des Québécois.

À l'aide d'algorithmes élaborés dans le cadre de recherches universitaires, l'entreprise GIRO a mis sur pied des logiciels de gestion et d'organisation des transports en commun et du transport postal qui sont aujourd'hui les plus utilisés sur la planète. Parmi ses clients sont des métropoles du monde entier. En tout, l'outil est utilisé par plus de 250 sociétés de transport.

Grossièrement, les logiciels confectionnent pour elles les horaires des véhicules en tenant compte de la demande, des trajets et des conditions de travail des chauffeurs. Puis, le système gère les activités journalières, assure la planification du réseau et l'information à la clientèle. Il analyse aussi la performance.

GIRO prend en charge les réseaux d'autobus, de tramways, de métro, de trains de banlieue et même de traversiers. L'entreprise montréalaise offre un service semblable aux transporteurs postaux, dont Postes Canada.

Aéronef CSeries

On le présente comme l'avion le plus écologique de sa catégorie. L'appareil de 100 à 149 places construit par Bombardier doit entrer en service en 2013.  Il sera en compétition directe avec les petits modèles de Boeing et d'Airbus.

Pour se démarquer, l'aéronef conçu pour le transport régional est construit avec de nouveaux matériaux.

Le fuselage central, par exemple, est fait d'aluminium-lithium. Un alliage à la fois plus léger et plus résistant que l'aluminium, qui est traditionnellement utilisé dans ce type d'avion.

Selon Bombardier, le CSeries, d'une valeur de près de 50 millions l'unité, est quatre fois plus silencieux que les jets de même taille. Il consomme 20% moins de carburant et rejette 20% d'émissions de CO2 qu'eux.

«C'est grâce à ces innovations qu'ils vont réussir à se frotter aux grands», prédit le président de l'AQTA, Éric Lippé. À ce jour, Bombardier aurait reçu quelque 130 commandes pour son nouvel avion.

Technologie de planification du transport urbain

Comment savoir qu'un changement de sens unique, l'ajout d'une voie réservée ou la construction d'une nouvelle route ne créera pas un véritable capharnaüm?

L'entreprise montréalaise INRO, fondée en 1976 par Michel Florian, chercheur à l'Université de Montréal, a trouvé la solution. Grâce à des formules mathématiques complexes, son logiciel, baptisé Emme prévoit si tel ou tel changement au réseau routier causera plus ou moins de congestion. Entre autres choses.

Plus de 2500 villes dans 84 pays s'en servent. «Il a été utilisé pour prédire l'impact de nouvelles infrastructures comme les traversées de nouvelles rivières à Brisbane et le système de transport en commun Transmilenio à Bogota», explique le vice-président marketing, Shane Velan. Emme a aussi prédit l'impact de modifications à des installations déjà existantes, telles que la tarification de congestion à Singapour et à l'ajout de voies de covoiturage à Seattle. «Et la planification d'événements spéciaux, tels que l'Expo de Shanghai et les Jeux olympiques de Londres», dit M. Velan.

Cône orange nouvelle génération

Son nom: T-RV-7. Il est partout. Le long des routes, sous les viaducs, sur les ponts.

L'entreprise Traffic Innovation, de Saint-Eustache, a mis au point ce cône cylindrique et rayé supporté par une base de caoutchouc en 1999 pour remplacer les panneaux métalliques réfléchissants orange et blanc qu'on utilisait auparavant sur les chantiers de construction.

Comme elles sont tridimensionnelles, ces balises réfléchissantes sont beaucoup plus visibles que les panneaux de métal et permettent aux automobilistes de mieux distinguer les zones de travaux. Elles sont aussi moins dommageables si une voiture les percute parce qu'elles ne deviennent pas «un projectile dangereux pour les travailleurs», selon Traffic Innovation.

Le ministère des Transports les a rendus obligatoires sur les chantiers de grands travaux et les routes de plus de 70 km/h. Depuis, quelques entreprises les commercialisent au Québec.

Poste de pesée intelligent

L'autoroute 15 est le théâtre d'un projet-pilote inédit. À trois kilomètres des douanes de Lacolle, les camions qui roulent en direction nord passent depuis quelques années par un poste de pesée comme il n'en existe nulle part ailleurs.

L'installation arrive à sélectionner les véhicules non conformes avant même qu'ils n'arrivent au poste de contrôle. Elle est munie d'un système de détection des véhicules, d'un système de pesée dynamique des véhicules lourds à même la chaussée de l'autoroute et d'un système automatisé d'identification de véhicules lourds.

«Ça permet de laisser rouler les camions conformes et de pincer ceux qui ne le sont pas», explique le Directeur de la direction des Systèmes de transports intelligents de l'Association québécoise du transport et des routes, Son-Thu Lê, qui a travaillé sur le projet. On évite ainsi que le poste soit plein quand des véhicules fautifs s'y présentent. Il n'y a rien d'aussi sophistiqué au pays.»

Le poste, qui a connu quelques ratés depuis sa construction en 2006, a pour objet l'amélioration de la sécurité routière et la protection du réseau routier en sélectionnant mieux les véhicules à risques. C'est un projet conjoint entre le ministère des Transports, le Société de l'assurance automobile du Québec et le gouvernement du Canada.