La Chine. Sa masse est telle que tout l'univers de la métallurgie gravite autour d'elle.

Elle a accaparé 44% de la production mondiale d'acier en 2010. On prévoit que l'Inde, en cinquième position, accédera au deuxième rang dès 2015 ou 2016.

Dans cette galaxie, le Québec est un minuscule satellite excentré. Ses trois sidérurgistes, ArcelorMittal, Rio Tinto Fer et titane et les Forges de Sorel, produisent environ trois millions de tonnes par année. Les États-Unis en font autant en deux semaines, et la Chine en deux jours.

Sur la planète aluminium, heureusement, le Québec occupe le troisième rang, avec 7% de la production mondiale, davantage que les États-Unis. Mais ce terrain est grugé par les nouveaux produits producteurs, et particulièrement par le colosse chinois. La Chine a remporté la part du dragon, passant en 10 ans de 12% à 40% de la production mondiale. Et pendant la même période, la production mondiale d'aluminium a bondi de 24 millions de tonnes en 2000 à 41 millions en 2010!

«C'est le boom des pays émergents, le Brésil, la Russie, l'Inde, la Chine, l'Afrique du Sud, ce qu'on appelle le BRICA», observe Marc-Urbain Proulx, économiste et professeur à l'Université du Québec à Chicoutimi.

La croissance de la consommation dans ces pays stimule la demande pour les matières premières. En y ajoutant les pays en voie d'émergence - Pérou, Turquie, Thaïlande, Indonésie, notamment -, «on peut penser qu'on en a peut-être pour trois, quatre, voire, selon certains, cinq décennies de forte demande mondiale de ressources naturelles», ajoute-t-il.

Ces riantes perspectives expliquent la multiplication des investissements, en dépit des inquiétudes sur les marchés occidentaux.

«Dans l'ensemble, le climat est propice, constate Serge Bergeron, président de la Table de concertation en métallurgie. On est sorti de la crise financière de 2009. Les prix des métaux se sont améliorés en 2010 et 2011, ce qui fait en sorte que les compagnies mères ont de l'argent à investir pour affronter la stimulation dans leurs marchés. On voit qu'il y a une effervescence dans le milieu métallurgique.»

Petit mais honorable

Dans ce combat de titans, le Québec peut quand même tirer honorablement son épingle du jeu. Prenons l'exemple de la fonderie Horne, à Rouyn-Noranda, propriété de Xstrata, et seule fonderie de cuivre au Canada.

«En terme de capacité, la Chine a construit l'équivalent d'une fonderie Horne à tous les quatre mois depuis quatre ans, décrit Louis-Philippe Gariépy, directeur, affaires corporatives, chez Xstrata CCR. Et les plans sont similaires pour les quatre à cinq prochaines années.»

La fonderie Horne est la dernière survivante des sept que comptait le Canada. C'est sa souplesse qui lui a valu ce destin et qui lui permet d'aborder malgré tout l'avenir avec optimisme.

«Son avantage, c'est qu'elle est très flexible au niveau des concentrés de minerais «à façon», qui s'adaptent à plusieurs formules», décrit Louis-Philippe Gariépy.

Cette polyvalence, qui facilite une production à valeur ajoutée, est un des principaux avantages concurrentiels de la métallurgie québécoise, en large partie grâce à la qualité de sa main-d'oeuvre.

«L'expertise n'est pas le moindre de nos avantages, insiste Suzanne Proulx, directrice générale du Comité sectoriel de main-d'oeuvre de la métallurgie du Québec. Chez Alcoa, par exemple, chaque fois qu'il y a des projets d'investissements importants sur des sites partout à travers le monde, c'est l'équipe québécoise qui est envoyée.»

Cette expertise doit continuer à être stimulée, en conjonction avec les universités et les centres de recherche, soutient-elle. «Il faut continuer à développer des innovations de produits et de technologies pour éviter que l'industrie métallurgique devienne un jour uniquement des centres de production, mais qu'on continue plutôt à avoir ici de la matière grise.» On ne peut pas compter que sur la matière première.

La métallurgie au Québec

> Le secteur de première transformation des métaux se compose de la sidérurgie, des alumineries, des fonderies, de la fabrication de produits en acier, de la transformation de l'aluminium et des métaux non ferreux.

> La valeur de ses activités d'exportation frôle les 14 milliards de dollars.

> L'industrie de première transformation des métaux représente 6% du PIB au Québec.

> Au Québec, elle compte 145 établissements qui emploient près de 30 000 personnes.

Source: CSMO métallurgie