Le mois dernier, 5000 personnes ont visité, avec des ingénieurs, des projets à Montréal (Maison symphonique, Musée des beaux-arts, Stade Saputo, etc.), à Québec (Promenade Samuel-De Champlain, bassin Brown, etc.), à Saguenay (Bâtiment d'accueil et Quai d'escale Agésilas-Lepage) et à Trois-Rivières (Édifice Le Saint-Maurice, Musée Boréalis, etc.).

L'objectif de cette activité portes ouvertes, organisée par l'Association des ingénieurs-conseils du Québec (AICQ): rendre le génie-conseil accessible au public afin d'en faire un choix de carrière auprès des jeunes, explique sa PDG, Johanne Desrochers.

Pour Jean-Claude Michel, ingénieur de formation et directeur général de Climatisation et chauffage urbains de Montréal (CCUM), c'était l'occasion idéale de transmettre le goût de son métier et montrer aux jeunes et à leur famille ce que peuvent faire un ingénieur ou un mécanicien de machine fixe, comme leur nouvelle chaudière à vapeur, une réalisation de BBA.

Cette centrale fournit de l'énergie thermique sous forme de vapeur à ses clients privés, des édifices du centre-ville, par un réseau de distribution qui s'étend sur 3 km.

Des gens ont appris, se réjouit Jean-Claude Michel, que Montréal possède son réseau de vapeur, plus discret que le typique réseau de vapeur qui fuit des entrailles de la ville de New York.

Moment opportun

Le synchronisme avec le contexte médiatique entourant la divulgation à la mi-septembre du rapport Duchesneau, qui a malmené la réputation de l'industrie du génie-conseil, est une coïncidence, selon Mme Desrochers. Cela dit, il ne fait pas de doute que l'activité a servi à redorer le blason de l'industrie, estime Jean-Marc Léger, président de Léger Marketing.

«L'AICQ ne peut faire autrement, dit-il. Ils ont besoin d'opérations de relations publiques, car même sans le rapport Duchesneau, ça fait trois, quatre ans que les ingénieurs sont évoqués dans ce dossier.»

Jean-Claude Michel convient que ce genre d'activité peut aider à améliorer l'image de la profession. Sauf qu'il précise qu'il n'y a pas que des projets qui se mesurent en millions de dollars au Québec, que la «majorité des ingénieurs travaillent pour gagner leur vie comme tout le monde et qu'ils payent pour les gaffes de moutons noirs».

La volatilité de la confiance envers les représentants de l'industrie du génie - ingénieurs, ingénieurs-conseils, firmes - peut aussi être expliquée, selon Johanne Desrochers, par le fait que leur travail utile à la société est toujours un peu nébuleux et que les gens n'ont pas affaire à eux au quotidien, comme à un avocat ou à un médecin, des professions plus près des gens.

«À la fin de la journée, ce sont des gens qui ont trouvé des solutions à des problèmes. Des travailleurs comme moi à qui on demande un travail et qui l'effectuent», dit Julien-Pierre Chagnon, électricien de 25 ans qui a visité le Centre Bell, la Maison symphonique et la centrale CCUM. «On réalise les rêves des architectes, on s'organise pour que le concept tienne», explique Mélisandre Désilet-Lambert, ingénieure de structure de 27 ans pour la firme Génius, qui était guide à la Station n°1.

Johanne Desrochers souligne la nécessité de faire connaître l'apport et le rôle des ingénieurs dans le développement économique du Québec. «Il y a intervention d'un ingénieur dans tout ce qui est fait de A à Z, de la distribution de l'eau aux systèmes de chauffage en passant par les édifices qui tiennent, dit-elle. Les ingénieurs ont appliqué des technologies qui nous permettent de bien vivre, nous utilisons le fruit de leur travail.»

LE MTQ NE SERAIT PAS ASSEZ GÉNÉREUX

Le ministère des Transports du Québec (MTQ) peinera à trouver les ingénieurs qu'il souhaite embaucher si les salaires offerts restent au même niveau. C'est la conviction de Maud Cohen, présidente de l'Ordre des ingénieurs du Québec (OIQ) et d'Yves Lavoie, président du Réseau des ingénieurs du Québec (RéseauIQ). Le 20 octobre, la présidente du Conseil du Trésor,

Michelle Courchesne, a annoncé la volonté du gouvernement québécois d'embaucher 300 ingénieurs au MTQ. Mme Cohen et M. Lavoie affirment que les rémunérations actuellement versées par le MTQ l'empêcheront de pourvoir ces postes. En moyenne, un ingénieur de la fonction publique provinciale reçoit une rémunération directe annuelle de 78 000$, selon l'enquête annuelle 2011 sur la rémunération directe des ingénieurs du Québec, commandée

par le RéseauIQ. Dans les entreprises privées appartenant au secteur de la construction, un ingénieur peut gagner 104 700$, soit un écart de 26 700$ par année, toujours selon la même étude.