Sur les 80 milliards d'investissements prévus dans le Plan Nord, c'est le secteur de l'énergie qui obtient la part du lion.

Les projets d'hydroélectricité, d'éoliennes, de couplage diesel-éolienne et d'hydroliennes devraient totaliser 47 milliards au cours des deux prochaines décennies.

Ce montant est toutefois remis en question par Pierre-Olivier Pineau, de HEC Montréal. Le professeur, spécialiste en politiques énergétiques, s'interroge par ailleurs sur les objectifs du gouvernement.

«Dans un document sur l'énergie renouvelable, le gouvernement parle de 47 milliards d'investissements. Mais dans le plan d'action du Plan Nord, il parle plutôt de 25 milliards. Déjà, il y a incohérence dans les chiffres. En plus, le gouvernement nous dit qu'avec le Plan Nord, il veut faire du Québec une puissance mondiale de l'énergie renouvelable. C'est drôle, je croyais que nous l'étions déjà?», ironise-t-il.

Leader ou pas?

Le professeur agrégé au Service de l'enseignement des méthodes quantitatives de gestion se demande d'ailleurs comment la Belle Province peut sérieusement devenir un leader de l'énergie renouvelable en ne développant que 3500 nouveaux mégawatts (MW).

«Le Québec produit déjà 40 000 mégawatts d'énergie; ce ne sont pas 3500 MW de plus qui vont changer grand-chose», dit-il.

Selon le gouvernement, 97% des 4500 MW annoncés dans la Stratégie énergétique du Québec 2006-2015 seront produits sur le territoire du Plan Nord, soit au nord du 49e parallèle.

Mais nos dirigeants s'engagent à développer 3500 MW d'énergie propre et renouvelable supplémentaire. Et sur ces 3500 MW, 3000 d'entre eux seront produits par hydro-électricité, 300 par éoliennes et 200 par l'entremise d'autres sources d'énergie renouvelable, notamment les hydroliennes.

Projets-pilotes

Cette nouvelle filière de production électrique fait actuellement l'objet d'un projet pilote dans la région de Montréal. Les hydroliennes sont des hélices qu'on immerge et qui produisent de l'électricité à la force du mouvement dans l'eau. L'objectif est d'installer des hydroliennes à proximité de villages nordiques (actuellement alimentés par des génératrices au diesel) dès 2013.

Hydro-Québec entend aussi mener à bien un projet pilote de couplage éolien-diesel à Kangiqsualujjuaq, au Nunavik. La mise en service est prévue entre 2015 et 2017.

Le projet hydroélectrique Eastmain-1-A-Sarcelle-Rupert, en cours de réalisation, ajoutera d'ici 2012 une capacité supplémentaire de près de 920 MW grâce à des investissements de 5 milliards de dollars

La construction du projet La Romaine se poursuit sur la Côte-Nord. Il produira 1550 MW. Son entrée en service est prévue en 2014.

Sa construction devrait entraîner la création de plus de 33 000 emplois directs et indirects, en équivalents personnes par année. À la mise en service complète du complexe hydroélectrique de la Romaine, en 2020, 6,5 milliards de dollars auront été investis.

Hydro-Québec devra aussi débourser 1,8 milliard de dollars pour l'expansion de son réseau en Minganie, ce qui permettra le raccordement du complexe à son réseau de transport.

Autre projet: la rivière du Petit Mécatina, située à quelque 250 km à l'est de la rivière Romaine sur la Côte-Nord. Hydro-Québec y a déjà réalisé les études préliminaires et certains relevés. Les études d'avant-projet pourraient commencer quand les négociations avec les communautés hôtesses seront conclues. L'hypothèse retenue par Hydro-Québec prévoit deux centrales (Petit-Mécatina-3 et Petit-Mécatina-4), pour un total de 1200 MW.

Un «fourre-tout»

Bref, ce ne sont pas les projets qui manquent. Pour Pierre-Olivier Pineau, de HEC Montréal, le Plan Nord sert en quelque sorte de justification à ce développement. «Le Plan Nord est un fourre-tout qui permet de légitimer la stratégie énergétique du gouvernement. Il y a bien sûr beaucoup d'éléments louables dans ce projet. Mais j'ai quand même l'impression que c'est un autre grand thème annoncé par le gouvernement qui va dans tous les sens», explique le professeur.

Hydro-Québec, qui est pourtant le maître d'oeuvre de la grande majorité, si ce n'est de la totalité, des projets énergétiques au Québec, n'a pas voulu nous accorder d'entrevue concernant le Plan Nord.

Gary Sutherland, porte-parole de la société d'État, nous a plutôt invité à communiquer avec le ministère des Ressources naturelles et des Parcs. «C'est leur projet à eux», nous a-t-il indiqué.

Au ministère des Ressources naturelles, on nous a recommandé de prendre connaissance du plan d'action du Plan Nord, un document de 172 pages.