Daniel Pelletier n'oublie pas ses origines. Après 30 ans d'acquisitions et d'innovations dans le secteur du mobilier de bureau, quand on lui demande lequel de ses produits il préfère, le président d'Artopex cite le matériau de ses débuts: la mélamine.

«Quand tu as coupé ton produit toi-même sur un banc de scie, tu y es attaché...», évoque-t-il.

En 1980, tout au début de la vingtaine, il avait fondé Pro-Meubles, un petit fabricant de meubles de bureau en mélamine. Le matériau était nouveau et il avait vu là l'occasion de se lancer en affaires.

Il mesure la distance parcourue depuis lors en soulignant que sa plus récente gamme de mobilier autoportant, Air Line, a fait l'objet, en juin dernier, du plus important contrat jamais conclu par l'entreprise: une entente de dix ans évaluée à 50 millions avec Hydro-Québec.

Pour des contrats comme celui-là, Daniel Pelletier se bat en Amérique du Nord contre les géants du mobilier de bureau - les Steelcase, Allsteel, et autres Herman Miller.

Devant ces Goliath, Artopex est pourtant un David, mais il a l'avantage de l'agilité. Aucun concurrent de même taille n'offre une gamme de mobilier de bureau aussi complète et aucun géant ne peut répondre aussi rapidement aux demandes particulières.

«On a une grande flexibilité, explique Daniel Pelletier. Adapter nos produits existants pour le besoin du client, c'est quelque chose qu'on peut faire facilement. D'ailleurs, près de 35% de notre production est constituée de produits adaptés et de commandes spéciales.»

Cet avantage, cette place, Daniel Pelletier les a gagnés à coups d'acquisitions. Il a construit son entreprise comme on monte un meuble de bureau, pièce par pièce. «Le but des acquisitions est simple, décrit-il. Notre vision, à mes frères et moi, était d'être capables d'offrir tous les produits de mobilier de bureau sous le même toit. On y est allés une étape à la fois.»

Achats ciblés

En 1987, Pro-Meubles achète Le Chaisier, ce qui lui permet de glisser des fauteuils derrière ses bureaux en mélamine. Les classeurs métalliques s'ajoutent à l'aménagement avec l'acquisition d'Industrie Saro, en 1991.

Mais la plus grosse bouchée a été gobée en 1993 avec l'achat du fabricant de systèmes de bureau Artopex, alors en pleine débandade financière. «Il était trois fois plus gros que nous», souligne Daniel Pelletier.

Mais le risque était justifié: les produits d'Artopex étaient excellents, sa notoriété très grande, et elle avait déjà ouvert le marché américain.

«On est tombés alors dans la Ligue nationale», commente-t-il. La compagnie accédait ainsi au monde du mobilier de collectivité, mieux connu sous l'expression anglaise contract furniture.

Pour les besoins d'un contrat de fauteuils d'aéroport, Artopex établit des liens avec TEC Innovation, une petite entreprise de Sherbrooke spécialisée dans le recouvrement en cuir. «Ça s'est tellement bien passé qu'on a acheté la compagnie!», rigole Daniel Pelletier.

Deux ans plus tard, en 2005, l'achat de Standard Desk introduit le mobilier de bois dans la gamme.

«Ce ne sont pas juste des ressources matérielles que nous acquérons, ce sont aussi des connaissances, indique-t-il. Ça a toujours profité à tout le monde à l'interne. C'est entré dans la culture de l'entreprise.»

Artopex compte maintenant quelque 425 employés. Sa gamme de produits est à peu près complète. Fini, les acquisitions? Pas nécessairement. Pas encore. Il est toujours possible de gagner d'autres parts de marché.