De nombreuses études le confirment. Les médias, les organismes communautaires et les gouvernements ne cessent de le répéter. Les Canadiens n'épargnent pas suffisamment en vue de la retraite.

L'ex-ministre Claude Castonguay est arrivé à la même conclusion dans son rapport intitulé Le point sur les pensions. Il a même recommandé d'instaurer une épargne-retraite forcée de 5% pour tous les travailleurs québécois qui n'ont pas de régime de retraite avec leur employeur. La proposition a toutefois été rejetée par la majorité des partis politiques et des groupes de pression

Bien que l'on fasse grand cas des avantages et des bénéfices liés au fait de commencer à épargner dès le début de sa vie d'adulte, le démarrage demeure ardu. Un sondage récent de la firme Ipsos Reid révèle que le nombre de Canadiens âgés entre 18 à 34 ans qui possèdent un régime d'épargne-retraite enregistré (REER) est tombé à 39%, le plus bas niveau depuis près de 10 ans. De plus, 45% des individus de ce groupe d'âge n'ont pas encore commencé à épargner en vue de la retraite

Le cycle de vie et le contexte économique sont les facteurs qui expliquent ce faible engouement pour l'épargne en vue de la retraite, explique Louis-Simon Duval, directeur, marketing et communication, Gestion de patrimoine, Banque Nationale Groupe financier

Les gens de ce groupe d'âge sont en démarrage de carrière, et ils ont bien d'autres préoccupations financières. On pense d'abord à la maison, à la voiture. On veut rapidement adopter un niveau de vie élevé. L'offre de biens de consommation de plus en plus chers ne cesse de les bombarder chaque jour. La plupart des jeunes ont de la difficulté à se faire un budget, et surtout à le suivre.

Le désir d'épargner peut être présent, mais le contexte économique ne leur facilite pas nécessairement la tâche puisqu'ils ne profitent pas pour la plupart de revenus très élevés. Chez les moins de 30 ans, 78% des dépenses servent à couvrir les besoins de consommation courante, soit le logement, le transport et l'alimentation, indique M. Duval. Ça ne laisse pas un gros fonds de roulement pour le reste.

C'est sans compter le remboursement des dettes d'études, ajoute Patricia Domingo, planificatrice financière chez RBC Groupe financier. La retraite est un objectif à long terme qui souvent ne fait pas encore partie des préoccupations des jeunes ménages qui n'en voient pas pour l'instant les bénéfices.

Ça prend donc un budget. C'est ce qui permettra de se donner un plan d'action qui inclura tous les objectifs, y compris l'épargne pour la retraite. «Le budget permet de bien cerner et de gérer ses dépenses, et permet de dégager l'excédent de liquidités qui servira à l'épargne», dit Louis-Simon Duval.

COMMENT S'EN SORTIR

On commence petit, on garde un oeil vigilant sur ses dettes, on s'assure de profiter de tous les avantages fiscaux, et on est discipliné. Voici la recette du succès pour les jeunes qui désirent prendre en mains leur sécurité financière, explique Patricia Domingo, planificatrice financière chez RBC Groupe financier. Une portion du salaire doit être épargnée de façon systématique. On se fixe d'abord un objectif petit, mais réalisable, que l'on réajuste chaque fois que le revenu augmente. Il importe aussi de bien gérer ses dettes. Restructurer ses dettes permet souvent de réaliser une économie importante en éliminant celles dont le taux d'intérêt est plus élevé. Ensuite, il faut ouvrir un compte REER dès que possible, suggère Mme Domingo. Et ne pas attendre à la fin de février, lorsque la campagne de souscription bat son plein, pour passer à l'action. «Si vos moyens sont limités, les chances sont que vous n'aurez pas les liquidités pour le faire, prévient Mme Domingo. Prenez plutôt un plan qui vous permet de souscrire chaque mois, ou encore à chaque période de paye. En démontrant que vous souscrivez à un REER, vous pourrez faire réduire vos retenues d'impôts à la source. Le fardeau d'épargner sera alors diminué. Enfin, soyez discipliné. Considérez que l'épargne n'est pas une dépense et rappelez-vous les avantages de commencer à épargner tôt. Vous profiterez de l'intérêt composé de vos placements pendant de nombreuses années.»

JEUNES GENS, IL FAUT PROFITER DU RAP

Selon le sondage de la firme Ipsos Reid, peu de jeunes profitent du Régime d'accession à la propriété (RAP) pour acquérir leur première maison. Seulement 6% des individus du groupe d'âge 18 à 34 ans s'en sont prévalus au cours de la dernière année. Le RAP est un programme qui permet de retirer jusqu'à 25 000$ de son régime enregistré d'épargne-retraite (REER) pour acheter ou faire construire une propriété. Pour se prévaloir du régime, les cotisations REER doivent avoir été faites au moins 90 jours avant de les retirer pour le RAP, sinon elles pourraient ne pas être déductibles du revenu imposable. On a ensuite en général 15 ans pour rembourser les sommes retirées du REER, en déposant annuellement une somme dans le REER. Il faut faire attention de bien faire les remboursements, car à défaut de repayer la somme prévue pour une année, on doit l'inclure dans ses revenus de cette année-là.

Accumuler de l'épargne dans un REER afin d'utiliser le RAP pour acheter une première maison a aussi un autre effet bénéfique. Comme l'on doit rembourser son REER durant les années suivantes, cela engendrera un comportement d'épargnant qui nous suit par la suite, explique Marie-Noelle Touchette, directrice de segment de marché (18-34 ans), Banque Nationale Groupe financier.