Nutrifrance, qui a toujours vendu ses pâtes à muffins, à biscuits et à gâteaux crues, ajoute deux cordes à son arc ces jours-ci: la cuisson, ce qui a nécessité un investissement de 750 000$ dans son usine, et l'exportation en France.

Ce n'est pas la folie furieuse pour les barres tendres Omax, vendues en exclusivité dans le rayon de la boulangerie des supermarchés IGA. Les ventes ne sont pas à la hauteur des attentes, mais le produit a quand même provoqué l'agrandissement de l'usine de Nutrifrance, à Saint-Jean-sur-Richelieu. Pourquoi? Parce que ces collations ont la particularité d'être cuites dans les épiceries... et que ça ne se passe pas toujours bien, vu le taux de roulement du personnel, assez élevé.

Les barres doivent passer 15 minutes au four à 350°F, et la précision est de mise. Sinon, elles sont trop cuites et sèches, ou alors pas assez cuites. «La cuisson d'un pain peut jouer de quelques minutes, mais pas les barres. Il n'y avait pas de constance dans le produit. Les consommateurs nous appelaient pour se plaindre de la qualité», résume Jean-Pierre Gaumond, vice-président au développement des affaires de Nutrifrance. De plus, les employés omettaient parfois de faire cuire les barres, de sorte que leur disponibilité n'était pas constante.

Aux grands maux, les grands remèdes: après 23 ans à fabriquer des pâtes vendues crues, la PME de 25 employés s'est dotée d'un plan de cuisson. L'usine a été agrandie de 2000 pieds carrés, l'installation de l'équipement a duré 6 mois, et 4 personnes ont été embauchées. «La cuisson, on ne voulait pas entrer là-dedans, c'est vraiment une autre game, et il fallait beaucoup investir, raconte le dirigeant et ex-pâtissier. Mais la demande pour les produits cuits congelés augmente.»

Dans quelques jours, Nutrifrance commencera à cuire ses barres Omax et à les vendre congelées à IGA, qui détient encore l'exclusivité jusqu'à la fin de 2014. La congélation a l'avantage de rendre les barres moins sèches. Jean-Pierre Gaumond croit que les ventes du produit vont bondir de 50% d'ici un an. L'épicier paiera les barres «un peu plus cher», mais le prix de détail ne bougera pas, car l'étape de la cuisson en magasin sera «sauvée».

Nutrifrance utilisera aussi ses nouvelles installations pour lancer d'autres gammes de produits. À commencer par de petits cakes santé contenant des prébiotiques, des probiotiques et des omégas «qui ne s'émiettent pas grâce à de nouvelles protéines d'huile, et non des produits chimiques». Dans un mois, Metro mettra en marché trois saveurs qui porteront la marque Symbiose.

Exportation au pays du baba

Quelques recettes de Nutrifrance s'apprêtent par ailleurs à traverser l'Atlantique pour être vendues en Alsace (France). Une entreprise qui refuse d'être identifiée et qui possède 12 points de vente apparemment très achalandés offrira à ses clients les muffins, biscuits et galettes créés en Montérégie. Elle va aussi vendre les collations à des hôtels, des restaurants, des cafétérias et des haltes routières, à titre de distributeur. Les premiers conteneurs doivent quitter le Québec au début du mois de juin.

«On ne savait pas qu'il y avait une demande là-bas!, confie Jean-Pierre Gaumond. Les jeunes raffolent des muffins, du gâteau aux carottes. Il y a une baisse dans les viennoiseries... Ils en ont vu toute leur vie et sont prêts à passer à autre chose. J'étais abasourdi de ça.»

Le nouveau client a été trouvé grâce à Desjardins, qui possède un bureau à Paris et qui a invité en novembre dernier son client Nutrifrance à venir y rencontrer des clients potentiels français.

À l'heure actuelle, Nutrifrance réalise presque 90% de ses ventes au Québec, et le reste en Ontario. Aux États-Unis, les affaires sont marginales (un seul hôtel, en Floride, importe sa pâte à muffins haut de gamme). En trouvant d'autres distributeurs pour le marché français, la PME estime qu'elle pourra «rapidement réaliser 20% de son chiffre d'affaires à l'étranger». Elle espère pouvoir bénéficier de l'accord de libre-échange avec l'Union européenne.

Nutrifance appartient à ses fondateurs, Chantal et Gilles Vaillancourt (soeur et frère). Son chiffre d'affaires, «qui augmente généralement de 10 à 20% par année», est confidentiel.