C'est Noël à l'année pour Alain Lauzon! Sauf, ironiquement, à ce temps-ci de l'année!

«À la fin de novembre, le rush est terminé, explique le propriétaire de Studio Artefact. De janvier à mars, on développe les produits, les idées, et on amorce les discussions avec les clients. Au printemps, on est dans les plans de travail et les commandes. Puis, en juillet, on campe ici pour faire la production! On passe de 20 à 195 employés jusqu'à octobre.»

Depuis 1986, Studio Artefact imagine, conçoit, fabrique, livre et installe des décors de Noël pour centres commerciaux. Trente commandes ont été passées cette année pour des installations qui décorent des centres du Canada, des États-Unis et du Mexique.

À Montréal, le Centre Eaton déploie en ce moment une immense structure composée de milliers de lumières DEL et signée par l'entreprise. «Là, on termine les livraisons, on fait le ménage et on répond aux appels de service, explique Alain Lauzon. Dans une semaine, on fera notre bilan avec nos 20 employés permanents, en retraite fermée pendant 3 jours, loin du bureau.»

Le calme après la tempête

Une tournée de l'atelier de 50 000 pieds carrés dans l'arrondissement de Rivière-des-Prairies permet de palper le calme après la tempête! Ici et là, quelques employés décorent de lumières ou réparent quelques sapins effilés. Certains éléments serviront-ils à décorer la demeure d'Alain Lauzon?

«Je ne décore pas chez moi depuis au moins 10 ans! répond le cordonnier mal chaussé. Ce n'est pas par manque d'intérêt, mais parce que je suis épuisé à ce temps-ci de l'année. Aussi, aux Fêtes, on ferme l'atelier deux semaines, et je quitte le Québec. Cela dit, je teste souvent des produits à l'extérieur de ma maison.»

Mais l'accalmie sera de courte durée, alors que s'ajoute cette année l'aménagement du nouvel atelier de Studio Artefact, autrefois situé près du canal de Lachine, sur quatre étages.

«En 14 ans, le loyer à notre ancienne adresse est passé de 3$ à 12$ le pied carré, plus les frais de gestion, dit Alain Lauzon. C'est beaucoup trop cher pour notre industrie. Mais l'avantage du nouvel atelier, c'est surtout la communication. Avant, on perdait du temps dans les ascenseurs! Ici, l'atelier est circulaire. Il y a les départements de peinture, de sculpture, de fleuristerie qui encerclent les espaces dédiés à l'emballage et à la livraison. On augmente l'efficacité de 15% en période de production.»

Après une chute substantielle du chiffre d'affaires en 2008, année de crise financière, Studio Artefact connaît en 2013 une croissance de 10%, à coups de commandes oscillant entre 175 000$ et 1,1 million.

«Notre chiffre d'affaires se situe dans les sept chiffres, mais on s'approche dangereusement des huit chiffres, affirme Alain Lauzon. Aux États-Unis, d'où provient la moitié de nos revenus, la reprise est claire. Bien des centres commerciaux sont rénovés. Conséquemment, les propriétaires veulent de nouvelles décorations.»

10 ans de vie

La pente est ascendante, même si la durée de vie des réalisations de Studio Artefact est de 10 ans. Autrement dit, un appel d'offres pour un centre commercial donné n'arrivera pas avant une décennie!

«Avant 2007, on nous demandait cinq ans de durée de vie, dit Alain Lauzon. C'est le double aujourd'hui. Ça nous oblige à chercher de nouveaux clients, à renforcer nos marchés, à faire de la recherche et développement, à revoir nos designs, à être au fait des tendances. Il y a une pression pour une valeur technologique ajoutée et une consommation énergétique moindre.

«Mais 10 ans, c'est une bonne chose. Je pousse les clients pour avoir un budget plus grand afin de concevoir des décors plus spectaculaires et d'une durée de vie allongée. Le but premier d'un décor de centre commercial est d'attirer la clientèle. Ce doit donc être impressionnant.»

Depuis 1986, Alain Lauzon et son équipe de designers, graphistes, menuisiers, soudeurs et sculpteurs s'efforcent donc de concevoir des décors qui seront actuels... longtemps. Tout cela, en tenant compte des goûts selon les marchés américain et mexicain, où il oeuvre depuis 1995 et 2003 respectivement.

«Au Mexique, c'est plus coloré et aux États-Unis, plus épuré, résume M. Lauzon. On est d'abord des designers. On veut donc connaître les objectifs des clients et ce qu'ils veulent avoir comme image. Comme on a aussi l'avantage de réaliser ce qu'on dessine, on peut s'ajuster, changer de direction, corriger le tir. Parce qu'on a une expertise complexe et qu'on travaille souvent dans l'urgence, on n'aurait pas toujours le temps de tout résoudre autrement.»