Demander un brevet pour un nouveau produit ou procédé développé par l'entreprise est perçu par certaines PME comme un geste vain susceptible de n'engendrer que des dépenses. Pourtant, il peut non seulement donner de la valeur à l'entreprise, mais aussi contribuer au succès de la commercialisation de ses produits.

Vous ne connaissez pas Cerestech, et pourtant, vous possédez peut-être à la maison des dizaines de produits issus de sa technologie.

Pellicules servant à l'emballage, sacs-poubelle, jouets, ustensiles et autres objets à base de plastique sont tous susceptibles d'être composés d'un matériau développé à l'origine à Montréal par cette PME.

Nouveau procédé

L'histoire remonte à 1999, dans un laboratoire de l'École Polytechnique mené par le chercheur Basil Favis. Au hasard d'une expérience, l'un de ses étudiants au doctorat découvre une nouvelle façon de mélanger deux produits aux propriétés physiques et chimiques bien différentes: de l'amidon thermoplastique et un plastique commun, le polypropylène.

Normalement, le mélange des deux produits génère un matériau fragile et inutilisable, mais en testant un nouveau procédé, le groupe parvient à créer un composé qui conserve les propriétés du polypropylène, notamment sa ductilité, c'est-à-dire sa capacité à être étiré sans déchirer.

«On a tout de suite vu qu'il y avait là un potentiel commercial», raconte Basil Favis, professeur en génie chimique à l'École polytechnique et cofondateur de Cerestech. En effet, le nouveau matériau a un double avantage sur le polypropylène lui-même: non seulement permet-il de réduire la part des produits pétroliers qui entrent dans la composition du plastique en leur substituant des sucres d'origine végétale, mais encore il ouvre la porte à la création de plastiques biodégradables.

Devant les belles promesses de ce produit, le chercheur cofonde Cerestech en 2001. L'entreprise, qui loge dans l'incubateur de Polytechnique, oeuvre en recherche et développement de nouveaux bioplastiques et a pour objectif de commercialiser ses inventions.

Pour ce faire, ses dirigeants ont tôt fait de déposer des demandes de brevet, et ce, avant même la création de l'entreprise. Le geste était indispensable, selon Alain Perreault, président de Cerestech. «Non seulement est-ce qu'on n'aurait pas existé sans brevets, mais on n'aurait pas survécu non plus», affirme-t-il.

Partenaire

La PME met toutefois du temps - sept ans - avant de trouver un partenaire complémentaire avec lequel forger une collaboration durable. Mais en 2008, Teknor Apex, un fabricant de granules de plastique du Rhode Island, découvre la technologie de Cerestech et approche ses dirigeants. Rapidement, les deux entreprises s'entendent sur une collaboration à plusieurs niveaux qui inclut l'octroi d'une licence exclusive à l'entreprise américaine pour fabriquer des bioplastiques à partir des procédés de Cerestech.

Selon Alain Perreault, une telle entente aurait été impossible si son entreprise n'avait pas d'abord protégé sa technologie. «Lorsqu'on veut vendre nos résines, les grands partenaires avec lesquels on travaille s'assurent que notre technologie est bien protégée, dit-il. Ça devient donc presque une nécessité à la commercialisation.»

Une nécessité qui représente du même coup un pouvoir de négociation important de la PME, ajoute-t-il. «Lors de nos discussions de partenariat, c'est un actif qu'on met sur la table, explique Alain Perreault. Si on avait seulement une expertise à proposer, ça aurait moins de valeur.»

En vertu de son entente, Cerestech est aujourd'hui une entreprise rentable qui se finance à la fois par l'entremise des redevances qu'elle reçoit de Teknor Apex, des contrats de recherche qu'elle a avec elle et des crédits d'impôt à la recherche du gouvernement.

Pour l'instant, l'industriel américain constitue le seul grand partenaire de l'entreprise qui est, d'une certaine façon, devenue son département de R-D pour le développement de nouveaux produits. Un mariage complémentaire qui n'aurait pu s'opérer sans brevets.

LE DÉFI

Cerestech, entreprise spécialisée en développement de bioplastiques, a mis du temps à trouver le chemin de la rentabilité.

LA SOLUTION

Si elle y est parvenue, c'est qu'avant même sa fondation, ses dirigeants avaient su protéger leurs arrières en déposant des demandes de brevet. Aujourd'hui, non seulement ces brevets confèrent-ils une certaine valeur à l'entreprise, mais ils servent de plus d'outil pour commercialiser ses inventions.

LE PORTRAIT

Année de fondation: 2001

Employés: 7

Président: Alain Perreault

Cofondateurs: Basil Favis et Graham Chapman

Secteur: Recherche et développement de bioplastiques