Le Groupe Crevier prévoit rénover et améliorer ses stations-service au cours des prochaines années. Cela aura toutefois pour effet d'en réduire le nombre. En même temps, la PME de 65 employés investit dans le secteur des lubrifiants, où ses revenus sont à la hausse. Parmi les plus importants joueurs indépendants dans la vente de produits pétroliers au Québec, Groupe Crevier prépare également la mise en place de la troisième génération au sein de l'entreprise.

Il y a quelques années, Pétroles Crevier (rebaptisé Groupe Crevier) comptait près de 300 stations-service sous sa bannière. Il en reste aujourd'hui 250, majoritairement au Québec, mais aussi en Ontario et, dans une moindre mesure, au Nouveau-Brunswick. Selon Pierre Crevier, président, ce nombre pourrait encore baisser d'ici cinq ans. «La baisse du nombre de points de vente n'a pas eu d'impact sur nos volumes. Et ça ne devrait pas être le cas non plus dans un avenir rapproché», assure-t-il.

Installées en région, les stations-service Crevier (appartenant à des propriétaires liés par des contrats d'approvisionnement exclusifs) font face à un nouveau défi: la mise en place de «stations multiservices». «C'est ce que demandent les consommateurs. Or, créer une station où il y a un dépanneur et un lave-auto, entre autres, ça coûte très cher, et les marges bénéficiaires ne sont pas très élevées. Nous avons donc actuellement des discussions avec des grossistes en alimentation et des chaînes de restauration afin de créer des alliances», explique Pierre Crevier.

Le nombre de stations-service en région, peu importe leur bannière, serait par ailleurs appelé à diminuer dans son ensemble, soutient le chef d'entreprise. Les municipalités comptant deux ou trois gas bars n'en compteront bientôt plus qu'un seul. Groupe Crevier veut donc saisir l'occasion de consolider sa présence en région comme elle l'a fait dans les années 80 lorsque les grandes pétrolières ont décidé de concentrer leurs énergies dans les grands centres urbains, délaissant du coup les régions plus éloignées.

Le chiffre d'affaires de l'entreprise, que Pierre Crevier refuse de divulguer, se calcule en centaines de millions de dollars. Mais les marges sur l'essence, plus particulièrement dans la distribution, sont si minimes qu'il faut mettre les choses en perspective, dit-il.

Lubrifiants et relève

Il en va autrement pour la division Crevier Lubrifiants pour laquelle Pierre Crevier se fait plus loquace. Cette division est sur une lancée depuis 2009. Depuis, en fait, que l'entreprise québécoise a fait l'acquisition des activités du géant américain Chevron, à Longueuil. «Ce n'est pas propre au Québec; Chevron a vendu l'ensemble de ses divisions à des entreprises qui sont devenues ses distributeurs», explique l'homme d'affaires de 65 ans, qui été pompiste dans son adolescence.

Les opérations de réception, d'emballage et d'expédition des lubrifiants étaient jusqu'à tout récemment réalisées au siège social de la PME dans l'arrondissement de Saint-Laurent, de même que dans les anciennes installations de Chevron. Depuis quelques mois, tout a été regroupé dans une usine plus spacieuse, desservie par une voie ferrée près de l'autoroute 20, à Longueuil.

Les lubrifiants (pour camions et autres machineries industrielles) ne représentent qu'une fraction des revenus totaux du Groupe Crevier. Mais les marges bénéficiaires y sont beaucoup plus intéressantes qu'avec l'essence, explique Pierre Crevier. De 4 millions il y a quelques années, les revenus de la division lubrifiants devraient atteindre les 20 millions au cours des prochaines années. Avec ses lubrifiants, Crevier dessert l'est du Canada, de Hawksbury (Ontario) à Saint-Jean (Terre-Neuve).

L'entreprise a été fondée en 1945 par Émile Crevier, vendeur de mazout de chauffage. Ce dernier s'est lancé dans la vente en gros en 1952. Le réseau de stations-service Crevier a vu le jour au début des années 80. Les six enfants de M. Crevier ont pris le contrôle de l'entreprise en 1988. Aujourd'hui, Pierre partage l'actionnariat avec ses soeurs Hélène et Lorraine.

Les trois dirigeants préparent actuellement leur sortie. Marie-Anick et Mathieu, les deux enfants d'Hélène, de même que Louis-Philippe et Jean-François, les fils de Pierre, ont été choisis pour reprendre le flambeau. «Ils ont tous occupé des emplois à l'extérieur. Ils nous ont démontré qu'ils avaient les compétences pour faire croître l'entreprise. Le processus de transfert a commencé en 2010 et devrait durer encore deux ans. Après cela, mes soeurs et moi allons demeurer disponibles si nous pouvons aider les nouveaux dirigeants», conclut Pierre Crevier.