Lane Crawford ouvre ses portes à SHAN. D'ici deux ans, la griffe de maillots de bain et vêtements balnéaires pourrait atterrir dans le magasin haut de gamme de Hong Kong et, du même coup, se trouver une adresse fixe dans un marché en émergence. «Lane Crawford nous a approchés il y a plus d'un an, raconte Jean-François Sigouin, vice-président de SHAN. Je suis à m'entendre avec la vice-présidente des achats que je rencontre à Paris. On a déjà envoyé les prototypes. Hong Kong est une vitrine et il faut passer par là, mais il faut être certain d'avoir un bon positionnement.»

SHAN ne veut pas manquer son entrée en Asie. «Les Asiatiques commencent à porter des maillots de bain, affirme la présidente Chantal Lévesque. Comme en Russie lorsqu'on a commencé. On s'est toujours dit: quand l'Asie va être prête, il faut qu'on soit prêts, car ça va être fort. À moyen terme, SHAN peut doubler son chiffre d'affaires grâce à l'Asie.»

Fondée en 1985, SHAN exporte aujourd'hui dans 25 pays (plus de 500 points de vente). L'entreprise réalise 65% de ses ventes à l'étranger, dont le quart en Russie et les pays la jouxtant. «Depuis 10 ans, on connaît une augmentation des ventes de 5% à 7%, affirme M. Sigouin. Nos points de vente sont en augmentation constante. Nous en comptons 50 juste dans le Grand Moscou.»

Pour percer en Asie, SHAN compte sur la qualité de son produit (1h40 de confection pour un bustier à armature, par exemple) et la quête des produits de luxe par une tranche de la population - les fortunés - en explosion.

En 2012, la manufacture SHAN, située à même les bureaux administratifs et de création qui comptent 100 employés à Laval, confectionnera 100 000 unités. Soit 15 000 de plus que l'an dernier et 25 000 de plus qu'en 2010. «On n'a confectionné que ce qui était commandé, en 2010, note Chantal Lévesque. Ainsi le chiffre d'affaires n'a pas vraiment changé (baisse de 6%, regagnée en 2011).»

Comme bien d'autres, SHAN a été frappée par la crise économique qui a affecté clients et fournisseurs. «Mais rien n'arrive pour rien, remarque Chantal Lévesque. On n'a fait aucune mise à pied, mais chaque département (transport, papeterie, approvisionnement) a trouvé une façon de réduire ses dépenses [...] Pendant ce temps, aux États-Unis, on a simplifié nos listes de prix et notre réseau de ventes. On a revu nos relations d'affaires, coupé une dizaine de clients.»

SHAN a usé d'une stratégie similaire un an plus tard en Europe où elle a perdu plusieurs clients espagnols. «Mais on a donné du temps pour payer à certains clients, dit Chantal Lévesque. Notre marge n'a alors baissé que de 2% ou 3%. N'empêche, en 2010, ce fut très dur pour nous quand l'euro a planté.»

«On a réussi à ne pas baisser notre chiffre d'affaires, car on a développé d'autres pays en même temps, dit Jean-François Sigouin. De contrôler notre produit dans nos cinq boutiques (Montréal, Laval, Saint-Sauveur, Toronto, Miami) nous a aussi aidés. On a revu tout le système de gestion des boutiques. On a franchisé celle de Saint-Sauveur en 2011. Si tout va bien, il y aura une deuxième franchise sur la Rive-Sud cette année et une troisième à Toronto en 2013.»

En plus du prix Exportation et développement des marchés internationaux remportés aux Mercuriades 2012, SHAN a pu compter sur une reconnaissance internationale pour renflouer son carnet de commandes internationales en 2011: Créateur de l'année de Paris Capitale de la création. «Notre moral en avait besoin, confie Chantal Lévesque. Il y a enfin eu quelque chose de concret. Ça s'est reflété sur les commandes.»

Les années de mauvaise presse sont bel et bien derrière l'entreprise! Particulièrement 2003 où Chantal Lévesque a vécu avec des allégations de mauvaise gestion de Montréal Mode qu'elle présidait, de conflits d'intérêts et de remboursements de dépenses non justifiées. «SHAN avait toujours eu bonne presse, se remémore Chantal Lévesque. Mais beaucoup de choses se sont dites en ce qui concerne Montréal Mode, une histoire politique et médiatique. On a été totalement blanchis en page 71 des quotidiens en 2003! Ça a été une montagne et je ne pouvais pas parler. Cela dit, la société n'a pas été affectée. SHAN n'a jamais changé, qu'elle soit détenue par la Caisse de dépôt ou nous. Ç'a été beaucoup sur moi. Quand j'ai récupéré l'entreprise, je me suis dit: on mise sur l'étranger, on va en Russie! On n'essayera pas de convaincre tout le monde qu'on est fin. C'était dans les débuts de l'internationalisation de la société.»