«À mon âge, quel fonds devrais-je détenir?»

Cette question, Nathalie Godbout, directrice gestion de produits, chez Groupe Investors, l'a souvent entendue lorsqu'elle a commencé dans le domaine, il y a environ 15 ans.

«À cette époque, on disait souvent que la part de revenu fixe d'un portefeuille devait être égale à l'âge. Donc, pour quelqu'un qui a 50 ans, cela équivaut à la moitié de son portefeuille. À 60 ans, il a 60% de revenu fixe et ainsi de suite», explique-t-elle.

Ce temps est maintenant révolu, précise-t-elle.

«Le problème avec cette technique de calcul, c'est qu'elle ne tient pas compte de la tolérance au risque et des autres sources de revenus. Parce que si quelqu'un a une caisse de retraite du gouvernement qui couvre 80% de ses dépenses, il peut par exemple décider d'aller investir dans des fonds communs plus risqués.»

Cycles de vie

Louis-Simon Duval, conseiller senior, stratégie de vente et communications financières spécialisées, Gestion de patrimoine, Banque Nationale Groupe financier, voit les choses de la même façon.

«L'âge, c'est un critère parmi tant d'autres pour déterminer quels fonds conviennent à une personne. Ce qui compte le plus, c'est le profil d'investisseur propre à chacun. Il y a des gens qui sont très sécuritaires à 25 ans et des gens de 70 ans qui sont très agressifs. Dans les deux cas toutefois, le conseiller doit avertir la personne des risques liés à ces choix. Parce que si on est très sécuritaire à 25 ans, on risque de ne pas accumuler suffisamment de capital, mais si on est encore très agressif à 70 ans, on risque de perdre beaucoup si le marché chute», affirme-t-il.

Nathalie Godbout remarque que souvent, plutôt que de parler d'âge avec les investisseurs, on parle de cycles de vie.

«Il y a la phase active dans laquelle on est dans l'accumulation d'actifs et où, généralement, on est axé sur la croissance, dit-elle. Plus on se rapproche de la retraite, et l'âge varie beaucoup d'une personne à une autre, plus on va vers des portefeuilles prudents.»

Le choix des fonds communs doit aussi aller selon l'objectif et l'horizon de placement.

«Si je veux acheter une maison dans deux ans et que pour y arriver, je devrai retirer mon argent, ce n'est pas la même chose que si je veux investir pour ma retraite. Parce que si j'ai mis mon argent dans un fonds d'actions très risqué et que deux ans plus tard, la valeur de l'action a diminué de moitié, je me retrouve mal pris pour acheter ma maison! Par contre, si c'est pour ma retraite dans 30 ans, ça aura bien le temps de remonter», explique M. Duval.

Les portefeuilles préétablis

Certaines entreprises offrent aussi des portefeuilles préétablis sur le long terme avec une année cible.

«Par exemple, si c'est 2040, le portefeuille sera très axé sur la croissance dans les premières années et plus on approchera de l'année cible, plus les investissements seront prudents. Tout cela se fait automatiquement, donc c'est facile, mais ce qu'il faut se demander, c'est si ce genre de portefeuille répond vraiment à nos besoins. Et si c'est le cas au moment de l'achat, est-ce que ce le sera toujours dans cinq ans? Il faut faire attention», indique Mme Godbout.

À la Banque Nationale, on ne conseille pas ce genre de produits aux investisseurs. «Pour les gens qui cherchent une solution particulièrement conviviale, nous leur conseillons d'aller vers des portefeuilles diversifiés prébâtis, mais qu'on adapte tout de même selon l'investisseur et qu'on rééquilibre de façon récurrente», précise M. Duval.

Nathalie Godbout croit qu'au moins une fois par année, il est bon de revoir la répartition de ses actifs en fonction de son profil et de ses objectifs.

À l'âge de la retraite: trois grands risques 

Nathalie Godbout, directrice gestion de produits, chez Groupe Investors, a identifié trois risques à considérer lorsqu'une personne s'approche de sa retraite et qu'elle doit choisir dans quels fonds communs investir.

1. La longévité: «Généralement, on regarde l'hérédité et on planifie jusqu'à 90 ou 100 ans. Souvent, rendus à un certain âge, les gens veulent tout mettre dans des dépôts à terme. Or, ces produits offrent très peu de rendement, alors il faut se demander si cela leur permettra d'avoir une retraite confortable. Tout en respectant sa tolérance au risque, il ne faut pas bouder les actions, d'autant plus que plusieurs veulent laisser une valeur successorale. Il ne faut pas penser non plus qu'on aura besoin de moins d'argent rendu à 80 ans, parce que si on est encore en forme à ce moment-là, il serait étonnant qu'on veuille rester à se bercer. Et si on est malade, on voudra sûrement se payer des soins», explique-t-elle.

2. L'inflation: «Sur une période de 25 ans avec une inflation de 2%, un dollar ne vaudra plus que 66 cents. Si l'inflation est à 4%, le dollar ne vaudra plus que 38 cents. C'est donc important de prendre l'inflation en considération. Au besoin, il faut compenser lorsque vient le temps de prendre sa retraite en continuant à investir en partie dans des fonds qui donnent des rendements intéressants, tout en respectant sa tolérance au risque», explique Mme Godbout.

3. Le risque du marché: «Le rendement enregistré sur les marchés est très important au moment de prendre sa retraite parce que de grosses sommes sont en jeu, ajoute-t-elle. Si le marché est très mauvais, comme en 2008, où on a eu une baisse sur les marchés canadiens de 33%, on peut perdre beaucoup si on doit faire des retraits. Pour éviter cela, on conseille aux retraités d'avoir l'équivalent d'environ 12 à 24 mois en liquidité. Ainsi, ceux qui n'ont pas paniqué en 2008 ont pu attendre à 2009, alors que le marché avait remonté de 35%, avant de faire des retraits.»