Louis Payeur a tiré des leçons du dernier ralentissement économique, en 2001. Résultat: même si sa production a chuté de moitié cette année, le président et fondateur de Motrec, une PME de Sherbrooke qui fabrique des véhicules électriques industriels, n'est pas au bord de la crise de nerfs. Au contraire.

M. Payeur vient de faire l'acquisition de Bateaux électriques international (BEI), constructeur québécois de bateaux électriques. L'entrepreneur va miser sur ce type d'embarcations pour renouer avec la croissance. «C'est quand les affaires vont bien qu'il faut se préparer au pire. Après septembre 2001, nous avons été pris de court par le ralentissement. Je ne voulais pas répéter la même erreur», explique Louis Payeur, ingénieur en électricité et en mécanique.

Ainsi, de 2001 à 2008, le président de Motrec a complètement restructuré son entreprise en appliquant, entre autres, la méthode japonaise dite «Kaizen». «Nos méthodes de gestion ont également été allégées», dit l'homme d'affaires dans la jeune cinquantaine. Bref, c'est donc avec une excellente santé financière que Motrec traverse la crise actuelle.

En 20 ans d'existence, la quantité de véhicules fabriqués sur une base annuelle par la PME est passée de huit à 1200. Cette année, la production ne devrait guère dépasser les 600 unités. Qu'à cela ne tienne, Motrec a quand même réussi à mettre la main sur les actifs de BEI il y a de cela à peine deux mois.

Motrec dit être le leader canadien du véhicule électrique industriel. Dans ses installations de Sherbrooke (secteur Bromptonville), l'entreprise conçoit et fabrique une vingtaine de modèles de véhicules à batterie. Fed Ex, Nissan, GM et autres Rio Tinto Alcan utilisent les voitures et les tracteurs de la PME de Sherbrooke pour véhiculer leurs employés ou transporter du matériel (jusqu'à 100 tonnes) dans leurs immenses installations. Prix de vente: entre 10 000 et 90 000$.

On raconte que, durant sa campagne électorale, l'automne dernier, le président américain Barack Obama a été vu au volant d'un véhicule électrique de Motrec dans une usine de GM au Michigan.

Motrec est l'un des trois importants acteurs dans son secteur en Amérique du Nord. L'entreprise se distingue avec ses véhicules haut de gamme et fabriqués sur mesure. Elle réalise 70% de ses ventes aux États-Unis, 20% au Canada, et 10% ailleurs dans le monde. Jusqu'au début de cette année, elle employait 50 personnes (qui travaillent maintenant en temps partagé grâce à une aide du fédéral) et ses ventes dépassaient les 10 millions.

Grâce aux trois modèles de bateaux électriques qu'elle va assembler à Sherbrooke, la PME croit pouvoir retrouver la voie de la profitabilité au cours des prochaines années. Comme la saison 2009 est déjà avancée, la PME va surtout se concentrer sur le marché québécois en créant des liens avec des concessionnaires d'équipements de plaisance. Mais dès l'an prochain, promet Louis Payeur, les États-Unis, l'Europe et même le Moyen-Orient entendront assurément parler des embarcations électriques de la PME sherbrookoise.

Si la réponse est bonne, les bateaux électriques pourraient représenter une part importante des activités de Motrec, croit M. Payeur. Un agrandissement des installations de la PME n'est donc pas exclu. «Avec tous les problèmes environnementaux, c'est-à-dire les algues bleues et l'érosion des berges, les bateaux électriques vont être très en demande. Il y a de plus en plus de lacs qui interdisent les bateaux à essence. Et pas seulement au Québec», dit-il.

Ces embarcations se vendent entre 13 000$ et 29 000$. Elles peuvent atteindre une vitesse de 10 km/h, soit juste assez pour ne pas créer de remous. En plus d'avoir un bel avenir devant lui, le bateau électrique s'inscrit parfaitement dans le secteur d'activité de Motrec. «La synergie est là, explique Louis Payeur. On utilise déjà le même type de batteries, de chargeurs, d'instruments de contrôle, d'interrupteurs, etc.»

Jusqu'à tout récemment, Louis Payeur possédait un bateau à essence à sa résidence du lac Massawippi. Il s'apprête à le troquer pour un bateau électrique. Bref, il veut prouver que plaisance nautique n'est pas nécessairement synonyme de puissance. Le défi est de taille.